Quid du milliard d’euros promis en février 2008 et du “plan Marshall” pour les banlieues annoncé par le candidat Sarkozy ?
Les quartiers attendent encore.
(Source : article paru dans COURRIER INTERNATIONAL N° 951 34 DU 22 AU 28 JANVIER 2009 - Matthew Moran )
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R ien n’a changé dans les banlieues françaises.
Nicolas Sarkozy, pendant sa campagne présidentielle, avait promis un “ plan Marshall ” pour remédier aux problèmes sociaux et économiques de ces quartiers déshérités. Mais les projecteurs des médias ont quitté les banlieues* et Sarkozy et son gouvernement semblent revenir sur cette promesse.
Résultat, le risque de violences est toujours bien présent.
La marche arrière du gouvernement n’est pas passée inaperçue des responsables politiques locaux. Le 4 octobre 2008, les maires de cinq communes qui avaient été parmi les plus touchées par les émeutes de 2005 ont écrit une lettre ouverte au président pour protester contre la réforme de la dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale (DSU-CS), qui apporte une aide financière bienvenue au développement des zones urbaines défavorisées.
Le gouvernement avait, à la demande de Sarkozy, dévoilé fin septembre les nouveaux critères d’éligibilité à cette subvention – des critères qui excluaient nombre de communes frappées par les violences de 2005. Mais cette péripétie n’est pourtant que la partie émergée de l’iceberg.
Avec le plan Espoir banlieues (on aura remarqué l’ironie du mot “espoir”), Fadela Amara promettait des contrats d’autonomie pour les jeunes chômeurs des quartiers : les intéressés devaient recevoir une formation intensive qui déboucherait sur un emploi subventionné.
Or, début octobre, seuls 100 des 4 500 contrats promis pour 2008 avaient été signés [le secrétariat d’Etat à la Politique de la ville annonce que 4 000 contrats étaient signés à la fin décembre] ; 45 000 contrats de ce genre ont été promis sur trois ans.
Sarkozy avait également promis de réduire la fracture sociale qui sépare les banlieues du reste de la société en améliorant la mixité sociale . Or c’est plutôt l’inverse qui semble se produire : le gouvernement tente toujours de réviser certaines dispositions d’une loi de 2000 obligeant les communes de plus de 3 500 habitants à avoir 20 % de logements sociaux ; un nouveau texte soumis au Sénat – et rejeté par la Chambre haute fin octobre – prévoyait d’inclure dans ces 20 % l’accession sociale à la propriété de “ familles aux moyens modestes ” [le texte sera revu en seconde lecture par l’Assemblée fin 2009].
Mais c’est surtout en matière de police qu’on constate la vacuité des promesses de Sarkozy concernant la cohésion sociale. Les relations exécrables entre jeunes et policiers constituent un facteur important des explosions de violence dans les banlieues . Les accusations de discrimination policière sont monnaie courante dans ces quartiers. Pourtant, Sarkozy, qui s’est servi de la question de l’insécurité comme d’un tremplin pour assurer ses succès politiques, n’a fait à ce propos que des gestes symboliques pour améliorer les relations entre la police et la population des banlieues.
En avril 2008, il a lancé la version de droite de la police de proximité, un terme et un concept inventés par la gauche. Le problème, c’est que ces unités auront les mêmes fonctions que les autres. La seule différence semble être leur nom, et rien de notable n’a été fait pour s’attaquer au fond du problème.
Depuis le début de sa présidence, le mode opératoire de Sarkozy, que les médias ont surnommé “ Bling Bling ”, repose sur le spectacle, le show.
Le problème, c’est que, une fois le feu d’artifice terminé, il ne reste apparemment pas grand-chose. Les habitants des banlieues attendent toujours de voir les bénéfices directs du milliard d’euros promis il y a déjà un an. Le fait est que Sarkozy et son gouvernement n’ont rien fait pour régler les problèmes fondamentaux des banlieues.
Et même si les émeutes sans précédent de 2005 s’effacent progressivement des mémoires, qu’on ne s’y trompe pas, le risque de nouvelles violences d’une ampleur similaire est toujours bien présent.
Matthew Moran