MOI-MÊME.
Je vis avec moi-même – des fois, moi-même me dit :
je ne te reconnais pas –
je ne me reconnais pas.
Moi-même ne sait plus qu’il est moi-même, alors
il n’y a plus que moi qui peux le reconnaître.
Moi-même ne reconnaît pas moi-même en moi.
Lui, le scindé n’est plus que l’ombre de moi-même.
De lui-même, par conséquent (on l’aura compris).
Que faire lorsque moi-même n’est plus soudain lui-même ?
Quand lui-moi-même se surprend à dire « je » ?
Moi-même ne désire plus frayer avec je.
Je ne désire plus frayer avec moi-même.
Je ne désire plus me mélanger à moi.
Mais moi n’est autre qu’un affluent de moi-même.
Quelquefois, moi-même devient un trompe l’œil.
Et moi, je le regarde avec étonnement.
Qui trompe qui ?
De je ou de moi-même que je regarde ?
Entre eux, un infini de réflexivité.
Une suite sans fin de ricochets qui se tamponnent.
Moi-même voudrait s’éloigner de moi, de je.
Je, lui, voudrait bien divorcer d’avec lui-même…
C’est à dire en somme, d’avec moi-même. N’est-ce pas ?
06/02/2009
CAPUCCINO.
J’étais bien, dans le café, cet antre profond
dans une ambiance de veillée au feu de bois
la lumière était un rougeoiement dans le noir
la musique était douce et les voix animées ;
le regard plongé dans le carreau gris, étroit
j’observais la danse exacerbée des flocons
et la rêverie m’entraînait dans sa lenteur
jubilatoire, suspendant le cours du temps ;
au dessus de l’haleine du capuccino
crémeux, fumant me venait sourire béat
j’étais ailleurs et je contemplais
ton visage.
P.L