Vendredi matin 30 janvier, sur France-Info, on traitait de la question des temps d’antenne accordés à la majorité et à l’opposition, celle-ci regrettant que les apparitions du chef de l’Etat ne soient pas prises en compte. Notre Ministre de la culture, Madame Christine Albanel, eut alors ces paroles admirables : « il ne faut pas englober le Président dans une logique partisane». Ben, voyons !
Encore faudrait-il qu’il ne s’y engloutisse pas lui-même. Lorsque, le 5 juillet, gesticulant à son habitude, hilare, il déclare, devant l'UMP (tiens, tiens ?) : «Désormais, en France, quand il y a une grève, personne ne s’en aperçoit », on sent bien qu’il est le président de tous les Français, y compris de ceux qui, moins bien lotis que lui, devant le refus de se faire entendre par leurs directions, n’ont d’autre solution que de faire grève, prenant ainsi, selon l’abominable formule des uns et des autres, « les usagers en otages. »
Que l’on me permette de rappeler ce qu’est un otage. Pour se protéger, des forces d’occupation se saisissent, au hasard ou avec la complicité de collaborateurs, de citoyens qu’ils menacent d’exécuter en représailles après des attentats dirigés contre eux. Inversement, des guérilleros en rébellion contre un pouvoir établi capturent des personnes qu’ils essayent d'échanger contre des fonds, des armes ou la libération de leurs camarades emprisonnés. Si je ne suis pas en mesure de dresser un martyrologue de ces victimes, la deuxième guerre mondiale et les diverses guerres, civiles ou étrangères, du Proche-Orient, pour ne citer qu’elles, en ont fait d’innombrables. Toutes ces personnes, assassinées ou simplement privées, parfois des mois, voire des années, de leur liberté, étaient des otages. Il est indécent d’appeler ainsi des usagers qui, certes, se trouvent gênés dans leur vie professionnelle ou familiale, subissent de la fatigue ou des pertes financières, mais ne se sont à aucun moment trouvés en danger de mort. Les coupables, ce ne sont pas les grévistes, mais bien ceux qui feignent de les ignorer, pas vrai, cher Président qui ne voit rien ?
Le 12 janvier, à Saint-Lô, des manifestants ont tenté de se faire entendre d’un Président qui joint l’aveuglement à la surdité, toujours avec ce rayonnant sentiment de satisfaction. Il s’est trouvé contraint d’annuler un de ces bains de foule dont il est si friand (et gare à qui refuse de serrer sa main vénérable !) Résultat : le préfet, M. Jean Charbonniaud, et le Directeur de la police se trouvent prestement virés. Devant certaines réactions indignées, l’aboyeur national, le sieur Frédéric Lefebvre, s’empresse de déclarer : « Il faut s'habituer dans ce pays à ce que les gens qui rendent des comptes ne soient pas nécessairement uniquement les gens qui sont au plus bas niveau de l'échelle » Rendre des comptes, certes, mais pour quoi ? Le préfet, représentant de l’Etat auprès du peuple, doit assurer la sécurité de tous, président compris, mais n’a pas à étouffer la voix de ses administrés. Il serait plus dans son rôle de la faire remonter.
Plus discrètement, notre Président s’est rendu à Provins suite au départ programmé du 2° régiment de hussards cantonné à Sourdun. En compensation, ces militaires seront remplacés par des personnels du SETRA. Le car qui amenait des membres du SETRA à la rencontre du Président a été bloqué par la gendarmerie puis par la police ce qui les empêchés de dialoguer avec notre magistrat suprême non partisan, qui adore pourtant frayer avec le peuple français. Ici, le préfet a su sauver sa tête mais à quel prix ? Depuis quand les manifestations pacifiques sont-elles interdites en France ? Depuis qu’un aspirant Maître du monde s’applique à y confisquer tous les pouvoirs.