Euro-Méditerranée : Coup de froid sur les libertés au Maroc

DECRYPTAGE RELATIO: Coup de froid  pour les libertés au Maroc. Et coup de massue pour tous les militants des droits de l’Homme qui voyaient dans le Royaume de Mohammed VI un levier pour l’épanouissement des valeurs démocratiques dans un Maghreb qui ne pourra s’intégrer dans un « espace euro méditerranéen » sans de gros progrès en la matière…

La condamnation d’un journaliste  de l'hebdomadaire marocain « Al Watan » à 8 mois de prison ferme et de son directeur à  6 mois avec sursis pour publication de "documents confidentiels" concernant la lutte antiterroriste pose des questions graves et importantes. D’autant plus que l’offensive policière et judiciaire contre la presse marocaine de s’arrête pas là : le 24 août doit commencer le procès d'Ahmed Benchemsi, directeur de deux magazines saisis , sous l'accusation de "manquement au respect dû à la personne du roi".

C’est la première fois depuis 2003 qu'un journaliste est condamné à la prison ferme au Maroc. En juin 2003, la cour d'appel de Rabat avait infligé trois ans de prison au journaliste Ali L'mrabet, directeur de deux hebdomadaires pour "outrage au roi".

Pour RSF, les ONG spécialisées dans les droits de l’homme et les syndicats de journalistes, ces condamnations sont « inacceptables ». Nombre  de journalistes marocains et de démocrates craignent que ces poursuites judiciaires marquent un retour aux années noires. Les autorités affirment le contraire et soulignent le fait que la liberté d’expression comporte aussi un devoir de responsabilité.

Trois interprétations peuvent être avancées. La première : dans la perspective des prochaines élections, le  pouvoir veut faire preuve de fermeté pour lutter contre les partis (islamistes notamment) qui l’accusent de laxisme. La deuxième :la politique d’ouverture du Roi n’est pas appréciée par tous les notables du Royaume, notamment chez les plus conservateurs qui n’apprécient guère la liberté de ton de la presse y compris dans le choix des sujets (Tel Quel a fait ses avant dernières couvertures sur la « virginité » et sur « la chirurgie sexuelle » et la dernièr sur "ces Marocains qui meurent de froid", par exemple…). La troisième est celle qu’avancent ceux qui, avec bon sens, estiment que dans le processus actuel de modernisation et de démocratisation , des « couacs » de ce genre sont inévitables(même s’ils sont regrettables)

Une certitude : l’image du Roi (qui vient de faire pourtant un discours du Trône plutôt inspiré par un réformisme et un progressisme incontestables) est écornée par ces sales affaires. Il est vrai que la liberté de la presse dans le Royaume n’a jamais concerné quelques sujets tabous : le Sahara, la personne du Roi et la sécurité nationale.