I
Inconsisté fièvre de gris
chaque nuit la lente fleur sous-marine
se déploie sous la paupière
et nous créons la mer ultérieurement
ce soupçon :
jusqu’au dernier le bruit des nombres.
1
Quand nous eûmes marché cent et une
nuits nous nous arrêtâmes
et
la cent deuxième nuit fut réelle
Haute affirmation de murs
le gris s’élevait infaillible
puis le ciel s’insinuait
vers le sol
Angle tiède
avide du soir
D’enfance les géométries
acquises
le bruit de l’heure
Là où s’arrêtait l’espace : le cri
Présence
douleur de chair close enclose
(et cet autre dans le noir qui contemplait son œuvre)
2
Principe de cité
la muraille fermement étreignait le vide
dans l’ombre
cette forme qu’autour de nous elles disaient
être la ville
mémoires déliées de plaines
entre de hautes herbes
immuable
comme un cheminement
une corne d’or aux abords du ciel
et les corps se déchiraient
les fleuves
une moitié vers le matin
une moitié vers le soir
Dans les rues le règne sévère des aînées
Vivre à ne plus aimer Horloges sauvages
savantes à défaire le monde
Elles digéraient solennellement et
nous ne savions plus jamais que penser
Bruit de l’heure :
une porte tout près de nous refermée
insigne rupture du vide qu’elles en chaque
départ inauguraient par violente parodie
Imposture telle qu’ici elles éluderont nos plus brefs
chemins
dans la lumière de midi
de fortes venues d’enfants
Et jusqu’à l’idée de notre
premier sommeil :
avant que le jour s’achève notre voyage
vers les fonds de la ville.
Michèle Marie Denor (pseudonyme de Michèle Desbordes), Sombres, dans la ville où elles se taisent (non paginé), Arcane 17, 1986
Contribution Sabine Bourgois (voir ici cette note pour l’anniversaire de la mort de Michèle Desbordes, ce samedi 24 janvier 2009)