Les pudeurs de rosière de la mairie de Paris sur les chiffres de Paris-Plages 2007 n’ont d’équivalents que le triomphalisme du chiffrage de fréquentation de Vélib’ fourni par Decaux. En faisant passer Paris-Plages de 2 à 3 sites, les édiles parisiens auraient-ils perdu leur boulier ? Devant cet excès de précaution, on en viendrait à se poser des questions sur les chiffres claironnés les années précédentes, comme ces « 3,8 millions de Parisiens, Franciliens et touristes (ayant) contribué à la réussite de cette 5ème édition ». Il y a un an, Paris est sa banlieue posait la question de la méthode de comptage, s’étonnant par exemple que 3,8 millions de visiteurs se traduisent par seulement 30.000 signatures pour la libération d’Ingrid Betancourt et ne ramassent que 25.000 préservatifs, des visiteurs bien peu solidaires et en revanche bien prudes. D’où la question, si je viens une fois le matin et une fois l’après-midi, suis-je 1 ou 2 Parisiens, Franciliens et touristes, et si je viens tous les jours de l’opération suis-je 1 ou 29 Parisiens, Franciliens et touristes ? Un peu à l’image de la fréquentation d’un blogue ou d’un site web, avec la différence entre visites et visiteurs uniques ;-) On remarquera d’ailleurs que cette année, la communication de la Ville de Paris sur l’opération Paris-Plages 2007 était nettement plus modeste que pour les éditions précédentes. De là à se demander si Place de l’Hôtel de Ville, on n’avait pas déjà une petite idée sur une possible baisse de fréquentation ou si on avait développé une meilleure réflexion sur le traitement des données statistiques récoltées, ou encore si en adepte du regretté Albert Simon, Bertrand Delanoë n’a pas équipé son bureau d’un bocal avec grenouille pour prédire le temps…
Mais puisque la ville de Paris nous invite à regarder la fréquentation par activité, là on voit bien une baisse de 2006 à 2007. Le tai-chi n’a relaxé que 1.935 personnes contre 2.617 l’an dernier, le trampoline en a fait sauter 19.950 contre 24.928 en 2006, la baignade et l’aquagym ont vu fondre de près de moitié leurs pratiquants de 11.900 à 5.340 mouillés, et Ludo Plage n’a attiré que 4.445 gamins contre 6.564 l’an dernier. Même les signatures en faveur d’Ingrid Betancourt ont pâti de cette baisse de fréquentation, passant de 28.000 en 2006 à 25.400 cet été.
Qu’en conclure ? Qu’il a fait mauvais et que les Parisiens, Franciliens et touristes ont boudé Paris-Plages. Certainement. Pourtant, certaines activités ont au contraire fait preuve soit de la même fréquentation comme le Parvis de l’Hôtel de Ville et ses Beach volley ou rugby (quasi stable avec 21.000 contre 23.000) ou encore le roller passant de 3.030 à 3.135, ou cette forte augmentation d’adeptes de la pétanque bravant le mauvais temps pour passer de 26.670 pointeurs à pas moins de 36.962 ou enfin le nombre de livres empruntés qui a plus que doublé de 1.020 prêts à 2.620 cette année !
Alors on pourrait hasarder une autre hypothèse. Et si Paris-Plages avait été la première victime de Vélib’ ? Car après tout, il fait aussi mauvais sur les quais de la Seine que sur les pistes cyclables de la capitale, et pourtant, Vélib’ a fait un carton, ce n’est pas Denis Baupin qui me contredira. Et cette année, ce sont les bicyclettes grises qui ont gagné le million. A se demander si les Parisiens, Franciliens et touristes n’auraient pas plutôt envie de bouger, de rouler, de profiter d’une ville vidée de ses voitures par la période estivale, pour voir ses monuments, aller d’un quartier à une terrasse, d’une terrasse à une autre, plutôt que de rester allongés sur les transats d’une « plage » dont au bout de 6 ans, le mauvais temps aidant, ils ont finit par faire le tour. Une envie de bouger que confirme a priori le succès du troisième secteur de Paris-Plages, le bassin de la Villette, avec ses 11.000 visiteurs enfants et adultes, venus pour les activités de voile, aviron, canoë, barque, etc. Et pour le million d’utilisations de Vélib’ (attention pas d’utilisateurs ;-), pas trop d’interrogations possibles, tout est compté, computé, informatisé. A part un gros bug informatique ou encore une erreur dans le report de l’écran au papier, on ne devrait pas émettre de doute, si ce n’est de savoir quelle sera son utilisation dans les mois à venir. Car si Vélib’ semble avoir été l’attraction de l’été à Paris, les mois à venir permettront de voir si les bicyclettes grises de Vélib’ ne seront d’abord qu’un véritable nouveau loisir pour les parisiens, un complément dans une approche multimodale des déplacements ou une réelle alternative en terme de transports.
à suivre…