Petite, je croyais qu'être femme signifiait savoir marcher en talons, se maquiller avant de sortir, éviter les grossiéretés, assortir son sac à ses chaussures... Bref, l'archetype de la pin-up et de Sissi l'Impératrice. Et soyons francs, l'exemple le plus proche de moi, ma mère, était loin de ressembler à ce modèle.
Ma mère, c'est plus la superwoman des années 80, la chef de projet des années 90, celle qui bosse en tailleur, manage des hommes, se prend la tête en réunion et n'a pas le temps de se démaquiller le soir. Qui prend son rôle très à coeur et manage aussi son mari et ses enfants. Sa phrase fétiche était "ma fille, vis ta vie en restant toujours indépendante financièrement". Elle ne m'a appris ni à prendre soin de moi, ni à m'habiller, ni à lire les magazines féminins. Elle ne m'a pas préparé à devenir une femme, la preuve : quand j'ai eu mes premières règles, je lui ai caché pendant un an tellement je me sentais honteuse.
Lorsque je suis partie faire mes études, ma vision a pris de l'altitude et je me suis rendue compte que, bien qu'empruntant la même route qu'elle (je rentrais alors en école d'ingénieur), je ne voulais pas lui ressembler. Je voyais mon père pourtant plus souple qu'un roseau, à deux doigts de casser, et je me rappelais aussi combien ma soeur et moi la craignions quand nous étions petites. C'est bien simple, la moindre remarque du type "tu ressembles de plus en plus à ta mère" me faisait sortir de mes gonds. Cependant, l'avantage d'être à distance, c'est que je la voyais de moins en moins souvent, et que donc, son influence était de moins en moins forte. Mon champ de vision s'est alors élargi et j'ai enfin aperçu d'autres femmes, qui n'étaient pas calquées sur le même modèle. Des femmes qui restaient à la maison, des femmes qui faisaient tout pour leur mari, des femmes qui étaient plus mères que femmes...
Jusqu'au jour où je me suis enfin rendue compte qu'il existait un juste milieu. Une femme qui pouvait me convenir. Celle-là je l'ai rencontrée en entrant dans la vie professionnelle et en tombant amoureuse. En 2009, on peut être une femme libérée et indépendante financièrement sans renier sa douceur, sa famille et sa féminité. On peut avoir un métier à plein temps et garder du temps pour soi, son homme et ses enfants. On peut encadrer une équipe avec autorité mais sans la jouer cheftaine. On peut aimer la mode, les cosmétiques, le maquillage sans être superficielle. On peut passer du temps en cuisine, juste parce qu'on aime cuisiner. Aujourd'hui, c'est moi qui transmets tout ça à ma maman. La preuve, l'autre jour, alors que nous étions ensemble en train de préparer des macarons, elle m'a dit "tu es une mère pour moi".