Il est certaines choses qu'il est difficile
d'imaginer, d'autres quasiment impossibles. L'infini en fait partie. Parfois représenté comme un huit horizontal, parfois comme une boucle, d'autres fois avec une simple couleur unie dans
laquelle aucun point de repère n'existe ou encore comme ce noeud tibétain ou par le fameux π, l'infini a toujours été un problème insoluble pour l'Homme, quelque soit la civilisation dans
laquelle il évolue.
Et pourtant, il est possible de concevoir (au sens "se représenter par la pensée") le mot "infini". De même que nous ne savons pas sonder notre cerveau, ni comment exactement fonctionne
l'intelligence, il est possible de mettre un cadre au mot "infini" dès lors que l'on sait que ce cadre est lui même compris dans un autre cadre plus large et ce de façon infinie. C'est l'immense
avantage de la parole que de fixer l'infixable! Et Dieu créa le verbe!
Ainsi, le concept de Dieu, inventé par l'Homme, exprime de mon point de vue, une représentation de ce qui n'est pas entendable par l'esprit humain. Il faut aller au-delà de la conception
réductrice du Dieu créateur (même si l'on pourrait sans doute faire des parallèles entre l'Ancien Testament et certaines philosophies païennes). Dieu est d'abord un concept philosophique:
Dieu, c'est à dire la Nature, disait Spinoza, dépasse notre entendement, notre niveau intellectuel pour que nous puissions l'appréhender. Inutile donc de chercher l'existence de Dieu ou
non. Mieux vaut se concentrer sur l'élévation de l'esprit humain.
Si, de manière panthéiste, on part du principe que chaque chose a une place et qu'il existe un ordre naturel à l'univers (ce qui ne veut pas dire que les choses sont figées: le concept
de "Temps" mériterait d'être abordé aussi), alors on peut dire que pour comprendre Dieu (l'infini), il suffit de se connaître soi-même pour reprendre l'expression d'un autre philosophe. Dieu est
dans chaque chose: chaque chose est une constituante de l'infini et, parce qu'elle fait partie de cet infini, l'infini est dans chaque chose. Y-a-t-il un fond à notre esprit?
Certains savants en tout cas ont mis à jour certains paradoxes de l'infini. C'est le cas de Zénon d'Elée, un philosophe grec, qui énonce que la somme d'un nombre infini de longueur est un nombre
fini. Pour démontrer cela, il imagine Achille parcourant une distance finie. Il doit d'abord parcourir la moitié de la distance qui le sépare de la ligne d'arrivée (1/2) puis la moitié de la
distance restante (1/4)... jusqu'à l'infini. En divisant par deux chaque distance, on obtient jamais la distance finie et pourtant, Achille franchit la ligne! De même, l'infini profondeur de
notre esprit est contenu dans un cerveau. Serait-ce une démonstration qui prouverait que l'univers est fini?
Il est troublant (et je suis admiratif) de constater que la plupart des sociétés dites primitives avaient une conception nettement plus précise, et
nettement plus littéraire aussi, de l'infini. De la philosophie bouddhiste en passant par la conception indienne du monde ou celle des aborigènes, des incas (...), bref des peuples ayant
vécu au contact direct de la Nature, comment expliquer une telle proximité de pensée pour des peuples ne s'étant jamais croisés? Comment ne pas constater qu'à mesure que l'Homme se
dé-territorialisait, sa conception du rapport Homme-Nature évoluait? D'un homme égal de l'animal, on parvient à un homme au-dessus de toute chose!
Je concluerai ce simple exercice neuronale par une citation d'Einstein: "Deux choses sont infinies:
l'univers et la bêtise humaine ; mais en ce qui concerne l'univers, je n'en ai pas encore acquis la certitude absolue".