Ces temps, on parle que de sous...
Du coup c'est peut-être le moment de se rappeler que s'agissant d'enjeux éthiques, on n'en parle peut-être pas assez souvent. Comme disait un collègue, le document qui reflète le mieux les valeurs d'un hôpital (par exemple) ce n'est pas la Charte Éthique, c'est le budget. A méditer.
Et dans l'interface entre l'argent et la médecine, il y a ces temps des bonnes et des mauvaises nouvelles.
Mauvaise nouvelle: certains américains se trouvent coincées entre les frais de médicaments, d'essence, de logement, devinez ce qu'ils font! Mince, vous avez raison...ils sacrifient leur traitement.
Une raison de mettre sur pied un système de santé à couverture universelle? Ca peut paraître évident vu d'Europe, mais aux USA pas si sûr: ce genre de chose est perçue comme chère, et pas en ligne avec l'idée que les personnes méritantes se débrouillent seules. Les personnes engagées pour un système qui élimine le statut 'sans assurance' aux Etats-Unis avancent d'ailleurs un argument qui nous paraîtrait exotique: un système universel permettrait d'économiser par rapport au 'système' avec lequel les Etats-Unis vivent maintenant. A nous de nous en rappeler si jamais il venait à l'idée de nos systèmes de couper dans la couverture nécessaire au nom de la crise financière.
Mais une bonne nouvelle quand même, l'avancée du fond d'impact sur la santé.
Petit résumé:
Actuellement, un nouveau médicament est breveté, la plupart du temps par une firme pharmaceutique, avec une date limite. Pendant ce temps, le fabricant a un monopole sur la vente de la molécule, et peut en déterminer le prix. Bon, dans la limite de ce que permettent, par exemple, les états qui négocient au nom de leur système de santé. Mais les pays sans système national, ou sans pouvoir de négociation, s'en tirent de toute manière mal dans ce système. Ces groupes comprennent bien sûr les populations les plus pauvres, dont les besoins de santé sont les plus criards. Et même dans les pays riches, des critiques sur le prix des médicaments ont fusé. Il y a bien eu depuis quelques années des cas où des exceptions au monopole ont été consenties, notamment concernant les médicaments contre le SIDA, mais cela reste exceptionnel.
Le problème principal est cependant ailleurs. Le système actuel promeut surtout la recherche industrielle sur des maladies qui touchent des personnes aisées, ou vivant dans des pays qui couvrent bien les traitements. D'où l'équation suivante: il est actuellement plus profitable pour une boîte pharmaceutique de lancer un programme de recherche sur la calvitie masculine, que sur la trypanosomiase...La faute aux firmes? Pas vraiment, en tout cas pas seulement, car elles ne font 'que' suivre leur intérêt dans un système décidé par d'autres, et modifiable.
L'idée du fond d'impact est simple à la base: en plus du système des brevets habituels, un fabricant peut en choisir un autre. Ce brevet 'type B', commenté dans un journal spécialisé récemment, ferait rémunérer la firme par un fonds international à la mesure de l'impact de sa molécule sur le fardeau mondial de maladie. En d'autres termes, il devient tout à coup dans l'intérêt de l'entreprise de 1) faire de la recherche sur les maladies orphelines des pays pauvres, 2) s'assurer que les patients ont accès au médicament et 3) mesurer l'impact. On souhaite plein de succès à ceux qui ont eu cette idée!