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Ces faiblesses françaises qui inquiètent l’Europe…

Publié le 19 août 2007 par Danielriot - Www.relatio-Europe.com

EDITORIAL RELATIO par Daniel RIOT : Belle cote de popularité ! La « Sarko-attitude » plait toujours aux Français. La « sarkomania » ambiante a bien résisté au creux de l’été…

Son style direct, « décomplexé », son toupet (« les vacances de Monsieur Culot », titrait, sobrement le Canard Enchaîné), son habileté à tirer médiatiquement parti de toutes les situations, son aptitude à bousculer bien des habitudes, y compris dans sa famille politique, son génie politique qui, pour l’heure, accentue le coup de vieux du PS et le désarroi de Bayrou…

Tout cela est bon pour lui. Le coq français aime son coté « Sarkonapoléon » élève de Machiavel et enfant de la télé. Même ses goûts de luxe, sa fascination du « Gotha », son coté People (pipôle) séduit.

Il n’y en a qu’un qui, dans le concert des chef d’Etat et de gouvernement, rivalise avec lui et sait se montrer à ce point omniprésent dans les médias  de son pays : Poutine, super star et super tsar !

Dans les milieux européens, on préfère ce « dynamisme » et ce « volontarisme » à l’effacement français des « années Chirac ». Et l’on est surtout satisfait de voir que, pour l’heure, son idée de traité « modificateur » est susceptible de sortir l’Union de son impasse institutionnelle. Même si cette bataille du « nouveau traité » n’est en rien gagnée…

Mais  les meilleurs amis de la France ne manquent pas une occasion de  mettre en garde ce « SuperPrésident omniprésent »  contre les effets pervers  de son hyperactivité presque maladive et son égotisme pathologique… « Arrêtes de faire des misères à Angela », lui glisse Junker, le solide luxembourgeois… « L’Europe, c’est une équipe. On n’est efficace que si l’on sait jouer collectif », lui rappelle-t-on avec ménagement ici et là.

En fait, bien des faiblesses françaises inquiètent nos partenaires. Certaines sont liées au « tempérament du manager de la France SA » : son « bougisme » extrême et sa boulimie de « résultats »  sont parfois contreproductifs.

Trop de précipitations par exemple dans le lancement de son « Euro-Méditerranée ». Euromed est à revoir, l’idée (ou plutôt le vieux rêve) d’une Union qui transformerait la Mer des mers en lac est excellentes,  mais des structures existent, des gens travaillent et, surtout, les normes européennes en matière de droits de l’homme ne doivent pas être oubliées…

N’insistons pas sur le dénouement de l’affaire des otages de la Libye… La vie sauve pour les soignants, c’est bien. Oublier qu’ils étaient victimes d’un terrorisme d’Etat, c’est moins bien. Que se passera-t-il demain si d’autres chantages odieux de ce type s’exerçaient ?

La dernière en date des « bavures médiatiques » de Super Sarko est la plus inquiétante pour la crédibilité du « sommet » français. Pourquoi avoir éprouver le besoin d’écrire à Angela Merkel pour lui suggérer de  secouer le G7 ? Comme si les deux hauts responsables ne pouvaient pas se concerter plus discrètement. Comme Si Angela faisait montre d’inconscience devant ces tempêtes boursières. Comme si pendant une telle tourmente le premier rôle des vrais responsable politiques n’était pas de tenter de calmer le jeu ». Mais Sarkozy sait plus clamer que calmer. Quel besoin  de montrer en permanence qu’il est là, à l’écoute, en Docteur miracle de la planète, en Vigie du monde… A force de privilégier le faire savoir sur le savoir faire, Sarkozy prend de sérieux risques et prête le flanc à tous les procès d’arrières pensées. 

« S’il est aussi berlusconien, c’est qu’en fait, il n’a guère confiance en lui… »,  lâche un fin connaisseur des labyrinthes  politiques et diplomatiques européens. « Mais peut-être a-t-il raison de ne pas avoir confiance… Il doit tout de même avoir conscience des faiblesses structurelles qui font que le coq français a un plumage bien terne et un chant bien trompeur. Elles viennent quand les vraies réformes structurelles, celles qui peuvent redonner à la France cette santé économique et sociale qu’elle n’a plus? »

Pour l’heure, il est vrai, la session extraordinaire du parlement a servi à mettre sur rails  des réformettes « sociétales » plus faites pour caresser dans le sens du poil l’opinion que  pour   assainir ce qui doit l’être et moderniser en profondeur des mécanismes bloqués ou enrayés.

Ici, l’on retrouve la dette, bien sûr, ou plutôt les dettes. « C’est toute la France qui est dans l’état des petits propriétaires américains dans l’incapacité de faire face à leurs créances…Le subprime d’Etat provoque un « crédit crunch » politique… Et l’optimisme officiellement affiché n’est guère justifié par les clignotants du tableau de bord de l’économie national. La « rentrée » ? Un retour obligé à quelques réalités. Les exhortations à la Guizot, (« Enrichissez vous », « travaillez plus pour gagner plus ») semblent bien illusoires...Résumons les mauvaise nouvelles d’août

>>>> Le commerce extérieur est encore plus déficitaire au premier semestre 2007 qu'il ne l'avait été un an auparavant (15,3 milliards d'euros contre 12,9),

>>>> La production industrielle a chuté de 0,3 % au deuxième trimestre.

>>>> La croissance  n'a atteint durant ce deuxième trimestre que 0,3 %. C’est  moins qu'au premier trimestre (0,5 %). C’est surtout deux fois moins que prévu. Résultat : il y a peu de chance que la croissance économique atteigne l'objectif fixé par le gouvernement : entre 2,25 % et 2,5 % sur l'ensemble de l'année.

>>> Dire que cette croissance en panne se manifeste  dans toute la zone euro ne constitue en rien une excuse : le commerce extérieur allemand s'apprête à afficher en 2007 un excédent record de 150 milliards d'euros, alors que la France risque, elle, de connaître un déficit record de 30 milliards ? Dénoncer « l’euro fort » (alors que ce sont les autres devises qui sont trop faibles, la chinois, notamment) relève de la propagande politique et de la malhonnêteté intellectuelle. D’ailleurs, c’et l’euro fort qui nous permet de ne pas avoir une factuere énergétique trop lourde…

>>> Les faits sont têtus, comme disait Lénine. Et il des constats qui sont sans appel.  Je reprends ici Le Monde : « « La  France exporte deux fois moins en Chine que l'Allemagne. C'est une des faiblesses françaises : nos exportations en dehors de la zone euro (en parts de marché détenues par les pays de l'eurozone) sont inférieures de 16 % par rapport à ce qu'elles étaient au moment de la constitution de l'Union monétaire (1999), alors que celles de l'Allemagne ont progressé de 11 %, a calculé l'économiste Eric Chaney. »

>>> Le comble, c’est que la seule réforme économique lancée cet été (rognée en partie par le conseil constitutionnel) vise à stimuler une consommation… Qui se porte plutôt bien et qui alourdit nos importations…. Il y a comme un erreur de diagnostic provoquée par un souci de « plaire »

Voilà quelques illustrations (parmi d’autres) de faiblesses structurelles qui rendent bien illusoires les belles déclarations de Christine Lagarde : « Les fondamentaux sont bons: le chômage baisse, l'inflation est totalement maîtrisée et on est sur des perspectives de croissance, si on s'en tient au moral des investisseurs et des ménages, qui devraient nous permettre d'avoir un bon troisième et quatrième trimestre ». C’est bon la « zen attitude », mais qui ne connaît pas les limites de la « méthode Coué » ?

La seule vraie question, c’est de savoir si, politiquement, cette « gouvernance par la séduction » peut engendrer les réformes structurelles qui s’imposent. Des réformes que Bayrou avait mis en avant durant la campagne des Présidentielles et que nombre d’experts proposent jusqu’ici sans succès. Selon Frédéric Lemaître, du Monde, « dans un rapport confidentiel remis à François Fillon le 29 mai, le Conseil d'analyse économique liste "les atouts de la France dans la mondialisation". Pour eux, "c'est surtout sa capacité à investir et à ainsi se maintenir dans le haut de gamme qui explique le succès relatif de l'Allemagne par rapport à la France". S'ils mettent en avant la nécessité de mener des réformes structurelles (fiscalité, marché du travail...), ils jugent plus fondamental de favoriser l'éducation supérieure (l'autonomie accrue des universités va dans le bon sens), la recherche & développement et l'innovation ».

Nous en revenons à la rédéfinition de cette politique industrielle qui a été tellement négligée sous les mandats de Chirac, donc par la majorité sortante et…revenante ! Nous payons notre manque d'audace et d'efficaité en matière de recherche et d'innovation... Même la définition des pôles de compétitivité si bien chantés font sourire nos partenaires : 66 sont retenus.  « C’est de l’excellence généralisée… » C’est peut-être électoralement payant, mais structurellement voué à l’échec… Qu’en pense Sarkozy ? Il va nous le dire, sans doute. Mais ce n’est pas médiatiquement très payant. « On ne gouverne pas dans l’impopularité, mais on n’exerce pas le pouvoir pour se faire aimer », souligne un parlementaire de la majorité présidentielle. « C’est la cote de crédibilité qui compte, non la cote d’amour ». Une devise pour cette rentrée élyséenne ?

Daniel RIOT


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