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Crise : Madoff

Publié le 15 janvier 2009 par Kak94
 L’affaire Madoff déstabilise les règles européennes
Les investisseurs français participent au grand jeu de piste ouvert par l’affaire Madoff. S’il est encore trop tôt pour mesurer l’ampleur du désastre et déterminer la chaîne de responsabilités dans cette faramineuse escroquerie, on sait d’ores et déjà que des fonds éthiques font partie des victimes. Les spécialistes du conseil aux actionnaires souhaitent mettre en cause, juridiquement, les banques distributrices des fonds européens concernés : HSBC et UBS.

Les fonds éthiques « Nouvelle Stratégie 50 » et « Investissement et Partage » de la société de gestion Meeschaert avaient en portefeuille, des parts du fonds de droit luxembourgeois Luxalpha, proposé par la banque suisse UBS. Ces actifs se sont évaporés quand l’affaire Madoff a éclaté, Luxalpha étant un des fonds utilisés par les investisseurs suisses, français ou luxembourgeois désireux d’acheter les placements qu’il proposait : « Nous avons investi dans un produit qui semblait offrir de nombreuses garanties » explique Marc Favard, responsable de la gestion de Meeschaert. «Nous nous sommes fiés au statut d’un fonds de droit luxembourgeois conforme aux normes européennes proposé par une maison comme UBS. La stratégie avait l’air simple, il n’y avait pas de domiciliation dans des paradis fiscaux dans lesquels nous nous interdisons d’investir.» La volonté initiale de Bernard Madoff de privilégier une clientèle de fondations aux Etats-Unis en particulier, a offert une respectabilité à ses produits qui ont convaincu d’autres institutions du même type. La société de gestion Meeschaert a perdu 0,4 % de ses actifs soit 5 millions d’euros ce qui est déjà beaucoup, mais l’affaire Madoff jette, indirectement, une ombre sur deux produits historiques de l’ISR auxquels contribue l’association « Ethique et Investissement ». Composée majoritairement de religieuses catholiques, elle est une des pionnières de l’évaluation des entreprises sur des critères extra-financiers en France. « Le travail de l'association porte sur la part actions du fonds Nouvelle Stratégie 50 qui est minoritaire », explique sa présidente Marie-Laure Payen. « Nous devons nous interroger sur la nécessité d’étendre la prise en compte de critères environnementaux, sociaux et de gouvernance à toutes les formes d’investissement qu’il s’agisse d’actions, d’obligations d’Etats ou d’autres fonds… Nous avons toujours confiance dans la société Meeschaert . Elle nous a expliqué avoir investi, pour diversifier le portefeuille, dans un produit qui semblait tout à fait conforme aux exigences européennes. C'est incroyable !» L’association qui laisse libre ses membres d’investir ou non dans Nouvelle Stratégie 50 n’a pas perdu directement de l’argent, mais ceux qui l’ont fait y ont laissé des plumes.

Recours contentieux

Seul moyen à la disposition des investisseurs pour tenter de retrouver l’argent perdu, entamer un contentieux en responsabilité auprès de ceux qui pourraient être en capacité de les rembourser. La société de gestion Meeschaert mène ce combat avec détermination contre UBS d’une part mais aussi la bourse de Luxembourg. Elle n’est pas seule, loin de la. Des actions collectives s’organisent un peu partout. En France, le cabinet Deminor est un des plus actifs. Il représente déjà près de 7 % des parts de Luxalpha et espère être bientôt en capacité de pouvoir provoquer une assemblée générale extraordinaire du fonds pour atteindre son distributeur UBS. « Il a une responsabilité colossale tout comme HSBC qui distribuait, sur le même principe, le fonds Théma en Europe » explique Fabrice Rémon, directeur général de Deminor France. « Ils ont utilisé deux trous noirs de la réglementation européenne, le Luxembourg pour le premier, l’Irlande pour la seconde. Ils n’ont pas fait leur travail qui consistait à vérifier la réalité des actifs que prétendaient détenir Madoff. La responsabilité des commissaires aux compte est, elle aussi, engagée ».  Pour l’instant les stratégies de défense des deux banques consistent à expliquer qu’elles ont rendu service à certains de leurs clients fortunés en mettant en place, sur leur demande, des fonds spécifiques destinés à faciliter leurs placements mais qui n’ont pas fait l’objet de marketing comme des produits maison et se sont vendues par le bouche à oreille. Pour le reste, elles ne font aucun commentaire sur d’éventuels procès en responsabilité. HSBC diffuse un communiqué laconique selon lequel son rôle dans cette affaire concerne des transactions faites pour quelques clients investisseurs institutionnels d’un montant d’1 milliards de dollars et que « ce type d’arrangements commerciaux ne semble pas de nature à exposer le groupe à une quelconque responsabilité ». UBS privilégie le silence et  le fonds Luxalpha est même totalement absent du site officiel de la banque.

500 millions d’euros de pertes pour les investisseurs français

Pourtant il va falloir livrer bataille. Les mises en cause viennent non seulement de cabinets comme Deminor mais aussi de la place financière luxembourgeoise sur laquelle était coté le fonds Luxalpha. Pour se défendre des accusations de laxisme déjà lancées, elle a publié, et c’est rare, un communiqué le 2 janvier précisant que « la législation luxembourgeoise offre un cadre approprié pour assurer une protection adéquate et conforme aux normes européennes des actifs d’un fonds d’investissement » et que c’est bien la banque dépositaire d’un fonds qui a la responsabilité des actifs censés y figurer. Cela ne suffira vraisemblablement pas à démobiliser ceux qui demandent un renforcement des régulations. Devenue méfiante, la société de gestion Meeschaert a décidé de cesser d’investir pour l’instant dans tous les fonds de droit luxembourgeois ! Elle participe aux diverses actions collectives y compris la réunion, organisée début janvier par l’AFG, l’association professionnelle des sociétés de gestion, pour tenter de coordonner les actions de ces investisseurs qui sont encore loin d’avoir opté pour une stratégie commune.
En attendant le déclenchement des hostilités juridiques, l’Autorité des Marchés Financiers continue à estimer à 500 millions d’euros et une centaine de fonds l’étendue des dégâts financiers que l’affaire Madoff a entrainé pour des investisseurs français. 8 % seulement seraient des particuliers, 26 % des investisseurs institutionnels et plus de 60% des personnes disposant d’une fortune importante.
Pour ces divers protagonistes, l’affaire Madoff qui a éclaté il y a un mois, ne fait que commencer. Tous insistent sur le fait qu’ils découvrent chaque jour de nouveaux éléments susceptibles d’ébranler un peu plus la confiance, déjà très fragile, dans les institutions financières.

A.C. Husson-Traoré
Mis en ligne le : 14/01/2009
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source : http://www.novethic.fr/novethic/finance/fonds/l_affaire_madoff_destabilise_regles_europeennes.jsp?id=&newsletter=ok&cat=article_entreprise

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