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Quitterie… c’est fini ?

Publié le 08 février 2009 par Philippe Thomas

Quitterie Delmas , qui semblait promise à un poste de député européen dans la région Centre, vient de claquer la porte du MODEM. Elle s’en explique longuement sur son blog . Etoile montante du parti de François Bayrou, animatrice d’un fort réseau de blogueurs oranges, son départ semble symptomatique du malaise au sein du parti centriste. En effet, tout entier centré autour de son chef, le MODEM est traversé par un clivage entre une forte assise de notables ruraux, âgés, ayant souvent exercé des mandats locaux et une génération nouvelle plus urbaine, plus neuve et novice en politique, fréquemment venue de déçus du PS. L’entrée au gouvernement d’Hervé Morin et la fondation de cet appendice centriste de la majorité sarkozyste qu’est le Nouveau Centre (où se réfugièrent courageusement presque tous les députés MODEM en 2007) n’avaient pas complètement clarifié la situation

Donc, du rififi chez les centristes ! La désignation des têtes de liste du MODEM pour les européennes semble bien avoir obéi aux mêmes logiques conservatrices qu’au PS ou à l’UMP : placer des professionnels de la politique plus ou moins en mal de mandats, plus ou moins en disgrâce ou en réserve. Avec un coup médiatique par ci par là, à savoir Jean-François Kahn pour le Modem. Pas de place pour une certaine « nouvelle génération » qui avait cru pouvoir au MODEM faire de la politique autrement. Pas d’Azouz Begag en position éligible, par exemple. Et un article du Monde daté du 8-9 février qui touche où ça fait mal au centre…

Pourtant Quitterie ne semble pas à proprement parler avoir été écartée. Elle est partie de son propre chef, même si on peine à croire que c’est vraiment de son plein gré. On peut aussi penser qu’elle commet une bévue monumentale : eurodéputé, c’est quand même pas rien et c’est aussi une sacrée tribune ! Elle a l’élégance, malgré la déception que l’on devine, de partir sans dénigrer ni Bayrou, ni le Modem. Mais pour le reste, son départ ressemble quand même à un règlement de compte : « Je n’ai plus le temps de régler mes comptes avec la génération politique au dessus de la notre. Plus le temps de quémander des places pour des gens porteurs d’idées nouvelles. Trop de gens biens en bas des partis. Trop de nazes à l’Assemblée qui squattent depuis 30 ans. Ils n’ont pas voulu de nous. Quelques soient notre âge, notre couleur de peau, nos origines culturelles, notre sexe. Ils se protègent. Aujourd’hui c’est trop tard. Nous sommes ailleurs, partout, dans la rue, dans le métro, dans les bars, dans leurs maisons, dans des bureaux, dans des facs, à l’étranger (…) ».

La question reste entière des motivations réelles de son départ, même si elle semble sincère lorsqu’elle s’en explique : « Et… je n’ai pas candidaté. Pour mille et une raisons que je ne développerai pas ici. Une seule compte à mes yeux : je ne veux pas passer de l’autre côté. Pourquoi une jeune femme, passionnée de l’action citoyenne et politique refuse-t-elle d’être élue, d’exercer un mandat, des responsabilités ? Parce qu’elle a peur. Oui. De se perdre. De perdre l’essence même de son engagement. J’ai vu tellement d’élus changer, se perdre. Peur de mentir aussi. A moi d’abord, aux autres. Peur de demander à d’autres citoyens de voter pour moi alors que je sais que je n’avais pas les leviers d’actions nécessaires pour accomplir ma mission. Personne ne les a en vrai. Notre élite n’a rien vu venir, n’a pas anticipé, ils sont tous en train de courir derrière un monde devenu fou. ». Diantre, elle ne mâche pas ses mots, Quitterie ! Tout ceci sonne vrai mais on pourrait tout de même lui reprocher de n’être point allé jusqu’au bout du processus : avoir vérifié par l’exercice d’un mandat l’impossibilité d’agir qu’elle dénonce…

A 32 ans, elle incarne une génération qui n’a sans doute pas dit son dernier mot et je serais surpris que Quitterie quitte ( !) définitivement la politique après y avoir consacré déjà autant de temps et d’énergie. Pour ma part, j’ai rencontré Quitterie à plusieurs reprises et dans son texte, je retrouve bien la sincérité, la fougue et la volonté de convaincre qui l’animaient, elle et bien d’autres jeunes militants comme à l’université d’été du Modem en 2006. Mais la sincérité en politique… Aussi j’ai bien du mal à comprendre son départ du Modem, à la veille d’être élue… Sans doute pense-t-elle à d’autres modes d’action, à d’autres manières d’être et d’agir en dehors du politic’ show : « Se concentrer. Sur ce qui est possible. Là où nous avons la main. Sans compromis. En commençant par remettre tout en cause. A peser à chacun de nos actes. Se souvenir qu’au delà du bulletin, nous avons mille façons d’exercer le pouvoir : notre consommation, nos médias aussi, et notre temps libre, que nous passons à nous connecter. A sortir du cadre. A inventer ce qui n’existe pas. ». Mmmouais…Citant André Breton, elle dit vouloir changer de jeu et pas seulement les règles du jeu. Soit. Mais on pourrait aussi bien lui reprocher d’avoir abandonné la partie sans jouer… Peut-être pense-t-elle aussi – et je le pense aussi – que le Modem n’a plus d’avenir et qu’il va plonger aux Européennes. Dans ce cas, cet outil politique étant usé, il faudrait évidemment en changer…

D’où certaines spéculations qui naissent dans son propre camp et agitent la blogosphère centriste. Ainsi, un certain Christophe Ginisty l’accuse carrément de vouloir rejoindre… Ségolène Royal via le réseau Désir d’Avenirs ! La suite le dira ou non. Mais même si je crois me rappeler que Quitterie avait voté Royal au second tour des présidentielles, je la crois suffisamment clairvoyante pour ne pas se compromettre avec celle qui constitue la meilleure adversaire de Nicolas Sarkozy, c’est-à-dire pour celui-ci la meilleure assurance-vie de longévité politique…


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