1984, c'était il y a un siècle...
Le jour même de l'union sacrée syndicale, je découvre 2084...
... cet incunable de Chris Marker (et du groupe confédéral audiovisuel CFDT, qu'il ne faudrait pas négliger), étrange et mélancolique uchronie à mi chemin entre un certain deuil du cinéma militant (plus réformiste que révolutionnaire, disons), mais tout de même prophétique dans l'inquiétude qu'il distille : lucidité face à "l'hypothèse grise, l'hypothèse crise", inquiétude face au trop-plein d'images et de discours, comme inquiétude devant "ce qu'il reste à faire"... Film saut dans le temps dont la prise d'élan ne prend que plus de valeur aujourd'hui, par son inévitable dimension de futur antérieur.
1984, c'était il y a 25 ans...
Un motif marque dans ce petit film, et que l'on retrouvera chez d'autres titres de Marker (Sans soleil 1983, Level five 1997) : celui du visage écran, impassible reflet de la technologie qui, par un doux vampirisme, y gagne un supplément d'âme. Penser qu'au même moment, on assistait à une autre confrontation entre un homme et une machine, mais elle, annoncée et regardée comme le messie.
Deux faces-à-faces de l'homme et de la technologie. Deux interrogations face au futur. Marker nous dit que nous avons un siècle de militantisme derrière nous, Steve Jobs quelques années d'avance devant nous. Deux façons de tout faire pour que 1984 ne ressemble pas à 1984.