Dans les secteurs industriels de pointe (aéronautique, nucléaire, pétrochimie..) on considère bien souvent que les ¾ des accidents sont directement imputables aux erreurs humaines. Mais le coupable est tout autre, le constat des enquêtes montre généralement que le facteur principal de ces erreurs provient d’une conception qui ne tient pas compte de l’activité réelle de l’opérateur et des processus cognitifs mis en jeu.
Les méthodes développées par les experts en Facteurs Humains orientés en ergonomie préconisent une démarche de conception qui vise une meilleure adéquation entre les performances du nouveau système et celles de l’utilisateur, il s’agit de mettre en place un aménagement de l’environnement de travail, un environnement adapté au mieux aux caractéristiques et aux performances humaines. L’apport de ces approches en Facteurs Humains ne saurait se limiter à ces systèmes de production ou de transport, les secteurs d’activités en informatique notamment, employant un nombre croissant de salariés, sont confrontés à la nécessité de mettre en place des dispositifs répondant au mieux aux performances des utilisateurs et à leurs besoins métiers ( dans les cas de développement d’applications professionnelles pour les aiguilleurs par exemple).
D’après P.Boutin, la démarche de conception préconisée par les experts en Facteurs Humains vise à :
- Limiter les actions inappropriés des utilisateurs afin de limiter les erreurs et garantir une meilleure fiabilité (ergonomie des interfaces Homme Machine ; utilisabilité des consignes)
- Limiter leur propagation (organisation du travail, conception de dispositifs d’alertes et de messages d’erreur)
- Limiter leurs conséquences (amélioration de la détectabilité des erreurs et leur correction)
L’esprit sous-jacent de cette démarche de conception est que les comportements prescrits et attendus ne peuvent pas être uniquement obtenus par la formation et par les manuels utilisateurs. Si l’on veut que les utilisateurs se comportent au mieux dans les systèmes, il faut leur proposer un environnement de travail favorisant les réponses adaptées et limitant les effets des actions inappropriées.
Cette démarche de conception centrée sur l’opérateur s’alimente depuis plus de 10 ans de documents normatifs qui constituent un référentiel des pratiques pour les experts en Facteurs Humains :
Voici par exemple, les principales normes de conception orientée utilisateurs :
- La norme ISO 13407 : « Processus de conception centrée sur l’opérateur humain pour les systèmes interactifs », qui expose les grands principes à suivre pour la conception comme la préoccupation en amont des utilisateurs, l’itération des solutions de conception et l’intervention d’une équipe de conception multidisciplinaire dans la conception. Ce processus décrit un cycle itératif en 5 étapes représentées ci- dessous : les étapes 2 à 5 sont effectuées en boucle. Lorsque le système répond aux besoins, l'étape 6, le cycle est terminé.
Figure 1 : Les étapes de la norme ISO 13407
- Les normes ISO 9241 relatives aux « Exigences ergonomiques pour travail de bureau avec terminaux écrans de visualisation » comprennent 17 parties. Les parties 1 à 9 concernent les équipements, les environnements et postes de travail. Les parties 10 à 17 de la norme ISO 9241 traitent les recommandations ergonomiques relatives à la présentation et aux propriétés particulières de l’information présentée sur des interfaces utilisateur.
L’intégration des apports de l’ergonomie dans les méthodes de conduite de projet est indispensable pour la prise en compte des aspects Facteur Humain dès la conception du système : il ne s’agit pas de modifier les méthodes de conduite de projet, mais bien d’y intégrer, très en amont l’ensemble des expertises nécessaires, relevant de la technique des sciences relatives à l’homme au travail. Cette démarche de conception implique une bonne connaissance des performances des utilisateurs et une bonne identification des pré-requis pour leur fonctionnement optimal. L’implication de l’ergonome en tant qu’expert en Facteurs Humains doit être constante dans toutes les phases de déroulement du projet, pour concevoir un système favorisant les réponses adaptées et limitant les actions inappropriées, tout en privilégiant la place centrale de l’utilisateur en tant que responsable du contrôle et de la sécurité du système.