Education Nationale, nouveau système de ségrégation sociale ?

Publié le 08 novembre 2008 par Christophe Laurent

Le Blog Citoyen vous présente ci-après la situation des réseaux d'aide spécialisés aux enfants en difficulté dont l'objet était depuis les années 1990 d'apporter une aide complémentaire aux élèves en collaboration avec les enseignants afin de favoriser l'adaptation et la réussite de chacun. Et si nul ne conteste que de nombreux efforts restaient à faire, il est surprenant de constater que leur disparition annoncée aux professionnels de manière quasiment impérative et sans débat préalable ni même appel. A se demander si notre système d'éducation nationale ne fait pas l'instrument de ségrégation sociale ?

Les Réseaux d'aide spécialisés aux enfants en difficulté sont menacés de fermeture et de disparition pure et simple dans l'indifférence quasi générale. En effet, ce sont 3 000 postes de professionnels spécialisés dans la prise en charge des enfants en difficulté qui vont être supprimés. C'est en assistant à mon premier conseil d'école que j'ai découvert cette information. Il faut dire que jusque là les informations relatives aux réformes de l'éducation me parvenaient, comme beaucoup, par la presse traditionnelle.

J'avais bien suivi le débat sur la question de la carte scolaire dont on nous dit sans vergogne qu'elle était un « système de ségrégation qui assignait des élèves dans leur quartier » et de nous convaincre que sa suppression avait pour objectif de « rendre service aux gens et surtout pour rendre service aux plus modestes ». La réforme s'inscrivait donc a priori dans un objectif de « plus de justice sociale », une démarche donc à laquelle tout un chacun, conscient des inégalités sociales de notre société de consommation, pouvait honnêtement adhérer. Bien sûr, les médias se faisaient l'écho de résistance à ce changement. Mais, ces informations, noyées au milieu d'autres sur les changements d'organisation du travail de la semaine, et notamment  avec la suppression de l'école le samedi matin, trouvaient un écho faible et semblaient s'inscrire dans une seule logique catégorielle. C'est là où l'annonce de la disparition du réseau d'aide spécialisé aux enfants en difficulté sur l'école où se trouve mon enfant et les écoles du secteur couvert m'a particulièrement surpris.

En effet, cette perspective, si elle ne semble émouvoir que les professionnels eux-mêmes [je n'en aurai certainement rien su si je n'avais été élu représentant des parents d'élèves] tant le marasme général contraint chacun à se replier sur soi en espérant vainement d'être épargné par les mauvaises nouvelles, s'inscrit manifestement en pleine contradiction avec les mesures affichées par le Gouvernement de François Fillon et son ministre de l'Education Nationale Xavier Darcos lesquels prônent le retour aux « fondamentaux » et la nécessité de permettre aux élèves du primaire d'en sortir avec les acquis de ces fondamentaux.

Là aussi, le constat éloquent - entre 15 et 20 % des enfants du primaire en sorte sans avoir acquis les fondamentaux - permettait de comprendre et d'adhérer aux discours volontaristes quand bien même là aussi la réforme annoncée impliquait de fait une réorganisation du travail des enseignants du primaire dans l'application d'une équation simple : la suppression des cours le samedi matin - « ce temps appartient aux parents », voilà un bel argument de justice sociale ! Que ceux qui ont les moyens de partir en week-end à la campagne le fassent, les autres n'auront qu'à s'occuper - permet de fait au ministre de l'Education Nationale d'afficher calmement que ce temps de travail libéré permettra aux enseignants de consacrer du temps (2 heures) pendant la semaine aux élèves (ces 15 à 20 %) d'élèves en difficulté.

C'est là où survient la contradiction car d'un côté, le discours national officiel nous annonce à grand renfort de démarches communicantes que des efforts vont être entrepris pour lutter contre l'échec scolaire - et chacun peut confirmer que tous les enseignants n'ont qu'un seul objectif qui est bien celui-là, seulement on leur rejettent trop facilement la responsabilité individuelle de cette situation alors qu'il s'agit d'un phénomène sociétal - et de l'autre côté, les informations glanées sur le terrain prouvent que ce n'est pas exactement ce qui va se passer.

Nul en effet ne conteste l'impérieuse nécessité de renforcer les moyens pour lutter contre l'échec scolaire source première de l'inégalité sociale, véritable plaie de la société française, mais comment est-ce possible si on décide au même moment de supprimer les 3 000 postes de professionnels spécialisés (enseignants E et G, psychologues, éducateurs spécialisés, etc.) qui font déjà un travail remarquable mais dont tous reconnaissent qu'il est insuffisant ?

Si cette information vous interpelle, je vous invite instamment à vous renseigner par vous-même. Vous trouverez ci-après quelques liens sur le net qui vous permettront d'en savoir un peu plus sur les réseaux d'aide spécialisés aux enfants en difficulté. Si vous connaissez des enseignants ou des professionnels de l'éducation ou de la petite enfance, parlez-en avec eux, et vous constaterez ce qui se profile.

Autant le dire, je ne fais pas partie des catégories sociales les plus défavorisées, et je forme le vœu que cette situation personnelle de « favorisé » me permette d'offrir à mon enfant le plus de « chance » possible dans la vie qu'il aura choisi, mais cette situation ne m'autorise pas à fermer les yeux sur les conséquences à venir d'une politique qui veut officiellement lutter contre les inégalités sociales et dont il est à craindre qu'elle ne conduise qu'à les aggraver au moment où le contexte national et international sur le plan économique va faire que les inégalités économiques vont devenir encore plus criantes. J'ai choisi l'école publique et laïque par conviction, et il est triste de constater que la puissance publique (rappelons que c'est avec nos impôts qu'elle met en œuvre cette politique) préfère tenir de beaux discours plutôt que d'être au chevet des plus défavorisés.

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1/ Voir le site de la pétition : sauvons les rased, Au 8 novembre 2008, il y a 108766 signatures électroniques enregistrées depuis le 12 octobre 2008

2/ Voir l'excellent site de Daniel Calin qui nous présente de manière détaillée ce que sont les Rased, avec les textes à l'appui, et où on apprend que « les RASED sont apparus en 1990, avec la Circulaire n° 90-082 du 9 avril 1990, par transformation des GAPP créés en 1970. Ils sont régis actuellement par le Titre II de la Circulaire n° 2002-113 du 30 avril 2002. Avec les CMPP, ils sont les héritiers de l'approche psychopédagogique des difficultés scolaires qui s'est développée en France après la seconde guerre mondiale, dans la foulée de la Résistance.
Les RASED ont pour mission de fournir des aides spécialisées à des élèves en difficulté dans les classes ordinaires des écoles primaires, à la demande des enseignants de ces classes, dans ces classes ou hors de ces classes. Ils comprennent des enseignants spécialisés chargés des aides à dominante pédagogique, les "maîtres E" (difficultés d'apprentissage), des enseignants spécialisés chargés des aides à dominante rééducative, les "maîtres G" (difficultés d'adaptation à l'école), et des psychologues scolaires.


L'existence de ces structures indispensables à l'aide aux élèves en grande difficulté est actuellement remise en cause. Alors que les moyens des RASED ont toujours été insuffisants pour couvrir les besoins, alors que la plupart des RASED sont déjà incomplets, des milliers de postes vont être supprimés. Les RASED sont menacés de disparition complète dans les trois années à venir.
 »

Présentation de Daniel Calin

3/ On peut aussi aller sur Wikipédia

4/ Pour ceux qui doutent du discours politique, je les invite à consulter par eux-mêmes le site très communicant - et très instructif - du Gouvernement de François Fillon « Toutes les réformes » et notamment la page de Xavier Darcos

5/ Voir le forum des enseignements spécialisés

<a title="sondage politique gouvernement matiere permettra elle reduire" href="http://www.123votez.com/sondages/sondage-politique-gouvernement-matiere-permettra-elle-reduire-13603_43604.php" mce_href="http://www.123votez.com/sondages/sondage-politique-gouvernement-matiere-permettra-elle-reduire-13603_43604.php" >La politique du Gouvernement en matière permettra-t-elle de réduire les inégalités sociales ?</a> depuis <a title="sondage gratuit" href="http://www.123votez.com" mce_href="http://www.123votez.com" >faire sondage </a>