la crise ne doit pas servir de prétexte à remettre en cause l'action publique
Nous savons tous que la crise économique et sociale va malheureusement frapper lourdement la France. D'ores et déjà, le nombre de chômeurs et de Rmistes augmente, nous le constatons dans nos départements. Tous les jours s'allonge la liste des entreprises en grandes difficultés. Aucun secteur ne semble épargné.
Le deuxième collectif, de décembre, a contraint le Gouvernement à refaire ses calculs. Le manque à gagner en terme de recettes fiscales s'avérant plus important que prévu pour 2008 (10 à 12 Md€), le déficit budgétaire devrait encore se creuser, à 56 ou 57 Md€, contre moins de 42 Md€ dans la loi de finances initiale (et 52 Md€ lors de la dernière évaluation), qui a déjà été modifiée une première fois. Et la perspective de rester dans la limite européenne d'un déficit public sous la barre des 3% du PIB ne cesse de s'éloigner.
La crise économique, qui affecte la consommation des ménages et l'activité des entreprises, affecte également les rentrées fiscales qui leurs sont liées. Les chiffres prévisionnels annoncés par le Gouvernement en matière de déficit budgétaire 2009 seront donc loin de la réalité et vont frôler les 100 milliards d'euros.
Il faut agir vite et fort. Le FMI demande ainsi que les grands pays industrialisés mettent en place dans les plus brefs délais une relance budgétaire de 2 % de leur PIB, quitte à l'accroître prochainement jusqu'à 3 % si nécessaire. La Commission européenne, quant à elle, estime que les États membres devaient injecter 200 milliards d'euros dans leurs économies, soit 1,5 % du PIB de l'Union. Avec 0,5 % par an, la France est de tous les pays industrialisés celui dont le plan de relance est le plus modeste, avec l'Italie et les Pays-Bas. Plus prosaïquement, ce plan de relance est de facture très classique et ne contient aucune mesure originale. L'accélération des investissements dans les infrastructures dans l'un des pays les mieux dotés en la matière n'est pas particulièrement novateur. Par ailleurs, l'on constate que le bouclier fiscal et les mesures injustes du début du quinquennat ne sont pas remis en cause.
Mieux : après avoir dénoncé les hausses d'impôts locaux, le gouvernement convoque les collectivités locales pour les sommer d'investir, sans pour autant leur donner les moyens de sortir de la crise structurelle de financement dont l'Etat a l'entière responsabilité : transferts partiellement compensés, plafonnement des recettes fiscales et diminution des dotations. En privant les collectivités locales des moyens de leurs interventions, le gouvernement poursuit un double objectif : affaiblir les politiques publiques, pour laisser la place libre au marché et accuser les collectivités locales - majoritairement à gauche aujourd'hui - de lever trop d'impôts.
Trop modeste pour stimuler la demande, trop peu ambitieux pour véritablement relancer l'investissement, trop politicien à l'égard des collectivités locales, le plan de relance n'a exploré aucune mesure véritablement novatrice, que ce soit en matière d'investissements ou de pouvoir d'achat. A de nombreux égards, ce plan s'apparente à un rattrapage (des retards pris dans l'exécution des contrats de plan, par exemple...) plutôt qu'à de la relance !
Le gouvernement fait le pari d'une récession courte. L'année 2009 s'annonce pourtant meurtrière. Pas moins de 250 plans sociaux d'importance sont en cours d'application, 130 autres se préparent. Pour certaines entreprises, la crise est un prétexte à l'accélération de restructurations et de délocalisations sur lesquelles l'Etat ferme les yeux. L'Etat se saisit également du prétexte de la crise économique pour accélérer le démantèlement des services publics. Les sénateurs socialistes ne sont pas dupes et la crise ne doit pas servir de prétexte à remettre en cause l'action publique...
Jean-Pierre BEL