La Route du Rock 2007

Publié le 18 août 2007 par Stéphane Kahn

Retourner à Saint-Malo trois ans après une édition où se cotoyaient le Blues Explosion, dEUS, Dionysos, les Troublemakers, Nouvelle Vague, Air, Phoenix et le Beta Band, c’était forcément s’exposer à la déception. Elle fut cuisante et le séjour permit surtout de mesurer à quel point le rock tel qu’il s’envisagea à Saint-Malo en 2007 concernait un périmètre fort restreint dans un genre générique pourtant riche en sous-catégories. A la Route du rock, peu de pop, pas de soul, pas de rap et et surtout nul rock en français. Longtemps réputé pour sa programmation, le festival malouin fut, cette année, étriqué et bien peu imaginatif.

Photos et impressions subjectives en descendant (presque) du train...

The Rain Song (Fort de Saint-Père, nuit du 15 au 16 août 2007)

Post Punk
Quand le revival post punk s’achèvera-t-il ? Difficile de supporter à haute dose les rythmiques binaires et les lignes de basse paresseuses et jouées au médiator par des groupes interchangeables tel Fujiya & Miyagi, 120 Days ou The National. Où l’on constate que Joy Division, Bernard Lenoir et les Inrocks n’ont pas fait que du bien au rock…

Les chansons
Durant trois jours, je me suis ainsi beaucoup demandé où étaient les chansons, les mélodies… Malgré Ladyflash, la chanson mille-feuilles de The Go ! Team, malgré Devastation de The Besnard Lakes.
Entre Herman Düne le premier soir et Albert Hammond Jr, le dernier, beaucoup de temps passa où l’absence d’un groupe sachant allier énergie scénique et savoir-faire mélodique se fit fort cruelle. Quand tout semblait perdu, le guitariste des Strokes intervint comme un sauveur avec ses chansons pop rock indéniablement taillées pour la scène. Trois guitares, un son impeccable et l’un des meilleurs concerts du festival. Le classicisme a du bon et l’on remercie vraiment Albert Hammond Jr de s’être souvenu que le rock existait avant les années 80.

Albert Hammond Jr (vendredi 17 août, 21h45)

Seniors
Bouillie sonore avec les Smashing Pumpkins, très pros, impersonnels et dont la présence représenta tout de même 40% du budget « artistes » du festival… Beaucoup de bruit pour rien tant ce groupe au glorieux passé a peu convaincu avec ses nouveaux titres. Tout l’inverse de Sonic Youth, décidément impeccable en toutes circonstances et revisitant implacablement l’album Daydream Nation pour le festival. En final serein, quelques titres plus pop du dernier disque rappelèrent à quel point les new-yorkais n’ont en fait aucunement besoin – contrairement au faux groupe de Billy Corgan – de se retourner sur leur passé…

Plage
Déception : le vendredi seulement, les traditionnels concerts de l’après-midi purent avoir lieu sur la plage de Saint-Malo. Le mercredi et le jeudi, Thee, Stranded Horse (projet solo de Yann Tambour de Encre) et Sébastien Schuller durent jouer dans le Palais du Grand Large, dans un espace clos peu adapté au folk intimiste du premier et aux mélodies atmosphériques du second. Deux beaux concerts au final, mais qui auraient évidemment mieux convaincu le festivalier les pieds dans le sable et les yeux rivés à l’horizon plutôt qu'entassé dans ce cadre ingrat et peu adapté.

Anonymat
Il est frappant de constater comme les festivals rock sont, en comparaison des festivals de cinéma, peu incarnés par leur(s) programmateur(s). A la Route du rock, pas un mot des organisateurs, personne pour accueillir les festivaliers et encore moins les artistes. C’était ainsi assez triste de voir Yann Tambour ou Sébastien Schuller s’installer sur la scène improvisée du Palais du Grand Large sans personne pour les présenter ou leur dire s’ils avaient le droit de faire un rappel…

Cover
D’Electrelane, allongé dans l’herbe, je n’ai entendu le concert que d’une oreille (enfin, étant donné le volume dément de leur prestation, c’est une façon de parler). Pourtant, après une petite heure de bruit assommant, une reprise incongrue me fit bondir sur mon séant. Oui, c’était bien ça : I’m on Fire de Springsteen. Votre version de cette chanson mineure fut certes nulle (comme le concert), mais c’était un bel effort, les filles…

Parité
C’est sans doute un hasard, mais les meilleurs groupes étaient mixtes. Du collectif dopé de The Go ! Team aux esthètes de The Besnard Lakes, il y a un monde, mais ce furent pourtant durant leurs concerts que l’ennui s’estompa un peu. Et puis n’oublions pas que les excellentes CSS comptent aussi un mec dans leur line-up…

The Go ! Team (jeudi 16 août 2007, 01h00)
The Besnard Lakes (jeudi 16 août, 21h50)

Frustration
Attendu, le live de Justice n’était pas si mal, à condition d’accepter qu’il n’y avait rien à y voir (deux mecs planqués derrrière leurs machines). Jouant beaucoup sur la frustration, retardant au maximum le déclenchement de We Are Your Friends ou de Dance, tubes avérés, on ne peut pas reprocher aux deux DJ d’avoir opté pour la facilité. Maintenant, il paraît que les murs d’amplis Marshall barrant la scène étaient factices et qu’une bonne part du set était pré-enregistrée. L’essentiel, c’est de réussir à faire danser la foule, non ?

Arrêté préfectoral
Stupéfiant : en route pour le Fort de Saint-Père, voici, le jeudi, la navette arrêtée et contrôlée par la police. Pourquoi donc ? Tout simplement parce que si tu es jeune et que tu aimes le rock, sans doute es-tu une saleté de drogué… Sermon moralisateur dans le car, menaces voilées envers qui ne se dénoncerait pas… On a finalement échappé à la fouille des sacs… Vive l’été 67 !

02h30
C’est l’heure qu’il me fallut attendre la toute dernière nuit du festival pour enfin exulter. Avec LCD Soundsystem et un James Murphy très en voix, le festival se termina finalement fort bien. La veille, c’est à la même heure que les Brésiliennes de CSS, avec leur show tonique et drôle, me mirent du baume au cœur. Il était temps.

LCD Soundsystem (samedi 18 août 2007, 02h30)