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Quelle refondation pour le Congo ?

Publié le 03 février 2009 par Unmondelibre
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Une revue de livre par Noël Kodia le 3 février 2009 - Voici une réflexion d’un jeune Congolais, Cyriaque Magloire Mongo Dzon, conscient des problèmes de son pays malgré « la mise en souffrance » de sa génération par le politique. Et le plaidoyer pour la refondation qu’il propose pour le Congo mériterait d’être pris en compte par ses décideurs politiques, surtout que l’élection présidentielle de 2009 arrive dans quelques mois.

Ce livre (1) apparaît comme une page de l’histoire sociopolitique où se reflète plus ou moins la jeunesse congolaise. Il retrace le parcours politique du Congo en se fondant surtout sur l’expérience de tous les présidents, parcours qui pourrait servir à la refondation du Congo. Pour Mongo Dzon, cette refondation sociopolitique s’avère nécessaire pour un pays qui a perdu ses repères au fil du temps. Tribalisme, conflits sociopolitiques ayant entraîné des guerres, sont les erreurs que les Congolais devraient éviter à travers la refondation à laquelle la jeunesse doit prendre une part active.

Pour l’auteur, le Congo souffre en général de la démotivation de ses élites et cadres, ces fameux intellectuels sortis de la FEANF (Fédération des Etudiants de l’Afrique Noire en France) et de l’AEC (Association des Etudiants Congolais) ; ils n’ont pas accompli leur mission et se sont intéressés aux avantages matériels au lieu de servir le peuple comme il se devrait. L’auteur « se demande aujourd’hui d’où sortiront des intellectuels capables de faire la différence, de devenir des pionniers, d’avoir le goût des risques intellectuels. Le Congo […] souffre de la lâcheté de ses élites et de ses cadres » . Un cri d’alarme à la nouvelle génération.

La jeunesse laissée à l’écart par la classe politique doit se réveiller pour une refondation du politique si elle veut servir convenablement le pays. Désoeuvrée, elle constitue une bombe à retardement. Elle devrait se méfier des plaisirs du moment pour préparer l’avenir que les politiques actuels semblent hypothéquer. Pour Mongo Dzon, la jeunesse éprouve des difficultés à sortir du clientélisme et du favoritisme qui sont des obstacles permanents pour la refondation. Et cette problématique s’est matérialisée plus profondément avec l’avènement de la démocratie sur fond de multipartisme qui a créé une césure nord-sud dans le pays. Et devant la lutte idéologique qui s’est transformée en lutte régionale, l’auteur demande aux intellectuels de se ressaisir pour refondre la société pour sa prospérité : « il revient aussi aux intellectuels et aux hommes politiques congolais de trouver des schémas d’intégration des intérêts des uns et des autres de sorte que se lance la machine de développement »

Mais dans la nouvelle donne politique consécutive à la démocratie pluraliste, le triptyque pouvoir-opposition-peuple doit être mis en œuvre pour la réussite de la refondation. Gouverner sans accepter la contradiction et répondre à la critique par des interdictions et des menaces, donne naissance à la mal gouvernance ; c’est le tableau que nous offre la plupart des pays africains. Et le Congo n’échappe pas à cette marginalisation de l’opposition. L’auteur, grand connaisseur du politique congolais car ayant assumé des fonctions au sein des cabinets politiques, nous rappelle que « tous ceux des hauts responsables au Congo qui attaquent (…) les opposants ont un point commun : ils ont des intérêts et des privilèges à défendre ». C’est le peuple et plus précisément la jeunesse qui souffre dans cette confrontation entre pouvoir et opposition. Avec l’avènement de la démocratie, se concrétise la dualité pouvoir-opposition. Mais malheureusement l’Afrique inaugure sa faiblesse démocratique car dans la relation entre pouvoir et partis politiques, naît un divorce entre la démocratie et les compétences. Pour Mongo Dzon, les partis politiques devraient en principe favoriser la démocratie, « proposer des candidats capables de résoudre les problèmes qui se posent dans la société » pour une véritable refondation.

Mais se pose l’existence des tribus, des ethnies, qui hypothèque la problématique de l’Etat-nation. Pour l’auteur, « une véritable refondation de nos institutions et de notre système politique doit respecter les particularités des uns et des autres ainsi que la pluralité d’identification censée enrichir notre pays ». Devant le constat amer qu’il dresse dans le paradoxe qui existe entre les faits et les discours du politique qui promet toujours au peuple, il établit une projection de solutions à même d’interpeller les décideurs politiques de tous bords : ceux-ci doivent se dépasser pour évacuer la crise de dialogue entre pouvoir et opposition, et parfois au sein même de l’appareil de l’Etat. Et l’auteur de citer l’exemple de la tragédie de « l’affaire des disparus du Beach » qui s’est aggravée, faute d’écoute. A cela s’ajoute le manque de dialogue administratif entre l’Etat et les populations dans certains problèmes qui concernent ces dernières. Comme le précise l’auteur, « une bonne politique s’assume mais ne s’impose pas. En s’imposant, elle peut perdre la raison ».

Quelle refondation pour le Congo ?, est un ouvrage qui reflète le Congo des indépendances à nos jours avec les faits politiques les plus révélateurs sur fond de règne des différents présidents qu’a connus le pays. C’est une réflexion didactique d’un intellectuel qui maîtrise la sociopolitique et l’économie de son pays. Voilà donc une réflexion qui participerait utilement à la refondation du Congo en changeant la mentalité des Congolais, gage primordial de son développement.

Noël KODIA est essayiste et critique littéraire.

(1) Cyriaque Mongo Dzon, Quelle refondation pour le Congo ?, Ed. L’Harmattan, novembre 2008, 166 p.


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