Un soir de la semaine dernière, alors que je rentrais tout juste du bureau de Onesource, la tête encore embrumée des affaires en cours, Cai Li me sautera dessus, jubilant de l'annonce
qu'elle formulera : David et Lei Lei, notre couple d'amis franco-chinois, ont décidé de partir en week-end à Xitang, petit village traditionnel du Jiangnan, et souhaitaient
nous faire profiter de la promenade.
Au risque de paraître aberrant, je dois bien l'avouer, les cinq premières minutes, j'ai pris l'invitation avec réserve. Cai Li et moi-même passons de merveilleux moments avec David, Lei Lei, et
leur fille Scylia. Mais les jours ouvrés étant dévolus au travail, j'apprécie les week-ends, où je peux m'atteler à mes violons d'Ingres, à savoir l'écriture, ou le reportage sur lequel je
travaille depuis deux ans, et dont, dès qu'il sera monté, j'offrirais la primeur au lectorat du blog. Partir en week-end, aussi relaxant soit-il, anéantit deux jours de cet aboutissement
créatif.
Mais nous ne prenons pour ainsi dire jamais de vacances, et créer une rupture entre deux semaines chargées ne pouvait que faire du bien. Et puis, vivre en Chine est une opportunité, et sous
prétexte qu'on y a ses habitudes, s'enfermer plutôt que de découvrir le pays est absurde. Nous avions commencé, l'an dernier, à barouder un peu, et nous n'avons pas envie de nous arrêter là,
n'ayant pas visité un dixième des endroits souhaités. Après une brève moue, taraudé entre la culpabilité de ne pouvoir écrire ou monter mon film, et l'idée d'un week-end de farniente, j'ai
réalisé que j'étais bien heureux que David et Lei Lei aient pensé à nous.
Durant la semaine, Cai Li et Lei Lei resteront en contact pour évoquer l'intendance. Très agréablement, je dois le confesser, David et moi-même n'aurons qu'à suivre. Lei Lei s'est chargée de
toute l'organisation, avec brio, car son efficacité en la matière a renforcé un bien-être avéré lors de ces brèves vacances. Elle a trouvé une voiture avec chauffeur, a réservé l'hôtel et les
tickets d'entrée à Xitang, avec la crainte que nous ne soyons satisfaits, alors que, d'une part, c'était parfait, et que d'autre part, à mon sens, si nous n'étions pas contents, nous n'avions
qu'à le faire nous-mêmes... Et nous n'aurions pas pu faire aussi bien.
L'emploi du temps prévoyait que nous partions à Xitang en voiture le samedi matin, y passions la nuit, et rentrions l'après-midi du lendemain. Ce bref déplacement nous a fait un tel bien que je
me propose de le partager avec vous. Je vais faire la part belle aux photos de ce village lacustre du Jiangnan, méconnu des guides touristiques, et qui peut rivaliser sans rougir avec
Zhuozhuang ou Tongli, qui y sont plus fréquemment mentionnés.
1°/Samedi 6 septembre :
Nous nous levons à sept heures et demie, la voiture que Lei Lei a réservée devant passer nous prendre une heure plus tard. Angoissé de nature, je boucle
notre sac avec la nervosité du retardataire. Cai Li, sourire en coin, me rappelle gentiment que nous partons en week-end, que l'horaire a une importance toute relative, que nous n'avons pas
d'avion à prendre, et que je devrais commencer à me détendre, l'objectif étant d'en profiter pleinement. Je psalmodie entre deux gorgées de café matinal, n'osant avouer par fierté idiote que
c’est elle qui a raison.
Avec dix minutes d'avance, le chauffeur passe un coup de fil à Cai Li : il nous attend patiemment à l'entrée de la résidence, et nous invite à prendre le temps que nous souhaitons pour le
rejoindre. Je psalmodie de plus bel au sourire victorieux de Cai Li face à mon anxiété chronométrée. Nous descendons, retrouvons notre chauffeur au volant de son vieux van, et partons pour le
domicile de David, Lei Lei, et Scylia. Le chauffeur ne sachant où cela se trouve, Cai Li appellera Lei Lei, lui demandant l'adresse, et lui indiquant que nous arriverons dans la demi-heure qui
suit. Celle-ci lui répondra que David dort encore ! Ce sommeil tardif, alors que nous sommes en chemin, vaincra définitivement mes angoisses de planning. Je ne pus m'empêcher d'envoyer un SMS à
David, précisant que si il ne se levait pas, il serait en retard pour les vacances.
Trente minutes plus tard, nous arrivons au pied de leur résidence, où tous trois nous attendent.
Après les salamaleks d'usage, nous grimpons dans le van pour atteindre Xitang. David, un peu fatigué, me racontera avoir passé la soirée accoudé à un comptoir avec des collègues espagnols et
suédois qui avaient insisté pour profiter, en sa compagnie, de la vie nocturne à Suzhou. Malgré tout, son énergie reprendra immédiatement le dessus, et comme à chaque fois que nous nous
retrouvons, nous bavarderons durant les deux heures et demie de trajet.
Nous évoquerons notre destination, aucun d'entre nous n'étant jamais allé dans ce village traditionnel du Jiangnan. Le Jiangnan est la région qui inclue le sud
de la province du Jiangsu et le nord du Zhejiang. La traduction de Jiangnan serait « le sud du fleuve », car cette zone australe au fleuve Chiangjiang -qu'on nomme Yang Tsé Kiang en
français- regorge d'affluents, de villages bordés de canaux, et de ponts traditionnels en dos d'âne.
Le village le plus réputé reste Zhuozhuang, au nord de Suzhou, envahi par tant de touristes qu'avancer dans ses ruelles devient aussi difficile que de se frayer un passage dans une ville
méridionale et tauromachique un jour de feria. C'est celui-ci que l'on retrouve dans le Lonely Planet, qui passe hélas sous silence tous les autres, comme Tongli, Luzhi, Xitang, et d'autres, qui
pourtant valent tout autant le détour, sans avoir à en subir la foule.
A Xitang, il y a huit quartiers distincts, séparés par neuf rivières ou canaux, et saupoudrés d'une centaine de ponts traditionnels. Les bâtisses remontent aux Ming et aux Qing, les deux
dernières dynasties. Pour toutes ces raisons, et aussi une histoire qui prend ses sources sept cent ans avant Jésus-Christ, le village est listé par l'Unesco au Patrimoine de
l'humanité.
N'ayant pas pris le temps durant la semaine de nous renseigner sur notre destination, c'est avec une certaine impatience, et une certaine crainte aussi, que nous aurons hâte d'arriver... Car il
commence à pleuvoir, et la profondeur grise du ciel ne laisse rien augurer de bon. Par sécurité, nous avions prévu les parapluies. Mais Lei Lei nous rassurera : elle a vérifié la météo la veille,
et la pluie ne devrait tomber que ce matin. Elle a tout prévu. Nous croisons les doigts.
Assis au fond du van, David et moi-même sentons l'humidité transpercer nos vêtements : le joint au-dessus de nous n'est plus étanche, et la pluie commence à
perler sur nos sièges, pour finir par ruisseler. C'est le week-end, et nous nous en amuserons, nous ratatinant sur le bord de la banquette pour éviter les gouttes. Nous profiterons d'un arrêt sur
l'autoroute pour nous déplier de cette position inconfortable : Dieu merci, il reste moins d'un heure de route.
Arrivés à Xitang, l'averse aura cessé, et nous en serons quitte pour avoir une moitié de pantalon trempée. Lei Lei échangera un coup de fil avec le gérant de l'hôtel, pour que celui-ci passe nous
prendre à l'entrée de la ville, et qu'il nous emmène dans son gîte, au sein du village traditionnel. Après l'avoir retrouvé, nous garerons le van sur un parking aux abords du Xitang touristique,
et ferons le reste du chemin à pied : les ruelles du village sont trop étroites pour qu'une voiture y passe, et la circulation doit, pour peu qu'elle y soit possible, y être
prohibée.
Au sortir du parking, dès que nous pénétrons dans l'enceinte du village, l'atmosphère des allées envahit l'être. Bordées de maisons traditionnelles blanches aux fenêtres de bois et aux toits de
tuiles anthracite en pisée, les ruelles étroites de Xitang transportent dans une autre époque, faisant évoluer le visiteur dans un dédale serein et pourtant labyrinthique. Sur l'instant, cela me
rappellera Venise, emprunt de la même ambiance historique, architecturale et méridionale. Comme à Venise, l'enchevêtrement des maisons, des rues et des ponts, rend difficile la prise de repère.
Et comme à Venise, malgré cette perte de repère, parfois amusante et poussant à la découverte, l'Histoire est présente. A chaque nouveau pas, on devine les ancestrales générations qui
en ont foulé le pavé.
Alors que nous cheminons en suivant le patron de l'hôtel, le site se révèle en vérité, ne
semblant pas avoir subi les perversions de la modernité. L'hôtel est une maison traditionnelle, dont l'une des façades borde l'un des nombreux canaux, l'autre jouxtant la rue. Il s'agit plutôt
d'une maison d'hôtes, dont les habitants offrent quatre chambres à la location. Celles-ci n'étant pas encore disponibles, nous abandonnerons nos sacs avant de partir en quête d'un restaurant.
Quelques dizaines de mètres plus loin, nous déjeunerons le long d'un canal. Le jarret de porc, typique de la région, même si gras, s'avèrera très bon. Cai Li,
Lei Lei, et Scylia sembleront particulièrement apprécier le repas. Un chinois sans âge nous haranguera, armé d'un Er Hu, un instrument à corde traditionnel -sorte de violon se posant sur la
cuisse-, bramant les trois seuls mots d'anglais qu'il doit connaître : « sing a song ! Sing a song ! ». Et pour renforcer son incitation, il nous tendra une liste de chansons
traditionnelles du Jiangnan, rédigée en mandarin : exception faite de « mo li hua », qui doit être la plus connue, je n'arrive à en déchiffrer aucune. Nous tenterons de le
dissuader gentiment, mais son insistance nous obligera à une fermeté presque insultante. Et à chaque fois que nous le croiserons durant le week-end, il tentera de nous vendre l'interprétation
d'une de ces chansons, rieur à l’idée de se faire rabrouer.
Finalement, c'est bien rempli que nous quitterons le restaurant, pour partir nous perdre dans les rues. Malgré quelques axes principaux, le dédale d'allées extrêmement étroites et aux murs hauts
offre un cheminement original et bien agréable, exempt, malgré ses dimensions écrasantes, de la moindre impression oppressante. Nous déambulerons ainsi, pour le plaisir relaxant de ce paysage
lacustre, s'arrêtant devant quelques échoppes artisanales. Etonnement, de manière générale, leurs propriétaires ne nous harcèleront pas pour nous refourguer leurs produits. La typologie
de ces magasins reste assez surprenante : plusieurs d'entre eux ne commercialisent que des boites d'allumettes, et d'autres, assez nombreux, vendent des vêtements d'inspiration indienne. Au-delà
de ceux-ci, la plupart offraient des sucreries traditionnelles, dont notamment un, où le vendeur, à l'aide d'une masse et d'un billot gigantesques, attendrissait violement son nougat.
Notre ticket d'entrée nous donnait le droit de visiter certaines bâtisses, temples ou jardins. Le postulat du week-end étant la relaxation, nous préfèrerons déambuler calmement dans les rues.
Sachant que nous ne repartions que le lendemain, rien ne nous empêcherait, le dimanche, d'effectuer ces visites.
Après une heure où Cai Li n'aura pêché qu'un maigre poisson, mais où elle aura réussi à emmêler l'hameçon à une branche noyée au fond de l'eau, nous repartirons en balade. Malgré la beauté
de l'endroit, David et moi-même nous ferons une réflexion quant à l'utilisation de l'eau des canaux : certains habitants y jettent leurs ordures, les bateaux à moteur y passent constamment, des
enfants y font leur besoins, et les autochtones vont y nettoyer leur linge ou leurs légumes, sans s'interroger quant à la salubrité de la démarche.
Après une heure de promenade, nous rejoindrons l'hôtel, où Lei Lei et Scylia nous attendaient. Nous
pouvions découvrir nos chambres, dont la décoration reprenait très exactement le style local. Certes, celles-ci s'avérèrent petites. Mais cela fait partie de l’architecture des bâtisses de la
région, apportant un charme traditionnel supplémentaire au week-end. Le lit, très dur, me fera craindre pour la nuit. Pourtant le lendemain, je me réveillais sans la moindre courbature, avec au
contraire un sentiment de bien-être physique. Nous avions même la climatisation et la télévision, le tout pour une quinzaine d'euros.
Quand le crépuscule commença à tomber, il offrit en contrepartie de ses ténèbres, de magnifiques lumières
rouges, émises par les très nombreuses lanternes de papier accrochées aux maisons. Xitang -dont la traduction serait « les berges de l'Ouest » ou « le bassin de l'Ouest »-,
avec ses milliers de lanternes, conserve de nuit son calme diurne, sans sombrer dans l'austère. Ces éclairages offrent un nouveau point de vue sur le village, différent, mais tout aussi
traditionnel, et tout autant chargé d'Histoire.
Alors que David et moi-même attendions nos femmes à l’entrée de l’hôtel, un chinois courtois viendra nous aborder, se présentant dans un français irréprochable. Il a vécu en France et au Canada,
et voulait simplement faire notre connaissance, et avoir l’opportunité de pratiquer –avec plaisir nous avouera-t-il- l’idiome de Molière. Après un bref échange de cartes de visite, il disparaîtra
tout aussi poliment. David me fera alors la réflexion : ce type d’échange, en France, serait bien rare. Ici, les chinois n’hésitent pas à faire connaissance avec les étrangers, de manière
souriante et aimable. Comparativement, en France, on afficherait dans la rue une moue morose, par crainte que quelqu’un vienne nous demander l’heure.
Cai Li, Lei Lei et Scylia nous ayant rejoint, nous vagabonderons benoîtement dans les ruelles, jusqu’à ce que nous trouvions
un endroit pour dîner. Sur le trajet, nous croiserons un jeune couple endimanché, posant entre un photographe professionnel et une bâtisse traditionnelle. C’est assez courant ici : les
couples étant sur le point de se marier font réaliser un album de leurs photos de mariage par un studio spécialisé, avant que les noces ne soient prononcées. Et dans de très nombreux cas, les
prises de vues ont lieu dans un cadre enchanteur. A vingt heures passées, nous aurons du mal à trouver un
restaurant. Certes les chinois dînent tôt. Mais nous pensions qu'au sein d'un site touristique, nous pourrions manger à n'importe quelle heure. Nous trouverons finalement un établissement qui
acceptera de nous accueillir, nous proposant de nous installer sur le bord d'un canal éclairé par les lampions pourpres. Nous mangerons correctement, et repasserons à l'hôtel pour y déposer Lei
Lei et Scylia.
David, Cai Li et moi-même nous rendrons dans un bar chinois à la musique assourdissante, au karaoké éreintant, mais où nous passerons toutefois deux heures à jouer
aux dés. Depuis son arrivée, David s'interrogeait sur les règles, et une fois que Cai Li lui aura expliqué, nous jouerons jusqu'à ce que nous rentrions à l'hôtel. Sur le trajet du retour,
dès que le point de vue nocturne le justifiait, j'immortalisais un cliché.
On va dire que c'est une fixation, mais quand nous avons rejoins la chambre et que Cai Li a allumé la télé, ils passaient « Indiana Jones et la dernière croisade ». De bonne fatigue,
nous nous sommes endormis avant que le Graal ne soit retrouvé. Par contre, la nuit a été ponctuée de réveils : l'isolation de la vieille demeure étant d’origine, et les chinois étant
particulièrement bruyants, nous tressauterons à chaque haussement de voix extérieur.
2°/ Dimanche 7 septembre :
Vers neuf ou dix heures du matin, nous rejoindrons David, Lei Lei et Scylia dans un café sur les berges. Ils s'étaient levés bien plus tôt, Sylia
n'arrivant plus à dormir. Nous avons pris le temps de prendre un petit-déjeuner, évoquant la suite de notre périple. Nos tickets incluant l'intérieur de bâtisses que nous n'avions pas visité la
veille, les quelques heures qu'il nous restait à passer à Xitang pouvaient y être dévolues.
Entre deux gorgées de café, David me fera remarquer le calme ambiant : certes il y a des gens, il y a de la vie, mais la sérénité de l'endroit a un impact sur les
individus. Ici, pas de hurlements, pas de sonneries de portables ou de conversations à en crever les tympans... Alors qu'à Suzhou, c'est monnaie courante, et générateur tant de nervosité que de
fatigue. Moi, depuis vingt-quatre heures que nous sommes partis, j'ai complètement déconnecté, sans comprendre vraiment comment j'y suis parvenu. Et Cai Li de me dire, toute sereine elle aussi,
que cela doit venir de l'endroit. J'acquiesce en finissant mon café.
Nous sommes censés quitter notre hôtel avant midi. Nous décidons d'en prendre le chemin, et de nous arrêter sur le trajet pour visiter les lieux aux quels nos tickets donnent droit. Mais on nous
en refusera l'accès les uns après les autres : les tickets étant datés d'hier, il est impossible d'effectuer les visites ce jour. Sur le principe, on s'en fout : l'objectif du week-end, à savoir
faire le plein d'une tranquillité ressourçante, est complètement acquis. Nous ferons alors de maigres emplettes, constituées de sucreries et de bouteilles d'alcool de
riz.
En passant dans certains restaurants, nous remarquerons des photos de Tom Cruise aux côtés du tenancier de l'établissement. Passionné de cinéma, en devisant les clichés de tournage, je
comprendrais que Xitang a hébergé l'équipe de « Mission Impossible 3 ». Cai Li et moi-même ayant visionné la toile il y a un peu plus d'un an, nous nous souviendrons en effet d'une
séquence, censée se dérouler à Shanghai, où l'acteur, incarnant un agent secret, sortait victorieux d'une course poursuite mortelle sur les toits de maisons traditionnelles du Jiangnan. Quand
nous avions regardé le film, Cai Li et moi-même avions pensé que cette scène avait été réalisée à Suzhou ou à Zhuozhuang, mais certainement pas à Shanghai. Nous venions de découvrir que le
tournage avait eu lieu à Xitang. C'était assez marrant de voir toutes ces photos de Tom Cruise accrochées aux murs des restaurants : tous revendiquaient fièrement avoir servi l'acteur qui,
souriant largement sur les clichés, s'était prêté au jeu de la
célébrité.
Après avoir rendu les clés de nos chambres d'hôtel, nous irons déjeuner. Je goûterais alors un met, que David connaît très bien après dix mois de présence en Chine, et qu'après plus de cinq ans sur le territoire, je découvrais ! Il s'agit du niangao, une pâte très douce, et qui, avec une sauce douce, est un régal pour le palais. Nous dégusterons un délicieux repas, et Cai Li nous fera remarquer que nous n'avons pris aucune photo où nous sommes tous les cinq. Un client du restaurant, sympathique, palliera à cette lacune.
Vers une heure et demie, nous récupérerons nos sacs laissés à l'hôtel, et retrouverons notre chauffeur. Pour la petite histoire, Lei Lei lui avait remis cent cinquante yuans, soit un peu moins de quinze euros, pour qu'il puisse louer une chambre pour la nuit. Il aura préféré ne pas rogner son profit, dormant dans son van.
Nous ne mettrons qu'une heure pour rejoindre Suzhou... Alors qu'il nous avait fallu deux heures et demie à l'aller. De même, nous avions payé soixante-cinq yuans de péage à l’aller. Et au retour, cela n'a coûté que quinze yuans. Le chauffeur nous l'avouera avec une certaine gêne : n'étant jamais allé à Xitang auparavant, il n'avait pas pris le chemin le plus court. Là aussi, nous étions en vacances, et quelque part, cette surprise de voir que nous passerions moins de temps que prévu dans les transports nous ravit.
Arrivés à Suzhou, nous déposerons d'abord David, Lei Lei et Scylia chez eux. Le chauffeur nous ramènera ensuite au pied de notre immeuble. Il devait être quinze heures trente ou seize heures. Et quand nous avons ouvert la porte de notre appartement, et déposé nos sacs, Cai Li et moi-même avons ressenti une impression étrange, et particulièrement jouissive : la rupture a été telle, dans ce merveilleux petit village traditionnel de Xitang, que nous avons eu l'impression d'être parti bien plus longtemps qu'un week-end. Pour elle comme pour moi, nous avions pris de vraies vacances.
Le lendemain, nous appellerons David et Lei Lei pour les remercier de nous avoir fait partager ce fabuleux moment. Quand j’aviserais David de ce sentiment de bien-être, de rupture, et de durée, il en plaisantera largement, m'avouant que du fait de son tempérament particulièrement ennuyeux, un seul week-end en sa compagnie prenait toujours des proportions d'éternité. En tous cas, depuis, nous nous sommes jurés de repasser des week-ends ensemble, et continuer ainsi à découvrir le patrimoine régional d’un pays qui a beaucoup à offrir.