25 DECEMBRE DE L’AN VI AVANT L’ERE CHRETIENNE
Neuf mois ont passé. Le Verbe de Dieu entre dans ce monde : « il voit le jour », comme le dit le
langage commun… au milieu de la nuit…dans les ténèbres de la nuit. Lisons le récit de la naissance du Verbe de Dieu, tel que nous le raconte Saint Luc (chapitre 2°, verset
1-7) :
1.
Or, il advint, en ces jours-là, que parut un édit de César Auguste, ordonnant
le recensement de tout le monde habité.
2.
Ce recensement, le premier, eut lieu pendant que Quirinius était gouverneur de
Syrie.
3.
Et tous allaient se faire recenser, chacun dans sa ville.
4.
Joseph aussi monta de Galilée, de la ville de Nazareth, en Judée, à la ville
de David, qui s'appelle Bethléem - parce qu'il était de la maison et de la lignée de David -
5.
afin de se faire recenser avec Marie, sa fiancée, qui était
enceinte.
6.
Or il advint, comme ils étaient là, que les jours furent accomplis où elle
devait enfanter.
7.
Elle enfanta son fils premier-né, l'enveloppa de langes et le coucha dans
une crèche, parce qu'ils manquaient de place dans la salle.
UN CRI… au milieu de la nuit…
Un cri se fait entendre, le vagissement d’un enfant qui vient de naître, comme tant d’autres au même
moment.
Et pourtant ce cri est différent :pour la première fois dans l’histoire du monde, Dieu fait entendre sa
Voix de manière humaine. A minuit, pour accomplir ce qui avait été annoncé dans le Livre de la Sagesse (chapitre 18, versets 14-15a)
14.
Alors qu'un silence paisible enveloppait toutes choses et que la nuit
parvenait au milieu de sa course rapide,
15.
du haut des cieux, ta Parole toute-puissante s'élança du trône
royal…
DANS UNE CRECHE… dans les ténèbres de la nuit…
Dans une crèche, dans une grotte ? Voyons pour l’instant la mention de la crèche. Nous verrons par la suite,
si cette crèche est aussi une grotte, si l’Enfant-Dieu est né dans une crèche-grotte. Saint Luc dans son récit de la naissance de Jésus, indique sans plus de précision que l’enfant avait été
placé dans une « crèche ». La « crèche » est le signe indiqué par l’Ange aux Pasteurs, par lequel ils reconnaîtront le Sauveur :
8.
Il y avait dans la même région des bergers qui vivaient aux champs et
qui, la nuit, veillaient tour à tour à la garde de leur troupeau.
9.
L'Ange du Seigneur se tint près d'eux et la gloire du Seigneur les
enveloppa de sa clarté ; et ils furent saisis d'une grande crainte.
10.
Mais l'ange leur dit : « Soyez sans crainte, car voici que je vous annonce une
grande joie, qui sera celle de tout le peuple :
11.
Aujourd'hui vous est né un Sauveur, qui est le Christ Seigneur, dans la ville
de David.
12.
Et ceci vous servira de signe : vous trouverez un nouveau-né enveloppé de
langes et couché dans une crèche. »
13.
Et soudain se joignit à l'ange une troupe nombreuse de l'armée céleste, qui
louait Dieu, en disant :
14.
« Gloire à Dieu au plus haut des cieux et sur la terre paix aux hommes objets
de sa complaisance ! »
15.
Et il advint, quand les anges les eurent quittés pour le ciel, que les bergers
se dirent entre eux : « Allons jusqu'à Bethléem et voyons ce qui est arrivé et que le Seigneur nous a fait connaître. »
16.
Ils vinrent donc en hâte et trouvèrent Marie, Joseph et le nouveau-né couché
dans la crèche.
A ce signe, ils ont reconnu ce que l’Ange leur avait annoncé, et ils firent connaître la bonne nouvelle à tous
ceux qu’ils rencontraient : Luc chapitre 2, versets 17-18
17.
Ayant vu, ils firent connaître ce qui leur avait été dit de cet enfant
;
18.
et tous ceux qui les entendirent furent étonnés de ce que leur disaient les
bergers.
Dans le récit de Saint Luc, aucun détail n’est laissé au hasard ; tout est dit pour ceux qui ont des yeux
pour voir et des oreilles pour entendre. La naissance du Sauveur a été annoncée à des bergers, à des pasteurs, qui veillaient dans la nuit, pour garder leurs
troupeaux. Ce sont de bons pasteurs, et non pas des mercenaires. Ils se relaient à tout de rôle pour veiller, et pas seulement garder, leur troupeau. Ils sont les premiers à connaître cette Bonne
Nouvelle « destinée à tout le peuple », et, au-delà d’eux, à toutes les nations comme il avait été déclaré au Patriarche Abraham : « en toi seront bénies toutes les
nations » (Genèse 12, 3b).
« Dans la nuit » : cette mention, cette
« coïncidence » comme on dirait dans un langage humain, est riche de signification, à la lumière des paroles de l’Ancien Testament. En effet, le prophète Isaïe écrit (chapitre 9, verset
1) :
1 Le
peuple qui marchait dans les ténèbres a vu une grande lumière, sur les habitants du sombre pays, une lumière a resplendi.
Saint Mathieu, citant ce texte d’Isaïe, écrit : « Le peuple qui se trouvait dans les ténèbres a
vu une grande lumière ; sur ceux qui habitaient les obscurs parages de la mort, une lumière s’est levée » (Mathieu 4, 16), où le lien est mis entre « les
ténèbres », le « sombre pays », et « la mort ». Marcher dans les ténèbres prend alors un sens bien précis : c’est vivre à l’ombre de la mort, c’est être sous la
domination de la mort, c’est être condamné à la mort, non pas physique, mais spirituelle, en étant séparé de Dieu. Le prophète Isaïe explique la raison de cette lumière, et qui est cette grande
lumière (Isaïe, 9, 5a) :
5 Car un
enfant nous est né, un fils nous a été donné,
Et c’est pourquoi, à l’annonce de la naissance de cet enfant, les bergers reçoivent la visite d’un Ange et sont
enveloppés dans la clarté de la gloire du Seigneur (Luc 2,9a) :
9.
L'Ange du Seigneur leur apparut et la gloire du Seigneur les enveloppa de
sa clarté....
Zacharie, le Père de Jean Baptiste l’avait bien compris quand, évoquant la mission de son fils qui vient de
naître, qui sera prophète du Très-Haut, et précèdera le Seigneur pour préparer ses voies, il parle de «la visite du Soleil Levant », venant d’en-haut, (cf. Luc 1, 76-79)
79.
pour illuminer ceux qui demeurent dans les ténèbres et l'ombre de la
mort, afin de guider nos pas dans le chemin de la paix.
Tout au long de son ministère, Jésus ne cessera de guérir les malades, les infirmes, ceux qui étaient possédés
d’un esprit impur. Par ses actes et ses paroles, on voit Jésus se révéler comme Lumière du monde. Les guérisons d’aveugles ont sur ce point une signification particulière, comme le
souligne saint Jean, en rapportant l’épisode de l’aveugle-né (Jean, chapitre 9). Jésus déclare alors : « Je suis la lumière du monde (Jean 9, 5). Ailleurs, il déclare :
« Celui qui me suit, ne marche pas dans les ténèbres, mais il aura la lumière de la vie » (Jean 8, 12). Et encore : « Moi, la Lumière, je suis venu dans le monde pour que
quiconque croit en moi ne marche pas dans les ténèbres » (Jean 12, 46). Le Prologue de l’Evangile de Saint Jean, nous présente en effet Le Verbe comme Lumière des hommes, (Jean,
1) :
1.
Au commencement était le Verbe et le Verbe était avec Dieu et le Verbe était
Dieu.
2.
Il était au commencement avec Dieu.
3.
Tout fut par lui, et sans lui rien ne fut.
4.
De tout être il était la vie, et la vie était la lumière des
hommes.
5.
et la lumière luit dans les ténèbres…
6.
Il y eut un homme envoyé de Dieu ; son nom était Jean.
7.
Il vint pour témoigner, pour rendre témoignage à la lumière, afin que tous
crussent par lui.
8.
Il n'était pas la lumière, mais le témoin de la lumière.
9.
Le Verbe était la lumière véritable,
qui éclaire tout homme ; il venait dans le monde.
10.
Il était dans le monde, et le monde fut par lui, et le monde ne l'a pas
reconnu.
Et « le Verbe s’est fait chair » (Jean 1. 14), nous avons vu sa gloire , et la Lumière a habité
parmi nous (cf Jean 1,). C’est Dieu avec nous, « l’Emmanuel », comme l’avait annoncé le prophète Isaïe (Isaïe 7, 14), « nom qui se traduit »
précise saint Mathieu (1, 23).
« Les bergers »
Le choix des bergers n’est pas non plus le fruit du hasard, mais un choix significatif de Dieu, qui révèle
de la Mission de l’Enfant-Dieu qui vient de naître. David, le dernier fils de Jessé, est choisi par Dieu, par l’intermédiaire du prophète Samuel, pour être Roi d’Israël, après la destitution de
Saul. Le prophète Nathan avait été envoyé par Dieu pour choisir un Roi parmi les fils de Jessé. Les sept fils passent ainsi devant le prophète Samuel, sans qu’aucun ait été choisi par Dieu.
Nathan dit à Jessé :
« En est-ce fini avec tes garçons ? et celui-ci répondit : ‘Il reste encore le plus jeune, il
est à garder le troupeau »(1 Samuel, 16, 11a).
Et quand David sera Roi, et formera le projet de construire une Maison, un Temple à Dieu pour y abriter l’Arche
d’Alliance, le prophète Nathan lui annonce que c’est Dieu qui lui construira une maison, une royauté qui subsisteront à jamais devant Dieu, et le trône de David sera affermi à jamais (cf. 2
Samuel 7, passim). Et Dieu lui dit de manière solennelle :
« C’est Moi qui t’ai pris au pâturage, derrière les brebis, pour être le chef de mon peuple
Israël » (2 Samuel, 7, 8b).
Le berger qui devient Roi, le chef du Peuple de
Dieu, dont la Royauté durera à jamais, le Père du Messie qui portera son nom : « Fils de David ».
Plus tard, au temps de l’exil à Babylone, Dieu
choisit Ezéchiel pour prophétiser contre les pasteurs d’Israël : « Malheur aux pasteurs d’Israël qui se paissent eux-mêmes. Les bergers ne doivent-ils pas paître le
troupeau ? » (Ezéchiel 34, 1b). Et Dieu annonce que c’est Lui, en personne qui aura soin de son troupeau, en des termes significatifs et annonciateurs, qui résonneront dans la
prédication de Jésus (Ezéchiel, chapitre 34, 11-12, 15-16) :
11.
Car ainsi parle le Seigneur Yahvé : Voici que j'aurai soin moi-même de mon
troupeau et je m'en occuperai.
12.
Comme un pasteur s'occupe de son troupeau, quand il est au milieu de ses
brebis éparpillées, je m'occuperai de mes brebis.
15.
C'est moi qui ferai paître mes brebis et c'est moi qui les ferai reposer,
oracle du Seigneur Yahvé.
16.
Je chercherai celle qui est perdue,
je ramènerai celle qui est égarée, je panserai celle qui est blessée, je fortifierai celle qui est malade. Celle qui est grasse et bien portante, je veillerai sur elle. Je
les ferai paître avec justice.
C’est Lui qui fera paître ses brebis, en mettant à leur tête son serviteur David, qui sera pour elles un
pasteur : son serviteur David ? Ezéchiel écrit 500 ans après le règne de David : le Fils de David n’est donc personne d’autre que le « Fils de David », le Messie, Jésus,
le Christ :
23.
Je susciterai pour le mettre à leur tête un pasteur qui les fera paître,
mon serviteur David : c'est lui qui les fera paître et sera pour eux un pasteur.
24.
Moi, Yahvé, je serai pour eux un Dieu, et mon serviteur David sera prince au
milieu d'eux. Moi, Yahvé, j'ai parlé.
La réalité dépasse l’espérance,
l’annonce : le prince David annoncé pour être au milieu d’elles, et celui qui sera pour elles un Dieu, est la même personne : Jésus, vrai Dieu et vrai homme, le Verbe de Dieu qui
s’est fait chair…
C’est toute la prédication de Jésus, le Bon
Pasteur : la parabole de la brebis perdue tout d’abord, en saint Luc (avec le parallèle en saint Mathieu, moins précis et qui ne reprend pas certaines précisions données par Ezéchiel), et
surtout les affirmations de Jésus, le Bon Pasteur, en Saint Jean.
Luc chapitre 15 :
1.
Cependant tous les publicains et les pécheurs s'approchaient de lui pour
l'entendre.
2.
Et les Pharisiens et les scribes de murmurer : « Cet homme, disaient-ils, fait
bon accueil aux pécheurs et mange avec eux ! »
3.
Il leur dit alors cette parabole :
4.
« Lequel d'entre vous, s'il a cent brebis et vient à en perdre une,
n'abandonne les quatre-vingt-dix-neuf autres dans le désert pour s'en aller après celle qui est perdue, jusqu'à ce qu'il l'ait retrouvée ?
5.
Et, quand il l'a retrouvée, il la met, tout joyeux, sur ses
épaules
6.
et, de retour chez lui, il assemble amis et voisins et leur dit :
«Réjouissez-vous avec moi, car je l'ai retrouvée, ma brebis qui était perdue ! »
7.
C'est ainsi, je vous le dis, qu'il y aura plus de joie dans le ciel pour un
seul pécheur qui se repent que pour quatre-vingt-dix-neuf justes, qui n'ont pas besoin de repentir.
Cf. Mathieu chapitre 18 :
12.
« A votre avis, si un homme possède cent brebis et qu'une d'elles vienne à
s'égarer, ne va-t-il pas laisser les quatre-vingt-dix-neuf autres sur les montagnes pour s'en aller à la recherche de l'égarée ?
13.
Et s'il parvient à la retrouver, en vérité je vous le dis, il tire plus de
joie d'elle que des quatre-vingt-dix-neuf qui ne se sont pas égarées.
« Je suis le Bon pasteur »
Ce n’est plus une parabole qui reprend le
massage d’Ezéchiel : Jésus se présente comme étant LE Bon Pasteur, mais aussi LA PORTE par laquelle les brebis entrent dans la bergerie, dans la Maison du Père :
Jean chapitre 10
1.
« En vérité, en vérité, je vous le dis, celui qui n'entre pas par la porte
dans l'enclos des brebis, mais en fait l'escalade par une autre voie, celui-là est un voleur et un brigand ;
2.
celui qui entre par la porte est le pasteur des
brebis.
3.
Le portier lui ouvre et les brebis écoutent sa voix, et ses brebis à lui, il
les appelle une à une et il les mène dehors.
4.
Quand il a fait sortir toutes celles qui sont à lui, il marche devant elles et
les brebis le suivent, parce qu'elles connaissent sa voix.
5.
Elles ne suivront pas un étranger ; elles le fuiront au contraire, parce
qu'elles ne connaissent pas la voix des étrangers. »
6.
Jésus leur tint ce discours mystérieux, mais eux ne comprirent pas ce dont il
leur parlait.
7.
Alors Jésus dit à nouveau : « En vérité, en vérité, je vous le dis, je suis
la porte des brebis.
8.
Tous ceux qui sont venus avant moi sont des voleurs et des brigands ; mais les
brebis ne les ont pas écoutés.
9.
Je suis la porte. Si quelqu'un entre
par moi, il sera sauvé ; il entrera et sortira, et trouvera un pâturage.
10.
Le voleur ne vient que pour voler, égorger et faire périr. Moi, je suis venu
pour que les brebis aient la vie, et qu’elles l’aient en abondance.
11.
Je suis le bon pasteur ; le bon pasteur donne sa vie pour ses
brebis.
12.
Le mercenaire, qui n'est pas le pasteur et à qui n'appartiennent pas les
brebis, voit-il venir le loup, il laisse les brebis et s'enfuit, et le loup s'en empare et les disperse.
13.
C'est qu'il est mercenaire et ne se soucie pas des
brebis.
14.
Je suis le bon pasteur ; je connais
mes brebis et mes brebis me connaissent,
15.
comme le Père me connaît et que je connais le Père, et je donne ma vie pour
mes brebis.
Jésus est ainsi non seulement le Bon Pasteur, mais aussi la Porte par laquelle entrent les
brebis : Dieu et homme, il guide les brebis et c’est par Lui, par sa vie qu’il donne pour elles, qu’il leur permet d’entrer dans la Maison du Père.
Mgr Jacques MASSON