Fight club a beau être un grand film (on ne rit pas), le meilleur roman de Chuck Palahniuk s'appelle Choke, exploration de l'existence désabusée d'un accro au sexe qui gagne sa vie en étant acteur dans un village vivant et fait des économies en s'étouffant volontairement dans les restaurants. Tout ça pour l'amour d'une mère indigne, pourrie par un Alzheimer galopant. Et il y a en effet tout ça dans le film de Clark Gregg. Sauf qu'à l'écran Choke ressemble à un gros vide pour beaufs, une enfilade de séances de baise, de filles à poil et de blagues lourdingues, le tout sous l'oeil d'un réalisateur sans point de vue.
Si Fight club pouvait paraître trop stylisé, surchargé par les mille et une intentions de David Fincher, Choke est son exact opposé, laid à faire peur, comme un film indé mais en encore plus fauché. L'image est crasseuse, et le fond n'est pas meilleur que le forme, d'où un ennui profond. Heureusement que Sam Rockwell et Anjelica Huston sont d'excellents acteurs : par moments, ils parviennent à sortir le film de sa torpeur bêtifiante. On ne croit en rien plus d'une demi-seconde, chaque scène ressemblant à une petite anecdote de pilier de bistrot, avec au choix un peu de branlette, de nichons ou de semence. Jamais l'irrévérence n'a été aussi conformiste.
Choke ne risque pas de donner envie à quiconque de lire Palahniuk, auteur plus obsessionnel qu'obsédé, certes passionné par les petites histoires sordides, mais surtout prince des pessimistes, persuadé malgré quelques happy ends que la Terre implosera tôt ou tard. Son style souvent amusant se transforme ici en du matériau pour lecteurs de FHM, bassement graveleux, honteusement moche, et franchement sans intérêt.
3/10