Après avoir beaucoup écrit sur le plan de relance français, voici qu'arrive la version américaine qui a déjà été adoptée à la Chambre des représentants. Bien entendu, elle est sans commune mesure avec la nôtre puisqu'elle pèse au bas mot 800 milliards de dollars (l'équivalent de 604 milliards d'euros !). Ce plan répartit les fonds de la manière suivante : 275 milliards de dollars de réductions d'impôts, une augmentation des indemnités chômage, et plus de 540 milliards d'investissements dans des infrastructures (routes, les écoles ou le développement de l'Internet à haut débit).
L'impression que j'ai lorsque je vois les premiers détails de ce pla, c'est qu'il s'agit surtout de juguler l'hémorragie à défaut d'avoir une politique économique définie pour l'avenir. En effet, même si je ne conteste pas la légitimité de ces orientations - réductions d'impôts des particuliers et des PME, allongement de la durée de la couverture chômage, aides aux emprunteurs immobiliers insolvables, avantages fiscaux pour les employeurs qui embauchent - je crains que cela n'apporte pas tous les effets escomptés. Par exemple, l'idée de l'avantage fiscal pour les employeurs qui doit les inciter à engager des salariés est une bonne idée lorsque l'économie n'est pas déjà en récession. En l'état actuel des choses, c'est le carnet de commande vide et un horizon à court terme sombre qui vont influer fortement sur la décision d'embauche et non pas les éventuels avantages fiscaux...
La 2e partie du plan, qui est aussi la plus massive, concerne les investissements dans les infrastructures. J'avais déjà expliqué que dans le modèle de relance keynésien, ce type d'investissements apporte le meilleur coefficient multiplicateur pour peu que ceux-ci soient bien ciblés. Ainsi, l'idée d'Obama de doubler en trois ans la production d'énergies renouvelables, d'amener l'Internet à haut débit dans les zones reculées et d'élargir le réseau électrique est un pas en avant. Mais pour autant, le président américain n'a pas su résister aux lobbies financiers : tout d'abord, il envisage d'augmenter la somme allouée au sauvetage des banques votée sous George Bush (le plan TARP) pour la faire passer de 700 à 1 000 milliards. Ensuite, certains secteurs sortiront plus gagnants que d'autres, ne serait-ce que par l'intense travail de lobbying qu'ils font depuis quelques jours à Washington... A tel point, que le Prix Nobel d'économie Paul Krugman dans une chronique intitulée "Planté en plein chaos", reproche au plan sa logique "conventionnelle" et son manque d'audace, et à M. Obama son refus de "faire des choix difficiles et de résister aux intérêts particuliers". Notamment sa répugnance à envisager "une nationalisation temporaire de plusieurs grandes banques"...
Il faut maintenant attendre le vote du Sénat, où les Républicains ne semblent pas goûter du tout ce plan de relance. Ensuite, si ce plan est voté, il faudra l'appliquer au plus vite et espérer que la confiance revienne afin de changer les anticipations des agents qui risquent fort de se caler sur une logique de déflation...