Le Nouvel Oservateur donne chaque semaine la traduction d'un article tiré de la presse américaine. Voici le texte d'un article paru dans newsveck qui correspond en tout point àce que je pense.
Si elle désire vraiment résoudre le conflit arabo-israélien, la nouvelle administration américaine devra adopter une position dure avec Israël.Cet article a été publié dans le magazine Newsweek daté du 12 janvier.
Les Juifs passent leur temps à se faire du souci, comme les y incite une histoire marquée par les tragédies. Ils ne manqueront pas dans les prochaines années de raisons de se faire du tracas, et notamment sur la question d’Israël. Les opérations en cours à Gaza ne devraient pas faire beaucoup pour les soulager de leurs angoisses, ni pour assurer la sécurité d’Israël sur le long terme. Les tirs de roquettes de plus en plus précis et meurtriers du Hamas et du Hezbollah ou la probabilité que l’Iran se dote de l’arme nucléaire, sont des sujets particulièrement angoissants. Autre motif de se faire du souci : une administration Obama déterminée à restaurer l’image et la crédibilité de l’Amérique et d’arriver à un accord de paix dans le Moyen Orient.Qu’on ne s’y trompe pas. Barack Obama — comme tous les présidents qui l’ont précédé — sera garant de la relation privilégiée entre les Etats-Unis et Israël. Mais les jours des liens exclusifs avec Israël sont peut-être comptés. En dépit des propos rassurants tenus au cours de la campagne, la nouvelle administration va devoir adopter une position dure, bien plus que Bill Clinton ou George W. Bush, si elle désire réellement résoudre le conflit arabo-israélien.Pour être viable, un accord de paix — que ce soit avec la Syrie ou les Palestiniens — doit se fonder non sur ce que peuvent tolérer les différents acteurs de la vie politique en Israël, mais sur les exigences des deux bords. Apparemment plus fort et déterminé que ses prédécesseurs, le nouveau président semble moins susceptible d’être envoûté par l’un ou l’autre des principaux candidats israéliens au poste de premier ministre — le ministre centriste des affaires étrangères Tzipi Livni, ou le membre du Likoud Benjamin Netanyahu. De fait, si c’est ce dernier qui l’emporte, le président risque (à l’instar de Bill Clinton) de se retrouver à fulminer en privé devant les coups de force de Netanyahu. À la différence de Clinton, si Israël vient à franchir les limites, il se devra au nom de l’intérêt national américain de rendre public son mécontentement.L’enjeu ici est d’arriver à un équilibre dans la relation entre les Etats-Unis et Israël. Cette relation privilégiée, basée sur des valeurs partagées et un engagement de l’Amérique pour la sécurité et le bien être d’Israël vieux de 60 ans, est solide comme le roc. Mais en seize ans, de privilégiés ces liens sont devenus exclusifs, au point de menacer les intérêts nationaux des Etats-Unis, et ceux d’Israël.Si Obama est déterminé à obtenir la paix, il va devoir rééquilibrer cette relation. Premièrement, quelles que soient les transgressions commises par les Palestiniens (et elles sont nombreuses : actes terroristes, violence et incitation à la violence) il devra également se préoccuper du comportement d’Israël sur le terrain. La crise de Gaza est un parfait exemple. Israël a toutes les raisons de se défendre contre le Hamas. Mais est-il raisonnable pour l’Amérique de soutenir une politique dont l’objet et de punir le Hamas en rendant la vie insupportable à 1,5 million de Gazaouïtes, en leur refusant toute aide et possibilité de développement économique. La réponse est non.Reste ensuite la question des implantations. En 25 ans passés à travailler sur cette question pour six secrétaires d’état (ministres des affaires étrangères ndt), je ne me souviens pas avoir eu une discussion sérieuse avec un premier ministre israélien sur les dommages causés au processus de paix par la politique d’implantation — confiscation des terres, fermeture des routes et démolitions de maisons. Cette responsabilité doit être mise en évidence. Et ceci ne peut venir que du président.Obama doit également faire savoir que les Etats-Unis ne participeront pas à l’élaboration d’un processus de paix si l’une ou l’autre des parties sabote en connaissance de cause les chances d’un accord que tentent de négocier les Etats-Unis. Mieux vaut pas d’accord de paix qu’un accord malhonnête, et qui entache la crédibilité des Etats-Unis.Ensuite, Obama doit pour jouer le rôle de médiateur préserver son indépendance et ses marges de négociation. À savoir, ne pas faire valider ses propositions par Israël avant de les présenter à l’autre partie, pratique que nous avons scrupuleusement observée tout au long des années Clinton et Bush. L’Amérique ne doit pas non plus systématiquement adhérer aux propositions avancées par un premier ministre israélien. Notre empressement à suivre Ehud Barak et sa stratégie du "ça passe ou ça casse" au sommet de Camp David s’est révélé très coûteux, alors qu’une approche plus critique aurait pu aider à éviter la catastrophe qui s’en est ensuivie. Collaborer avec Israël sur les sujets concernant sa sécurité est une chose. Offrir à Israël un droit de veto sur les positions et les tactiques de négociation des Etats-Unis en est une autre, et notamment quand il s’agit d’aplanir les obstacles séparant les deux parties.Si le nouveau président recadre sa façon de penser au sujet d’Israël, et envisage d’adopter une position toute aussi ferme avec les Arabes, les prochaines années s’annoncent aussi intéressantes que productives. Je l’espère, car l’intérêt national le demande. La médiation américaine sera incroyablement douloureuse pour les Arabes les Israéliens et les Américains. Bien conduite, avec fermeté et équité, elle pourrait aboutir à la première opportunité de conclure la paix depuis de nombreuses annéesPar Aaron David MillerTraduction de David Korn