Les blogs sont la vitrine des blogueurs, la vitrine de leur passion ou de leur activité professionnelle, les deux pouvant être
confondues. Les blogueurs photographes y présentent leurs photos de couchers de soleil, les
passionnés de pâtisserie présentent leurs tartes aux pommes, les dingues de sexe y présentent, euh... ce qu’ils ont sous la main, les mordues de lectures y présentent leurs lectures et leurs
critiques. Et personne n’y trouve rien à redire (avec quelques nuances dans le troisième cas).
Et quand on est auteur ? Quand on publie des livres ? Eh bien, c’est pareil, on y parle de ses livres, et notamment de ceux que l’on publie.
C’est mon cas. Le rapace du tableau qui figure en bannière (un grand-duc), tient dans ses serres des pages
de tapuscrit, pas des photos ou des tartes aux pommes. Et le titre ne présente aucune équivoque « Georges Flipo, auteur ». C'est un blog d'auteur, avec tout ce que ça implique.
J’annonce donc la couleur, je ne piège pas les visiteurs. La preuve, c’est qu’ils reviennent souvent avec des copains.
La sortie d’un livre n’a lieu, quand tout se passe bien, qu’une fois par an : c’est un temps fort dans la vie d’un auteur, c’est un temps fort dans la vie de son blog. Faudrait-il que je m’impose une obligation de réserve pendant cette période ? J’ai beau réfléchir, je ne vois pas pourquoi.
Je présente donc mes livres dans le même registre que celui de mes billets tout le long de l’année. Avec auto-dérision diront les uns, avec une vanité burlesque, ou pire, diront les autres. Ils en pensent ce qu'ils veulent, et moi aussi. Je les présente à ma façon, comme une strip-teaseuse : un peu à la fois, en commençant par l’extérieur. Puis en effeuillant quelques pages, en invitant quelques héros à faire trois petits pas en scène avant de repartir en coulisse. Après tout, ce n’est pas si loin de la présentation des classiques dans le Lagarde & Michard : résumé, extraits, zoom sur les personnages majeurs. Est-ce que ça donnait envie de les lire ? Cela dépendait des collégiens.
Je sais qu’il y a, sur d’autres blogs d’auteurs, d’autres façons de présenter leurs livres, leurs œuvres. Ou même leurs œuvres qu’ils ne parviennent pas à transformer en livres. Il y en a pour tous les goûts. Je les fréquente assez peu : il y en a très agréables à lire, d’autres assez coincés, voire pénibles, même quand ce sont des blogs d’auteurs que j’apprécie. Quand je n’aime pas, je sors sans pour autant faire pipi sur la porte d’entrée. Et je n’ai jamais prétendu soumettre le tenancier à mes injonctions : il est chez lui, il fait ce qu’il veut.
Chez moi, il y a un climat plus bordélique : j’admets la critique, et j’en tiens parfois compte. J’insiste sur ce point, car il n’y a pas beaucoup de blogs d’auteurs où sont publiés des commentaires désagréables, surtout quand on touche à l’œuvre du tenancier : œuvre en papier ou œuvre en ligne. Aller donc voir ailleurs. Non seulement j’admets cette critique, mais je l’appelle. Avec une démagogie sans pudeur, je demande l’avis des visiteurs sur certains points discutables. Je trouve même parfois qu’ils ont raison.
Il y a pour moi trois limites à cette ouverture des bouches et des cœurs.
1. Eviter la lancinance : si un truc déplaît au visiteur, qu’il le dise. Mais inutile de revenir plusieurs fois à la charge, c’est
inutile, c’est déplaisant. C’est comme à la brasserie Chez Georges : si le client trouve son jambon persillé trop poivré, il le dit à Georges, ça peut lui être utile. Mais inutile de revenir
chaque fois pour commander le même jambon persillé et lui répéter qu’il est trop poivré. Le patron est chez lui, il ne changera pas la recette du jambon pour faire plaisir à 3% de clients
critiques, si 97% le préfèrent comme il est. Il le servira comme il le souhaite, avec plus ou moins de clients dans le restaurant.
2. Rester courtois. Si les plats déplaisent au visiteur, il peut le signaler sans crier : chez Georges, le patron n’est pas
sourd. Mais si vraiment les plats donnent la nausée au visiteur, qu’il aille vite gerber dehors, ne serait-ce que par respect pour les autres convives. Et qu’il ne revienne plus expliquer qu'il
lui a plu de gerber: il y a d’autres restaurants où la cuisine lui conviendra mieux. Et s’il veut qu’on lui serve de la cuisine comme chez lui, qu’il reste chez lui, dans sa petite cuisine.
3. Eviter la polémique. Le consensus ennuie : on peut bien sûr discuter, surtout quand on est
pas d'accord. Mais des clients qui s'engueulent entre eux, qui ne veulent même plus s'écouter, ça plombe l'ambiance du restaurant. Le patron a raison de les fiche à la porte, les
autres clients ne sont pas venus pour ça.
Fin de la parabole. Cela dit, il est très bon, le jambon persillé à 9 € de Chez Georges.
C’est un blog, un blog d'auteur, pas un forum. Je n'ai pas fait d'études littéraires, j'ai appris
à écrire tout seul, tardivement, sans doute après avoir lu de bons auteurs. Quand j'écris mes livres, il m'arrive de demander conseil : j'en reçois de très précieux, mais c'est moi qui vais les
chercher, qui les choisis. Mon blog, c'est pareil, mais en pire : je ne demande aucun conseil. Je ne comprends rien à la logique des blogs, aux communautés, aux RSS, aux flux, tags et swaps, pas
plus qu'aux classements wikio et PRK, j'écris mes billets comme il me convient, je ne cherche pas de coach auto-proclamé pour savoir quel contenu donner à ce blog.
Les billets, c’est moi qui les écris. Dans un climat plutôt relâché, j’en conviens. Mes livres, c’est moi aussi qui les écris. Dans la souffrance,
ceux qui me connaissent le savent. Mais au bout, il y a quelques bonheurs, dont celui de les présenter sur mon blog comme je l'entends, et ce sans le laisser
gâcher par des commentaires trop directifs, si amicaux soient-ils - et je ne parle pas des fielleux qui laissent derrière eux un long
et pesant effluve. L'autre bonheur, c'est celui de lire les critiques, bonnes ou sévères, dans les médias ou dans les blogs. Si, pour avoir droit à de bonnes critiques, ou même à
plus de visiteurs, il faut jouer au gentil auteur docile, il ne faut pas compter sur moi. Je suis entré en écriture, pas en soumission.
Vous avez lu ce billet jusqu’au bout, vous êtes sympa. C'est un autre bonheur. Avec tout ça, j’allais oublier : vous savez ce qui se passe le 8 ? Chuuutttt !