Y’en a même certains soi disant "de gauche" qui doivent commencer à se sentir mal à l’aise face à la possibilité d’un mouvement social d’ampleur en France, si on en juge par les réactions crispées, les rapprochement précipités, les soutiens qui te soutiennent comme la corde le pendu...
Ça joue les pompiers à qui mieux mieux...
Et vas y que j’appelle immédiatement Sarkozy à "négocier" (mais quoi?) le soir même du 29 janvier (en prenant bien soin de dire que "nous ne pourrons pas faire dix manifestations comme celles du 29 janvier", ou en annonçant que nous n’étions que 300.000 manifestants à Paris...), ou que je publie un "appel des appels" totalement vide et creux (un machin qui parle de "l’idéologie de l’homme économique" - gloups - quelle est cette idéologie-là?), au besoin en le présentant fallacieusement comme un "premier pas vers le socialisme" (oui oui, y’en a qui font ça.... vous avez bien lu...), sans parler des habituels pompiers qui optent pour la solution de diversion des luttes vers l’électoralisme le plus plat, genre "arrêtez de vous battre avec la police, en juin, nous aurons les élections européennnnnneeeesss" (ahhhh.... je suis soulagée....).
En ces temps troublés, on ne rappellera jamais assez à quel point seule la clarté est révolutionnaire, et l’ambiguïté idéologique, un dangereux poison.
Combien viennent nous dire qu’il faut d’urgence (oui, d’urgence) réfléchir à "la violence révolutionnaire" (sous-entendu, pour la condamner) sans prendre, évidemment, la peine de faire d’abord un détour par la violence patronale, la violence policière...
Voir ces 2 ou 3 millions de personnes dans la rue le 29 janvier n’a peut être pas seulement affolé la droite.
Cela a peut être affolé également toute une partie de cette "gôche" parfaitement intégrée au système, (juste un peu plus sociale, un peu plus charitable, un peu plus revendicative que la droite), bref, celle qu’on connaît depuis des décennies et qui nous fait toujours le même coup "il faut savoir arrêter une grève"...
Ben oui, en même temps, il faut la comprendre, cette "gôche"...
Qu’elle se dise "gôche de gauche" ou "gauche du PS", la réalité, c’est qu’elle n’a absolument pas les moyens, selon les mauvaises habitudes qu’elle a prises, (ni l’envie, donc) de gouverner, si d’aventure un fort mouvement social coordonné, déterminé et puissant , parvenait à renverser l’actuel gouvernement (Sarkozy compris)...
Ou plutôt, qu’elle n’a QUE l’envie de gouverner "comme d’habitude", comme on le lui laisse faire depuis des années.
Elle n’a aucun programme politique sérieux susceptible de ramener sur son nom les citoyens révoltés - elle n’en a probablement pas l’intention d’ailleurs, les concessions à faire au mouvement seraient trop grandes, la possibilité de contrôler et d’imposer une conception de la citoyenneté et de la démocratie obsolètes et marquée par le capitalisme serait trop ténue.
Elle n’a pas non plus les moyens d’étouffer le mouvement naissant.
Bref, pour elle c’est un peu la quadrature du cercle, et elle est privée de son dada, à savoir la possibilité, disons le, de gouverner en alternance avec la droite, au fond, de co-gérer le système capitaliste.
De ce fait, l’air de rien, elle biaise pour "mettre le couvercle". Profusion d’appels réformistes lancés par des officines petit-bourgeois qui n’ont pas viré leur cuti, association occulte avec une partie de la droite de gouvernement , dans les actes et dans les paroles...
Ce sont les mêmes qui disaient soutenir les Palestiniens lors des récents massacres de Gaza mais qui ne voulaient pas aller jusqu’à manifester avec le vrai peuple (vous savez, celui qu’on ne peut plus contrôler quand il se déchaîne), et qui préférait finalement, par "rejet du communautarisme et condamnation des extrémismes religieux", se faire sa petite manifestation d’initiés et de gens triés sur le volet un ou deux jours après les autres à Paris...
C’est le même groupe qui mettait dos à dos "13 israéliens tués en cinq ans" et "plus de 1000 palestiniens tués en 3 semaines"
Ma parole, quand je regarde et que j’écoute tous ces gens, que j’observe leurs manœuvres depuis quelques semaines, je me croirai vraiment revenue à la fin des années 60...
Bien sur, je ne dis pas que les élections ne servent à rien.
Je dis que des élections (surtout les Européennes) sans ancrage dans les luttes (ancrage autre qu’une vague présence aux manifestations pour vous refourguer un tract et montrer votre frime aux caméras), les élections sans projet politique (et j’entends par là autre chose qu’un catalogue de mesurettes économiques), et bien, c’est du pipeau.
Quand nous investissons les institutions bourgeoises (nous devons le faire) ça ne peut pas être autrement qu’en révolutionnaires.
Bien sûr, aussi, ne soyons pas aveugles ou naïfs, ce mouvement populaire naissant est comme un mille feuilles ...
Il y a une bouche couche de ce qu’on appelait à une époque les "petits-bourgeois". Puisque les cadres paniquent aussi à l’approche de la grande récession faucheuse d’emplois, paraît-il...
Ceux-là il ne faut pas les écarter d’office, mais il faut "les avoir à l’oeil" - il y a quand même peu de chances que leurs buts soient les nôtres...
Donc, tout le monde ne souhaite pas une perspective révolutionnaire.
Nous savons même que beaucoup souhaitent surtout qu’elle n’arrive pas à la faveur de cette crise...
Nombreux, sans doute, sont celles et ceux qui souhaiteraient simplement une "autre gestion" de la "crise" actuelle.
"Jésus Marie Joseph (sic), Pourvu que les anarchistes, les communistes et l’extrême gauche n’en profitent pas pour prendre le pouvoir dans ce pays", voilà ce que se disent quand même un certain nombre de gens, y compris de ceux qui ont participé aux manifestations du 29 janvier dernier....
On ne peut pas dire que la grande majorité des manifestants participant à la journée du 29 janvier dans toute la France est d’ores et déjà animée d’un puissant sentiment révolutionnaire, ni d’une conscience de classe prolétaire.
Mais...Mais... il y a quand même une révolte, une envie naissante de "faire craquer quelque chose".
Même chez les plus tièdes. Un désir qui pointe son nez, qui commence à se tourner vers du "nouveau". Cela, c’est le début d’une prise de conscience collective qui peut nous emmener loin, à condition que les pompiers ne nous noient pas sous leurs trombes d’eau glacée...
Alors voilà.
Soyons vigilants, prenons garde à ce que nous signons, à ce que nous diffusons, la manière dont nous participons aux mouvements qui se disent "unitaires" et " de masse"...
Il ne faut pas céder à la précipitation, à la panique, à l’urgence.
Il faut absolument laisser le temps au mouvement de prendre de l’ampleur, dans sa diversité , sur des bases de classe, des bases antifascistes et anticapitalistes. Libertaires aussi.
Ne pas le corseter immédiatement dans des "appareils d’appareils"...Ne pas l’enfermer de suite dans des règles ou des coordinations trop rigides.
Et surtout, bien identifier les buts de chacun, derrière les paroles mielleuses et les postures engagées.
Par exemple, pourquoi certain leader d’un parti de gauche nouvellement créé se refuse à tirer toutes les conclusions de ses prémisses?...
Quand il dit "nous ne ferons pas d’alliance avec le PS, nous l’avons quitté !" (ah oui mais ça, je suis bien placée pour savoir que si c’est un premier pas, ça ne suffit pas...), il dit ensuite "nous sommes concurrents du PS" (tout est dit), et il conclut "le PS n’est pas notre ennemi , notre ennemi c’est la droite"...
Pin Pon Pin Pon Pin Pon...
Comprenne qui pourra, pour moi c’est plutôt clair, (mais on dit souvent que j’ai mauvais esprit)...
Il faut aussi se faire confiance, et laisser le temps qu’un projet politique neuf et radical puisse émerger de la confrontation de toutes ces bribes de population qui ne se parlaient plus depuis longtemps et qui se retrouvent à s’unir, pas seulement "contre la crise", pas seulement "contre Sarkozy" mais aussi, contre un système, "contre le capitalisme", n’en déplaise à certains qui voudraient bien que toutes ces "petites" réactions populaires, prolétaires, mises bout à bout ensemble, ne soient que des gentils feux de paille.
C’est donc le moment où jamais de bien lire les lignes et entre les lignes, de prendre le temps de la réflexion et de bien garder en tête ce que nous souhaitons comme perspective vraiment nouvelle : la fin du capitalisme, qui commence nécessairement par la fin de la propriété privée des moyens de production, le pain pour tous, la liberté, la démocratie véritable, bref, le socialisme par exemple.
Fraternellement à toutes et tous.