« Couvrez ce bonus que je ne saurais voir. Par de pareils objets les âmes sont blessées, et cela fait venir de coupables pensées. » (Acte III, scène II)
Regardez comment Nicolas Sarkozy concourt pour le César du meilleur Incorruptible : veuillez cacher ces bonus que je ne saurais voir !
La mode est au poujadisme anti-banquier et anti-gros patrons. Revoilà le syndrôme de Necker. La Droite a donné le la. Ouh, les méchants banquiers et les mauvais chefs d’entreprise qui osent s’empiffrer alors que le peuple a faim ! On vous désigne à la vindicte populaire, car vous, les bourgeois, vous avez eu l’audace de ne point vendre vos biens et de vous promener la corde au cou aux Halles.
Mais vos accusateurs, l’ont-ils fait ?
Non évidemment, non. Nicolas Sarkozy n’a pas baissé son salaire de 50% parce que nous entrons bientôt en récession.
Regardez comment la Gauche redouble d’intensité sur ce sujet. Pour Xavier-Henri Emmanuelli, Molière du meilleur Torquemada, cela ne suffit pas ! Le geste de Sarkozy revient à demander aux gourmands d’ôter la chantilly sur le dessert, mais surtout de ne pas toucher la tarte elle-même. Que proposez-vous donc ? Qu’on les pendît ?
L’élite, qui sent gronder le peuple, a empoigné sa fourche et s’est mise à courir devant la foule révolutionnaire. Elle sera la première à voter la condamnation à mort, pourvu que ce ne soit pas la sienne. Est-ce donc ceci la démocratie, une meute de chiens affamés prête à déchiqueter ses frères pour calmer la horde ?
« Nous vivons sous un prince ennemi de la fraude. »(Acte V, scène VII)
Car un doute m’étreint, et mon audace de pensée s’esbaudit. Etaient-ils donc libres ces banquiers ? Qui était donc censé les surveiller ? Qui était donc ministre des Finances sous Chirac. N’était-ce point un certain Nicolas Sarkozy ?
Où étaient les politiques pendant ces années de vache grasse. Qui a exercé un contrôle démocratique ? qui s’est inquiété ? « Le scandale du monde est ce qui fait l’offense, Et ce n’est pas pécher que pécher en silence » ?
La Gauche est-elle moins coupable, elle qui a présidé aux affaires jusqu’en 2002 ? Qui est représentée au Parlement par des centaines de députés ? Qu’a-t-elle fait pour moraliser la vie financière de ce pays ?
La faillite du système financier n’est pas seulement une tâche qui colore l’honneur de la banque, mais aussi celle du monde politique. Mais dans cette affaire, on se trompe de combat. Les banquiers sont nos amis, il faut les aimer aussi. Ce sont des commerçants comme les autres, des épiciers d’un autre genre, des citoyens comme vous et moi.
On semble découvrir maintenant qu’il est intolérable qu’un banquier gagne 1 million d’euros par an alors que le smic fait quelques centaines d’euros mensuels. Mais tout ceci n’a strictement rien à voir avec la crise hypothéquaire. Alors ne suppliciez pas vos anciens alliés. Une société démocratique se passe volontiers de sacrifices d’Ancien testament.
Une société qui paye ses gladiateurs du Cirque 1 million d’euro par mois, son César 20 000 euros, et ses précepteurs 2 000, a-t-elle bien le sens des hiérarchies ? « On n’y respecte rien, chacun y parle haut, Et c’est tout justement la cour du roi Pétaut. » (Acte I, scène I).
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