Pouf, pouf, on recommence, mais pour de vrai, ce coup-ci. Mercredi dernier, donc, j'ai assisté à la 1ère dégustation de l'année du Quinté Sens Club de Bordeaux. Celle-ci s'est faite en fanfare au Château Rochebelle, propriété de la famille d'Emilie, l'une des Gentilles Membres du Club.
Nous avions à notre disposition la salle de réception du château, ce qui nous a permis d'accueillir plus de membres que d'habitude (les conjoints pour ceux qui en ont, ou des amis). Nous étions donc une trentaine de personnes. Vous comprenez bien qu'en pareil cas, le magnum s'impose si tout le monde veut avoir une ch'tite goutte.
Nous avons démarré avec un Dom Pérignon 98, qui a accompagné avec élégance le jambon Bellota qui trônait sur la table centrale. Certainement à ce jour le meilleur Dom Pé que j'ai bu (mais j'ai entendu dire que la magnum convenait bien au champagne...) : nez sur des notes de fumée et de fruits secs grillés. La bouche est à la fois vive et élancée, mais aussi ronde, aux bulles chatoyantes. Le tout est d'une grande intensité aromatique, avec une finale à l'avenant, se concluant sur une noble amertume.
Nous avons continué sur un Kastelberg 2005 de Marc Kreydenweiss. Un domaine cher à mon coeur, puisque j'y ai travaillé il y douze ans (le temps passe...). Le nez est généreux, sur le miel, les agrumes confits et les épices. La bouche est ample, riche, avec du gras, tout en gardant néanmoins de la fraîcheur. La fin s'avère un peu chaude tout de même. La maturité me semble un peu excessive sur ce millésime qui frôle la vendange tardive. Regoûté deux heures plus tard, l'équilibre me semblait mieux assuré. La chaleur finale avait disparu comme par magie (alors que le vin avait paradoxalement une température plus élevée...). En tout cas, ce riesling ne se mariait guère au saumon fumé, et je me suis donc rabattu de nouveau sur le bellota...
Suit une rareté. Déjà le Clos Vougeot blanc, c'est rare. Mais le Clos Vougeot blanc en magnum encore plus. Le millésime 2005 offre un nez assez incroyable sur des notes de fruits confits, de pâte d'amande, de miel. La bouche est ronde, avenante, avec de la fraîcheur ... jusqu'en début de finale, où alors une certaine chaleur ressort, avec des arômes d'élevage qui dominent. Là encore, en fin de soirée, l'aération aidant, ce petit défaut disparaîtra, et le vin aura un équilibre nettement plus intéressant.
J'ai tenté un mariage avec le grenier médocain : correct, sans plus. Alors qu'avec le bellota Aïe Aïe Aïe!
Nous passons aux rouges, avec un Château Bel Air 1995. Nous parlons ici d'un Haut Médoc, et non du Saint Emilion. Si j'aime plutôt bien le nez, très "early matured" souligné par le terreau humide et les épices, la bouche souple au départ, sécharde ensuite, me convainct moins... Et ça ne s'arrange pas du tout en finale... Next.
Nous passons ensuite au Château Rochebelle 2001 (oublié de photographier, la honte...). Le nez est très beau, sur la mûre et les épices grillés. La bouche est ronde, douce, aux tannins veloutés. La finale est croquante et goûteuse. Une belle découverte!
Malheureusement dans la vie, il y a toujours un plus fort. Ce soir, c'est lui : Trotanoy 2001. Le nez est plus incisif que le précédent même si la gamme aromatique est proche. L'on peut pressentir que la bouche aura plus de relief. C'est le cas. Elle réussit l'exploit d'être à la fois plus moelleuse, mais aussi plus tendue que celle du Rochebelle, et ce jusqu'à la finale, d'une grande générosité. Loin d'être le plus beau vin de mon existence, mais sans doute possible le meilleur de la soirée!
Nous allons maintenant au pays du Bellota, avec un vin espagnol : Regina Vides 1999 (Ribera del Duero). Passer après le Trotanoy n'est pas chose facile. Tout paraît un peu too much dans ce vin. Nez très épicés, fruits compotés, caramélisés, même. La bouche, puissante, me paraît dissociée, avec des tannins qui ressortent beaucoup trop. Si l'on rajoute une fin trop astringente, vous aurez compris que ce n'est pas le bonheur... Ceci dit, c'est un avis très personnel. D'autres semblent l'avoir apprécié.
On change carrément d'hémisphère avec l'Oracle 2003 de Kilikanoon. Le nez est charmeur, sur la crème de fruits noirs et les épices chaudes (cannelle, entre autres). La bouche est pulpeuse, bourrée de fruit, mais très vite, une amertume réglissée - provenant de l'élevage - surgit et envahit progressivement l'ensemble du palais. Et là, patatras, le plaisir s'évanouit, d'autant que la finale s'avère doucereuse. Trop, c'est trop.
Nous finissons avec un sauternes, Château Haut Grillon 2005 : nez sur l'encaustique et l'abricot confit. Bouche ronde, fraîche, sympa, mais manquant de gras et d'intensité (à mon goût), mais aussi de longueur. Décidément, je n'accroche pas avec ce domaine (pourtant appartenant à la famille d'un ami : ça ne fait pas tout...)
Une soirée mitigée côté vin, donc, mais très sympa au niveau humain. Elle m'a donné l'occasion de rencontrer des personnes que je ne connaissais alors que virtuellement. De revoir un ami qui voyage beaucoup et ne se pose pas souvent près de chez moi. D'avoir des discussions passionnantes. Et de me gaver de Bellota (mais j'ai pas tout mangé : il en restait encore PLEIN!!!).