La finale du Superbowl ce week-end à Tampa, entre les Steelers et les Cardinals, a incité Philostrate à se plonger une nouvelle fois dans ses archives. Comment le football américain,
discipline toujours exotique de ce côté-ci de l'Atlantique, était-il perçu par le sportsman français du début du XXe siècle ? La réponse en texte et en image, avec cet extrait du livre
Le Football, paru peu de temps avant la Grande Guerre…
"Parler du football tel qu'on le joue de l'autre côté de l'Atlantique est parler d'une chose, pour nous autres Français, inconnue, car ce n'est pas l'unique
match joué l'hiver dernier entre deux teams de l'escadre américaine qui peut nous renseigner beucoup à ce sujet. Il est vrai, d'autre part, que durant toutes ces dernières années les
journaux nous apprenaient de temps en temps que tel match entre Yale et Harward ou entre Cornell et Princeton s'était terminé par des morts d'hommes et pas mal de membres cassés, ou bien que la
police était intervenue pour mettre un frein à l'ardeur des joueurs en interrompant la partie.
Nous avons même lu, il n'y a pas si longtemps, qu'une vive campagne avait été menée contre les brutalités du dit football. Mais tout
ceci ne nous a pas appris grand'chose au sujet du football aux Etats-Unis. La seule chose sur laquelle nous nous sommes bien fixés c'est que, pour le jouer, on se capitonne soigneusement des
pieds à la tête et qu'on se garantit le chef par tout un ensemble de protège-oreilles et de protège-nez inusités en Europe (notre gravure).
Si l'on se rapporte aux auteurs anglais, le football américain est de beaucoup le cadet de l'association et du rugby, ses doyens. Il
ne date pas de plus d'une cinquantaine d'années ce qui, pour un sport qui se respecte, est la petite enfance. Il ne faudrait pas en conclure que le football que l'on joue actuellement à Yale ou à
Harward ressemble en quoi que ce soit au jeu de ballon qui se pratiquait dans les fermes le jour de Thanksgiving, après un plantureux déjeuner où le dindon traditionnel avait amené la
joie.
Ce jour-là, en sortant de table, on se rendait entre hommes dans la cour et on s'amusait follement à donner de grands coups de pied dans une
vessie de cochon gonflée d'air. Plus tard, cette distraction simple ne suffisant plus, les joueurs se réunirent en équipes et commencèrent à pratiquer un dérivé sauvage de
l'association, qui ne ressemblait du reste en rien au jeu qu'on pratiquait à cette époque en Angleterre."
Extrait du livre Le Football, rugby, américain, association par Charles Gondouin, arbitre officiel de l'Union des Sociétés Françaises des Sports Athlétiques, et Jordan, ancien
capitaine du Stade Français. Préface de Louis Dedet, Vice-Président du Stade Français. Collection Sports-Bibliothèque.
Editions Pierre Lafitte et Cie. Huitième édition. 1914.