Elle se murmurait sur des sites Internet; elle se racontait dans des dîners mondains; et voilà maintenant qu'elle se publie, se lit et se commente. La rumeur est dérangeante : le très respecté Bernard Kouchner ne serait pas l'homme que l'on croit.
Médecin parisien, journaliste de gauche, baroudeur romanesque, co-fondateur de Médecins Sans Frontières puis de Médecins du Monde, ministre de gauche puis de droite, négociateur de paix, communicant hors pair, mondain pétillant, Bernard Kouchner a tout été. Il a même été consultant international.
Et c'est bien là tout le problème. Car certains journalistes voudraient faire de notre icône pacifiste un consultant barbouzard qui préfère finalement les chèques de dirigeants noirs aux sacs de riz blanc.
Il s'en défend bien-sûr vigoureusement mais dans notre société contemporaine, celui qui attaque a toujours raison. Quand un brûlot part, la communication suit et le mal est fait. On peut batailler, c'est comme remuer dans des sables mouvants.
Et c'est d'ailleurs, la première remarque que nous voudrions faire. Notre monde médiatique permet trop facilement à certains journalistes de donner des leçons de morale sans se les appliquer. Polémiquer tout en... Faisant du marketing. S'assurant un sujet rentable. Satisfaisant son petit ego. Tirant la couverture à soi (Bakchich.info avait sorti la même enquête sur Bernard Kouchner un mois avant Pierre Péan).
Or, et c'est le deuxième point, juger les autres est toujours plus facile que se juger soi-même. Chez BeniNews, nous n'avons pas le moindre point de vue sur la véracité ou non des faits repprochés à Bernard Kouchner. D'autant que nous comprenons que Bernard et Pierre s'affrontent aussi sur l'attitude de la France au Rwanda. Un sujet horrible, dur, ininmagineable et pourtant si réel. Mais au-delà du Rwanda, cette polémique touche à quelque chose d'essentiel : le don.
Bernard est connu, aimé, jalousé pour son passé d'ingérent en chef de l'humanitaire mondial. Pour son passé de "donateur". Car Bernard a beaucoup donné et cela force le respect. Aujourd'hui, on nous raconte qu'il a beaucoup reçu, alors nous sommes déçus. Nous ne savons même pas s'il a reçu un juste salaire pour un juste travail, mais peu nous importe, pauvres de nous, car nous préférons toujours l'attaque. Bouh, le méchant; Bernard a touché des sous. Eh bien, mon Bernard, que vous a enseigné votre mère protestante? Ne vous a-t-elle pas inculqué ces preceptes chrétiens? "Donner sans attendre en retour", "aimer, c'est tout donner et se donner soi-même". Ouh la la, la France est triste. Bernard ne serait pas un saint.
Mais tout ceci reste manichéen. Tout ceci est symptomatique d'un monde qui juge. Que celui qui a déjà donné lui jette la première pierre. Péan es-tu la pierre sur laquelle Jésus bâtirait une Eglise? Chacun de nous sommes-nous des pierres sur lesquelles pourrait se construire notre Eglise?
Laissons donc les polémistes polémiquer ensemble et profitons de ce moment d'intense bagarre médiatique pour réfléchir à nos propres dons. A l'amour que nous partageons. A la justice que nous défendons. A l'espérance que nous éprouvons.
Le théorème du don est très simple : donner, c'est tout gagner. Gagner en liberté. Gagner en charité. Gagner en vérité.
Et pour ceux qui se souviennent de notre article sur le denier de l'Eglise, le diocèse de Lyon a pris une jolie initiative marketing en lançant une campagne marrante, différente, ouverte :