Cette élection est hélas trop souvent détournée de son sens par des considérations de politique intérieure.
Pourtant, le Parlement européen s'est imposé comme un rempart particulièrement
protecteur face aux dérives ultralibérales de la Commission Barroso et au double jeu des Etats-Unis.
Il a purement et simplement tué dans l'œuf les projets de directives de
libéralisation portuaire et de brevetabilité logiciel.
Il a fait échec au principe du "pays d'origine", socialement destructeur et pourtant accepté par tous les gouvernements, en retournant complètement la logique de la directive Bolkestein de libéralisation des services.
Il a repoussé la tentative de déréglementation du temps de travail européen.
Bien évidemment, l'Europe ne peut se réduire à une transposition du modèle français, pas plus que du modèle allemand ou britannique, à tous les Européens.
Le compromis et la négociation sont à la base de toute décision et législation européennes.
Pour autant, toute démocratie se nourrit de prises de positions claires et assumées.
Longtemps l'Europe a été régie dans le secret d'une sorte de "Raison d'Etat" suprême et consensuelle entre sociaux-démocrates, démocrates-chrétiens et une élite administrative.
Aujourd'hui, 50 ans après le Traité de Rome, la paix réalisée, il faut mettre un terme au déficit démocratique et au double langage dans lequel les gouvernements enferment l'Europe, au risque que les peuples rejettent la construction européenne en bloc, plutôt que ne se déplacent pour voter et peser sur les politiques européennes.
50 ans, c'est l'âge de la maturité d'une institution dont le bilan exceptionnel (pacification, démocratisation, développements économique et social) est paradoxalement boudé par les Français et les Européens mais particulièrement convoité dans le Monde.
Il est temps que nous distinguions clairement les programmes de Gauche et les programmes de Droite.
Il n'y a pas à faire preuve d'une grande imagination: au cours du dernier mandat, la Droite a voté pour tous les grands textes de libéralisation quand la gauche demandait une protection des services publics, des dispositions de convergence des droits du travail et des fiscalités, pour prévenir délocalisations et dumping, un budget européen plus important "réorienté" vers la Recherche, les grandes infrastructures, la sécurité énergétique, l'Education et les grandes "sécurités" - sociales, économiques, écologiques, civiles et militaires - nécessitées par le nouveau contexte mondial.
Au cours de la mandature qui s'achève, les votes accomplis par les uns comme par les autres sur les grands textes européens, ont valeur d'épreuve de vérité. Il y aura deux grandes conceptions de l'Europe, en lice lors des élections européennes de juin prochain : d'un côté un projet d'Europe marché, de l'autre, un projet d'Europe politique et sociale.
Ce clivage, parce qu'il existe, parce qu'il est sain, doit être celui d'une campagne qui donne aux européens envie de voter plutôt que de se résigner.
Il suppose notamment que l'on vote utile, sans la dispersion qui affaiblit les Français au sein du Parlement européen, sans céder à la séduction protestataire des nationaux-populismes que génère dans notre pays toute échéance européenne, avec pour conséquence de livrer l'Europe à des majorités libérales.
Il exige que le Parti Socialiste européen présente un candidat à la Présidence de la Commission européenne, pour faire échec à José Manuel Barroso qui a liquidé l'esprit communautaire au profit d'un retour de l'intergouvernemental et d'un droit de veto national paralysant.
En 2009, dans le monde d'aujourd'hui, penser à l'Europe, c'est penser à vous et à votre avenir et à celui de vos enfants.