Tout catholique fidèle ne peut que se réjouir que le pape Benoît XVI ait levé les excommunications infligées le 1er juillet 1988 aux quatre évêques ordonnés la veille par
Mgr Lefebvre. Cette mesure d'apaisement prononcée le 21 janvier dernier, au cours de la semaine de l'unité, est le signe que le pape Benoît XVI est bien décidé à recoudre la tunique
déchirée.
Le décret ( ici ) de levée de ces
condamnations canoniques se réfère à une lettre adressée le 15 décembre 2008 par Mgr Fellay, un des quatres évêques ordonnés à Ecône il y a 20 ans. Dans cette lettre Mgr Fellay écrit ce passage,
cité par le décret, qui montre le pas indéniable qu'il a fait : "Nous sommes aussi toujours bien ancrés dans la volonté de rester catholiques et de mettre toutes nos forces au service de
l'Eglise de Notre Seigneur Jésus-Christ, qui est l'Eglise catholique romaine. Nous acceptons son enseignement filialement. Nous croyons fermement à la Primauté de Pierre et
à ses prérogatives [c'est moi qui souligne] et c'est pourquoi la situation actuelle nous fait d'autant plus souffrir".
Tout n'est pas résolu pour autant, mais, avec la levée des sanctions et cette déclaration de soumission, les deux parties ont fait un grand premier pas vers la réconciliation. Le décret,
de son côté, explique les raisons de la levée des excommunications : "Cet acte exprime le désir de consolider les relations réciproques de confiance, d'intensifier et de rendre stables les
rapports de la Fraternité Saint-Pie X avec le Siège Apostolique. Ce don de paix, au terme des célébrations de Noël, se veut aussi un signe pour promouvoir l'unité dans la charité de
l'Eglise universelle et, par là, enlever le scandale de la division [c'est moi qui souligne]".
Au vu des réactions suscitées dans les média par cette levée de sanctions canoniques, il est bon de rappeler pourquoi les quatre évêques ordonnés par Mgr Lefebvre ont été excommuniés. Ils
l'ont été, ainsi que Mgr Lefebvre, et eux cinq seuls, parce qu'ils ont été ordonnés, et qu'il a ordonné, non seulement sans mandat du pape de l'époque, à savoir Jean-Paul II,
mais encore en dépit de sa mise en garde. C'est pourquoi il s'est agi d'une excommunication latae sententiae, encourue par la seule commission du délit de désobéissance. C'était donc
avant tout une mesure de discipline interne à l'égard de membres éminents de l'Eglise, mais désobéissants. Même si cette désobéissance pouvait avoir des origines
doctrinales.
Dans ce contexte il est tout de même extraordinaire que de bons apôtres, pour la plupart extérieurs à l'Eglise, pour certains ennemis jurés de l'Eglise, pour d'autres
ennemis couvés parfois même en son sein, s'octroient un droit d'ingérence dans les affaires disciplinaires de l'Eglise et qu'ils donnent des leçons à son chef sur sa manière de
la gouverner. De quoi se mêlent-ils, que diable, s'ils sont non-catholiques ? Et catholiques, pourquoi le restent-ils, s'ils se sentent si mal à l'aise en son sein ? Personne
n'oblige personne à être catholique. Il est d'autres façons d'être chrétiens pour ceux qui le souhaitent...
Les média, comme d'habitude, jouent là encore leur rôle de désinformation. Ils contribuent à mettre de l'huile sur le feu en mettant l'accent sur des faits qui n'ont rien à voir avec
la levée des sanctions. Ainsi l'un des quatre évêques a tenu des propos "négationnistes" ( voir les articles de 24 Heures ici et du Matin ici ). La levée de son excommunication serait donc scandaleuse. Quel
rapport ? Aucun. Il est évident que la levée de l'excommunication de cet évêque n'a pas été faite pour le récompenser pour ces propos, et qu'elle n'a rien à voir avec eux, quelque
scandaleux qu'ils puissent être. Cet évêque a été accueilli par l'Eglise parce qu'il a émis sa ferme volonté de se soumettre à l'autorité de Pierre. Lui seul étant responsable
de ses divagations. Ce qui, de toute façon, n'engage pas les trois autres.
Patricia Briel, dans Le Temps de ce jour ( ici ), se fait porte-parole de ses semblables :
"Les catholiques progressistes, dont le malaise grandit tous les jours, aimeraient sans doute bénéficier de la sensibilité paternelle de Benoît XVI concernant leurs revendications: l'accès des
divorcés-remariés à la communion, l'ordination d'hommes mariés, et l'assouplissement du célibat des prêtres". Quel rapport avec la levée des sanctions contre les évêques ordonnés à Ecône ? Aucun.
L'Eglise catholique, à laquelle, encore une fois, personne n'est obligé d'appartenir, a un chef, comme l'a voulu le Christ, et ses règles. C'est elle qui les fixe. Elle n'est pas une
vulgaire entreprise dont les membres pourraient faire valoir leurs revendications. Les quatre évêques ci-devant excommuniés le savent encore mieux que d'autres.
Les fidèles de Mgr Lefebvre ne seraient que 150'000 pour les uns, 200'000 pour les autres. Ces chiffres, estimés au plus bas par les média, comme les manifestants dont les slogans ne leur
reviennent pas, sont pris et repris partout par eux. Ce n'est évidemment pas innocent. Il s'agit là de souligner que les "intégristes", comme les appellent charitablement les mêmes média,
sont quantité négligeable, au regard du milliard de catholiques. Patricia Briel, dans le même Temps de ce jour, décidément en verve, pose même la question suivante, avec une fausse
ingénuité : "Le prix à payer pour retrouver l'unité avec Ecône, qui représente 150'000 fidèles, n'est-il pas trop élevé ?"
Au lieu de faire de Golias sa lecture de chevet, qui, sous la plume de Christian Terras, ose parler ( ici )
de révisionnisme de Vatican II à propos de la levée d'excommunication des évêques lefebvristes, Patricia Briel ferait bien de relire ce passage de
l'évangile selon Saint Jean : "Moi, je suis le bon pasteur, et je connais mes brebis et mes brebis me connaissent, comme mon Père me connaît, et que moi-même je connais mon Père; et
je donne ma vie pour mes brebis. Mais j'ai d'autres brebis qui ne sont point de cette bergerie : et il faut que je les amène, et elles entendront ma voix, et il n'y aura qu'un bercail et
qu'un pasteur"...
Francis Richard