Dynastie guerrière
Pour comprendre la pression qui pesait sur les épaules d'EA Los Angeles qui a hérité de la licence Alerte Rouge, utilisons cette fameuse machine à remonter dans le temps et reprenons l'histoire de cette série à ses débuts. Au départ était Command & Conquer, développé par Westwood et connu pour avoir posé les bases du jeu de stratégie en temps réel sur PC. Un an après la sortie (et le succès) du premier C&C, Westwood annonce le premier volet d'Alerte Rouge, qui sortira en 1996 sur PC et Playstation. Se déroulant dans une réalité alternative très emprunte d'humour et de second degré, Alerte Rouge a un grand succès auprès du public qui lui vaudra trois extensions et une suite qui sortira en 2000 tandis que Command & Conquer continue son développement en parallèle.
Bien qu'étant un dérivé du Command & Conquer original, Alerte Rouge devient une série à part entière avec un scénario différent. Ainsi, la série Command & Conquer décrit les affrontements de deux groupements internationaux appelés le GDI et le NOD, tandis qu'Alerte Rouge oppose les Alliés aux Soviets. Cette mise en place dans un univers plus proche du réel aura vraisemblablement été l'une des raisons du succès de la série, comme en démontre la troisième série Command & Conquer lancée par Electronic Arts et baptisée Generals qui oppose les Etats-Unis à la Chine dans un conflit une fois encore marqué de réalisme fantastique.
Uchronie déjantée
Command & Conquer en général, et Alerte Rouge en particulier, constituent donc une licence très importante aux yeux de nombreux fans. Le premier opus (que vous pouvez d'ailleurs télécharger gratuitement ici) décrit une réalité alternative dans laquelle l'URSS aurait développé une machine à voyager dans le temps et s'en serait servit pour aller assassiner Einstein avant qu'il ne finisse le développement de la bombe atomique. Une fois la seconde guerre mondiale terminée et l'Allemagne Nazie éliminée, un nouvel équilibre militaire s'établit donc et voit l'affrontement armé des Alliés avec l'URSS. Alerte Rouge 2, pour sa part, reprend là où le premier s'était arrêté et trouve une excuse pour relancer le conflit opposant les deux factions.
Alerte Rouge 3 aurait donc très bien pu prendre la suite, mais les développeurs d'EA Los Angeles ont ici pris un premier risque en revenant aux bases de la licence. Ainsi, les russes ont bel et bien construit leur machine à voyager dans le temps pour assassiner Einstein, mais l'absence de bombe atomique a eu pour résultat d'éviter l'écrasement dont le Japon a fait les frais lors de la Seconde Guerre Mondiale, privilégiant l'émergence d'une troisième puissance militaire : l'Empire du Soleil Levant, qui fera face aux Alliés et aux Soviets dans ce troisième Alerte Rouge toujours plus déjanté et stratégique.
Le jeu reprend les bases et les agrémente donc d'une nouvelle faction, mais n'oublie pas pour autant la recette qui a fait le succès de la série. Ainsi, nous voyons le retour des briefing de mission filmée avec de véritables acteurs qui nous emportent dans un scénario minimaliste mais tout de même très présent. Le casting de ces inter-missions est d'ailleurs impressionnant, et on y retrouver des stars du cinéma comme de la télévision telles que George Takei (Heroes), Ivana Milicevic (Casino Royale), Jonathan Pryce (Pirates des Caraïbes), Tim Curry (Scary Movie 2), David Hasselhoff (Alerte à Malibu) et bien d'autres. Ces inter-mission donnent un véritable ton à un scénario plein d'humour et finalement peu sérieux comparé aux jeux de stratégie habituels, et l'agrémentent même d'un côté très sexy étant donné les habits peu règlementaires des différentes demoiselles vous donnant vos consignes avant chaque bataille. Le tout donne un résultat très réussit, et on salut l'initiative d'EA LA pour ce retour aux vidéos, un investissement de poids qui aura payé auprès des fans.
Gameplay historique ou archaïque ?
Mais le retour aux sources ne s'effectue pas uniquement au niveau de ces interludes vidéo, et le gameplay utilisé par Alerte Rouge 3 est tout ce qu'il y a de plus classique. Utilisant une vue en 3D isométrique, le jeu se contrôle à la souris (ou au pad sur consoles) et au clavier de la même manière que les premiers opus il y a dix ans. Sélectionnez vos unités et envoyez les au combat d'un clic, formez vos groupes et coordonnez vos attaques pour plus d'efficacité. Afin d'accéder aux meilleures unités il vous faudra construire, défendre votre base et récolter de l'argent grâce à des raffineries situées dans des endroits définis de la carte. Ne cherchez pas de nouveauté à ce niveau là, ni même de véritable diversité dans les trois factions qui, bien que bénéficiant d'unités différentes, se jouent finalement à peu près de la même manière au fil des 30 missions que constituent la partie solo du jeu (10 par faction) tout comme en multijoueurs .
Les Alliés basent leurs attaques sur la discrétion, la furtivité et la possibilité de téléporter des unités en tout point de la carte. On notera le subtil ajout des Espions qui peuvent soudoyer les unités adverses ou encore se déguiser en elles, tout comme le tank Mirage et son accent français à couper au couteau. Les Soviets sont assez similaires et s'appuient sur la puissance brute de leurs unités, tandis que l'Empire du Soleil Levant se base sur les avancées technologiques et la présence d'unité polyvalentes, pouvant être tour à tour terrestres ou aériennes par exemple. Chaque faction dispose de super-armes extrêmement destructrices et d'un commando, les célèbres Tania, Natasha et Yuriko disposant d'une grande résistance et d'une force de frappe inouïe.
Au chapitre des innovations, l'ajout des combats maritimes sera également remarqué. Ainsi, au sol et à l'air, vous devrez maintenant faire attention aux plages et aux attaques par l'eau. Cet ajout rajoute une troisième dimension intéressante au jeu, avec grand nombre d'unités amphibies et de navires ajoutés à votre arsenal. On notera également l'ajout de capacités qui se débloquent au fur et à mesure que vous éliminez des unités ennemies et qui vous permettront d'appeler un bombardement aérien sur une zone précise ou encore d'améliorer vos unités en leur offrant des capacités spéciales.
Mais l'innovation majeure de ce nouvel Alerte Rouge est finalement la campagne jouable en mode coopératif. En effet, ayant remarqué que les joueurs en ligne avaient tendance à privilégier les parties en équipe, les développeurs ont décidé de rendre toutes les missions de la campagnes jouables en mode coopératif. Vous pouvez ainsi chercher un commandeur pour vous épauler sur Internet ou en Lan (pas d'écran splité sur console), mais si vous préférez jouer seul, votre co-commandeur sera contrôlé par une intelligence artificielle qui vous épaulera de son mieux sans toutefois être vraiment à la hauteur.
Mécanique de la destruction
Techniquement, le jeu est joli sans être magnifique. Les paysages, souvent urbains, sont bien réalisés et si les unités manquent de finition, on le remarque assez peu lorsqu'on les envoie au combat. Un véritable travail graphique a été réalisé sur l'eau, et les vagues sont vraiment magnifiques pour un jeu de ce genre et on peut observer avec délectation les fonds marins ou encore la fluide nage des dauphins (unités de guerre des Alliés) entre les embruns.
Alerte Rouge 3 tournera sur un ordinateur moyen mais risque de souffrir de quelques ralentissements lors des plus grosses explosions, elles aussi magnifiques mais demandent plus de ressources. Ces problèmes sont toutefois très rares et ne semblent pas avoir été signalés sur Xbox 360, et encore moins sur la prochaine version Playstation 3.
Impossible de parler d'Alerte Rouge sans noter enfin le soin accordé à la bande son. Celle-ci est de toute beauté et se marie à merveille avec la violence des combats. Guitare saturée, musique traditionnelle russe remaniée ambiance métal ou encore techno survoltée lors des plus grandes bataille, voici enfin un jeu de stratégie qui se doit d'être joué avec la musique à fond.
Trois versions et une extension
Bien que traditionnellement dédié aux joueurs PC, le jeu de stratégie s'étend et se dévoile aux consoleux avec plaisir lorsque la puissance d'une licence est suffisante. Alerte Rouge 3 fait partie de ces jeux qui se démocratisent, et bien que je ne peux que vous conseiller d'y jouer sur ordinateur car un pad ne remplacera jamais une souris, deux versions du jeu sont actuellement disponibles et une troisième est en préparation. Ainsi, aux versions PC et Xbox360 s'ajoutera bientôt une version Playstation 3 prévue pour mars prochain et disposant de tout un lot de nouveau contenu dont de nouvelles cartes multijoueurs, des vidéos et making-off du jeu, la bande son complète ou encore la fameuse vidéo intitulée "Les filles d'Alerte Rouge 3" et dédiée au casting de charme du jeu.
Le jeu étant sorti il y a quelques mois maintenant, une première extension a également été annoncée. Baptisée Uprising (en français : "La Révolte"), cette extension ne demandera pas de posséder la première version du jeu pour fonctionner et ajoutera une mini-campagne solo pour chaque faction, le tout se déroulant peu de temps après les évènements du jeu original. A noter toutefois que cette extension est pour l'instant annoncée comme exclusivité PC, toutefois il n'est pas interdit de penser qu'elle sera téléchargeable en petits morceaux payants sur le Xbox Live ou le Playstation Network.
Conclusion camarade ?
En conclusion, Alerte Rouge 3 est très loin de révolutionner le genre stratégie en temps réel, mais prend le partie de revenir aux bases afin de ne pas décevoir les fans de la série. Doté d'un gameplay très classique et d'un contenu qui vous tiendra en haleine une quinzaine d'heures en solo et beaucoup plus en multijoueurs. Il bénéficie d'une réalisation léchée qui vous donnera l'impression de vous trouver au milieu d'un film de guerre grâce aux inter-missions vidéo. L'ajout du mode coopératif est la seule véritable prise de risque du jeu et ne sera finalement utilisée que par une minorité de joueurs. Honnête graphiquement et sans apport de nouveauté, Alerte Rouge 3 est finalement un classique remis au goût du jour par un petit lifting bien agréable qui contentera les fans de la série tout en permettant aux non-initiés de découvrir le genre avant de se lancer dans de plus grandes aventures. Et puis, c'est recommandé par David Hasselhoff, alors comment refuser ?