C’est surprenant à quel point les mots ont une incidence sur nos humeurs, nos décisions, nos choix de vie. Nous étions très nombreux à attendre les premiers mots prononcés du premier homme politique noir des Etats-Unis mardi dernier. D’ailleurs c’est assez étonnant de constater que le mot « noir » peut faire politiquement peur. Le soir de l’investiture de Barack Obama, Laurent Fabius, dans une interview au Grand Journal de Canal+, utilisait pudiquement l’expression « homme de couleur ». Quelle couleur ? Rouge, orange, jaune, vert ? Pourquoi le mot noir serait à bannir de notre vocabulaire ? Quelques années auparavant ce mot pouvait avoir une connotation péjorative et insultante. Ce n’est plus le cas sauf lorsqu’il est accompagné d’un adjectif qualificatif déshonorant. Il est vrai que dans nos cultures européennes nous nous désignons rarement en tant qu’Homme ou Femme blanc(he). Or, dans certains pays plus lointains et éloignés de nos contrées bien pensantes (au cœur de l’Afrique sub-saharienne ou dans la forêt amazonienne), nous sommes désignés par notre couleur de peau. Certes notre couleur de peau est un signe distinctif qui ne doit jamais nous faire oublier que nous sommes avant tout des êtres humains avec des fonctions vitales identiques. Réhabiliter certains mots demandera du temps, des cicatrices sont parfois trop profondément ancrées dans l’inconscient collectif.
Les mots peuvent blesser, ils ont un réel pouvoir : une expression maladroite et cela peut dégénérer en des règlements de compte sans fin. Un mot mal à propos et c’est la fin d’une relation, un doute qui s’installe et la confiance s’en va. Nous attendons tous, sans exception, un mot d’un être cher, de quelqu’un que l’on admire. Les mots apaisent également : ces « mots bleus qu’on dit avec les yeux »…