La crise,
les sociétés secrètes et le nouvel ordre mondial
23 janvier, 2009 par calebirri
A la suite d’une réflexion concernant les sociétés secrètes et leur lien avec ce qu’on appelle le nouvel ordre mondial, je me suis pris à repenser au livre d’Umberto Eco, « le pendule de Foucault ». Dans ce livre, qui retrace pas à pas l’évolution de ces sociétés secrètes au cours des âges, l’auteur arrive à la conclusion que j’expliciterai ainsi : les sociétés secrètes sont créées par ceux qui y croient. Leur fonctionnement n’est pas évolutif mais rétrospectif, en ce sens que chaque créateur d’une nouvelle société se revendique toujours de la précédente, ce qui crée ainsi le lien qui deviendra « historique » pour le créateur suivant.
Partant d’une interprétation orientée de certains textes ou symboles, et usant du mysticisme comme de l’imagination d’un romancier, les différents mythes hermétiques sont fondés sur des éléments invérifiables et souvent faux. Mais à force d’être repris et transformés, agencés différemment et mélangés, tous les évènements de l’Histoire du monde se retrouvent liés en une sorte d’explication générale confuse et si étendue qu’elle peut sembler véridique, surtout à celui qui veut y croire.
Toujours désireux de me prouver à moi-même ce que j’avance, je me remis en mémoire deux citations qui m’avaient interpellées la veille, et me fis un devoir de les lier entre elles, et même si possible avec aujourd’hui. Je vous les donne.
Talleyrand a dit :
« il faut agiter le peuple avant de s’en servir »
Jefferson a dit (en 1804) :
« Je pense que les institutions bancaires sont plus dangereuses pour nos libertés que des armées entières prêtes au combat. Si le peuple américain permet un jour que des banques privées contrôlent leur monnaie, les banques et toutes les institutions qui fleuriront autour des banques priveront les gens de toute possession, d’abord par l’inflation, ensuite par la récession, jusqu’au jour où leurs enfants se réveilleront, sans maison et sans toit, sur la terre que leurs parents ont conquis ».
Ces deux citations peuvent sembler n’avoir aucun point commun, à moins que l’historien adepte des dates soit parmi nous, ou que certains petits malins trouvent déjà la juxtaposition de ces deux phrases un peu suspecte.
Par soucis d’honnêteté, je dois avouer que ma science des dates est plus que limitée, et que je dois moi-même être influencé par les écrits qui tombent sous mon regard, le terme « nouvel ordre mondial » ayant du être prononcé dans le contexte de la phrase de Talleyrand (mais pas à son sujet).
Il faut dire tout d’abord que ces deux hommes se sont certainement connus, car en 1784 Jefferson (1743-1826) se trouvait en France en tant qu’ambassadeur des Etats-Unis, et Talleyrand (1754-1838) était un évêque en 1789. Tous deux connaissaient apparemment un dénommé Adam Weishaupt, célèbre créateur d’une société secrète qui devint rapidement une composante du « grand-Orient », toujours existante aujourd’hui.
En 1804, Jefferson était selon Internet en querelle avec la banque centrale américaine, qui était une banque privée, ce qui selon ses propos le dérangeait.
Il peut sembler étonnant de faire un lien entre ces deux personnages qui selon toute vraisemblance devaient plutôt se détester, d’autant que leur combat n’était pas le même ; car à en croire Internet (toujours lui !), les partisans de la banque privée étaient plutôt du côté « secret », et visiblement Jefferson y était opposé. Mais ce détail ne fait pas vaciller les convictions de l’initié, qui connaît les vraies raisons de cette contradiction : un certain Alexander Hamilton, secrétaire au trésor de 1789 à 1795 et allié des sociétés secrètes visant à instaurer la banque nationale privée, aida malgré tout Jefferson à accéder au pouvoir en 1800 (étrange, non ?). selon des sources dites « plus sûres » comme wikipedia, Hamilton se serrait rallié au camp de Jefferson du fait de sa détestation de l’autre candidat, un certain Aaron Burr. Cela est fortement envisageable, d’autant que Burr tua Hamilton en 1804 lors d’un duel.
Mais selon d’autres sources, un certain rendez-vous secret s’est produit en 1790 entre Hamilton et Jefferson (un autre, Madison, y était également), où Jefferson accepta de soutenir le plan d’Hamilton en échange du projet « Potomac River »
Qu’en est-il réellement ? il faut dire que tout cela devient réellement compliqué, et c’est cela la force de l’imagination créatrice ; peu à peu tout devient possible, et il suffit de « croire » pour voir les liens que l’on désire.
Pour revenir à mon histoire, la politique d’Hamilton fut adoptée en 1790 et apparemment largement basée sur l’endettement. En 1811 le contrat avec la banque centrale américaine (créée en 1790) prit fin, car les problèmes financiers des Etats-Unis étaient grands. Cette banque, comme la politique économique était selon Internet fortement influencée par l’Angleterre (par l’intermédiaire d’Hamilton je le rappelle). Une année plus tard commençait une guerre entre les anglais qui voulaient récupérer des colonies, et les Etats-Unis, qui à la fin d’une guerre les ayant totalement ruiné, revinrent signer le contrat avec la banque centrale.
De son côté, le personnage nommé plus haut, nommé Madison, écrivait en 1789 à Jefferson : « Diviser pour régner, cette règle corrompue propre à la tyrannie est, sous certaines conditions, la seule politique qui permettra à une république d’être administrée par de justes principes. »
Qui est-il au juste ? le président élu en 1809 bien sûr !!
Pour rapprocher un peu Jefferson de Talleyrand, il faut ajouter que Jefferson parlait très bien le français, et qu’en 1797 une correspondance avec un certain Liancourt sous-entend un lien entre ces deux personnages.
On pourrait continuer le cheminement sur le long terme, mais j’ai peur de lasser, et de perdre le lecteur qui a bien vu, je pense, jusqu’où on pouvait aller dans l’interprétation des évènements :
Jefferson, un homme au départ plutôt porté à la liberté, se serait fait entrainer dans des combines plus ou moins officielles pour arriver, puis se maintenir au pouvoir, et ce grâce à son ancien « ennemi » Hamilton, lui-même une sorte de transfuge à la solde du pouvoir anglais.
Ce pouvoir anglais, par cet intermédiaire et la politique économique qu’il a mené, réussit à entraîner les Etats-Unis dans une crise qui déboucha sur une guerre, dont l’issue sera l’acceptation par les Etats-Unis de cette fameuse banque centrale dont Jefferson semblait l’ennemi.
Réalité ou pas, il semble que l’on puisse tout de même croire à certains faits sinon secrets, au moins obscurs qui expliquent les relations de la France avec les Etats-Unis, et leur jeu trouble avec les anglais.
Mais que des faits se soient déroulés dans l’ombre favorise-t-il la croyance en une conspiration, ou une conjuration particulière ?
Aujourd’hui comme hier les relations des grands personnages de l’Etat se font plus ou moins secrètement, et il est rare de connaître la teneur les discussions qui, par exemple, se déroulent dans le bureau ovale ou lors des grands rendez-vous internationaux.
Société secrète ou pas, peu importe finalement, car l’histoire se fait toujours sans nous, et souvent sans notre consentement. Celui qui veut y voir de l’occulte y trouvera son compte, et celui qui veut voir y les logiques difficultés diplomatiques aussi.