Par Hong Kong Fou-Fou
Aujourd'hui, la rédaction de Fury Magazine est calme : assis dans un coin, Wally Gator lit avec
application "Midi Olympique", le Petit Robert à portée de la main. Il faut dire qu'on lui a fait un sale coup : il a été désigné pour rédiger la prochaine chronique "Le livre du mois",
alors il cherche l'inspiration... De son côté, Goudurix range avec la méticulosité qui le caractérise sa collection d'images Chocolat Poulain (d'ailleurs, petit message personnel : il lui manque
celle de l'autruche, si quelqu'un veut faire un heureux...). Des flammes crépitent dans la cheminée Cubico. Sur la platine, les habituelles nouveautés pop, rock ou punk que nous nous faisons un devoir de chroniquer impartialement sont remplacées
par une paisible compilation de chants de Noël.
D'ordinaire, l'ambiance dans nos locaux est survoltée : les reporters entrent et sortent, dans un
froissement d'imperméable, l'un en partance pour une interview de Christian Barbier en Auvergne, un autre de retour d'un vernissage de Yébé à New-York ; les coursiers viennent livrer leur lot
quotidien de disques et bouquins, généralement accompagnés de luxueux cadeaux (que ne feraient pas les éditeurs pour que leurs produits figurent dans la Sélection musicale ou le Livre du
mois...). Les téléphones sonnent sans cesse, avec bien souvent Barbidule au bout du fil, qui appelle pour nous conseiller tel ou tel nouveau film, un western tchétchène, un road movie
sri-lankais... C'est un défilé incessant de stars de la télé, du cinéma, du sport ou du rock, qui essaient d'être photographiées chez nous pour gagner en crédibilité. Il y a aussi notre pipelette
de femme de ménage, nos avocats venus préparer nos nombreux procès en diffamation, des agents des Renseignements Généraux qui viennent poser des micros pour nous espionner et s'assurer que nous
ne fomentons pas une révolution culturelle, etc, etc... Et n'oublions pas nos dix-sept jeunes et charmantes stagiaires slaves. Elles ne font rien, mais ça fait joli dans les locaux. Elles
papotent toute la journée : "M. Gator est si musclé ! Dommage qu'il soit si petit !" (Ben oui, tu es gentille, Olga, mais déjà que tu mesures 1,78 m, tu te perches sur des talons hauts comme des
échasses), "Et M. Goudurix, toujours bon pied bon oeil, malgré son grand âge !" (C'est sûr, Ludmila, mais lui aussi a eu dix-huit ans), "Quant à M. Barbidule, il est tellement rigolo quand il
danse, c'est bête qu'il habite si loin !" (Eh oui, Anouchka, tout comme toi, il a quitté sa patrie, mais lui, ce n'est pas pour bosser au Pink Paradise). Tout ce brouhaha est en général couvert par les disputes puériles de Wally Gator et Goudurix, du genre "C'est mieux le
foot/Non, c'est mieux le rugby" ou encore "L'homme du Picardie, ça c'était de la série/Pfff, de la gnognotte par rapport à La petite maison dans la prairie".
Bref, aujourd'hui donc, c'est calme. Je profite de cette atmosphère pétrie de sérénité et, n'ayons pas peur
des mots, d'amour entre mes collaborateurs, pour te souhaiter, cher lecteur inconnu mais ô combien respecté, d'excellentes fêtes de fin d'année. Que le bonhomme barbu ventripotent (je ne parle
évidemment pas de Bud Spencer, encore moins de Demis Roussos) t'apporte tout ce que tu lui as demandé ! Joyeux Noël !