Nous le croisons parfois, mais il s'échappe vite ;
Certains le fuient, d'autres le cherchent désespérément...
Mais comment en parler alors qu'il semble avoir disparu dès qu'on a conscience de l'atteindre ?
Jean-Philippe Arrou-Vignod s'est attelé à l'ouvrage, et il a su donner forme à sa réflexion sur le sujet avec brio, intelligence, sensibilité et simplicité.
De tout petits textes rassemblés dans un livre de 83 pages nous présentent les contours intimes de l'idée que l'auteur se fait du bonheur.
"Le bonheur ne se provoque pas. Il se rencontre tout au plus. Quelquefois." ..."Parce qu'il n'y a pas de conscience du bonheur. D'appréhension claire et lucide de ce qu'il est. Il nous traverse par instants, déjouant notre vigilance, rebelle à la raison qui voudrait le capter, glissant dans notre ciel mental comme ces étoiles filantes trop brèves qui déchirent les nuits d'été."
Nous sommes bien forcés d'acquiescer quand l'auteur nous dit que le bonheur de s'impose pas, pas plus qu'il ne se décrète.("intimer")
Nous faisons de même quand il écrit qu'il est difficile d'être heureux et moral, qu'il n'est pas facile d'accepter le désir et sa satisfaction quand on a eu une éducation judéo-chrétienne. ("désirer")
Le texte "profiter" est une petite leçon de clairvoyance sur notre société de consommation ou chaque individu revendique le bonheur pour lui même quitte à ce que ce soi au détriment des autres.
"Il y a du ridicule, sinon de l'obscénité, dans notre empressement à revendiquer un bonheur réduit aux acquêts. Une infantile présomption à faire d'"avoir" l'unique auxiliaire dans la grammaire de nos vies;"Avoir" est toujours transitif. C'est le verbe du désir, de la boulimie. Il ne se conçoit pas sans objets. "Avoir encore", "avoir plus", "avoir mieux"-rien n'épuise sa construction... ... C'est le verbe de la frustration. Sagesse de la syntaxe : on n'a pas du bonheur, comme on aurait un chat, une maison secondaire... ...Tout au plus peut-on être heureux. Jouir non d'un substantif mais d'un état..."
De belles pages se succèdent pour tenter d'égrainer les tout et les riens qui nous font exister de bonheurs en bonheurs : s'oublier, jouir, être là, faire l'amour, s'aimer, reconnaitre, peindre, se perdre, partager...
Jean-Philippe Arrou-Vignod nous offre trois textes savoureux sur le bonheur d'écrire avec trois titres évocateurs : "s'imaginer", "finir", "écrire".
Enfin, le dernier texte: "Vivre", nous rappelle que "vivre n'est rien sans le sentiment de vivre."
Il décline ce sentiment en deux états, l'un, contemplatif, quand nous savons être disponibles à la beauté des choses, des êtres et du monde,
l'autre, euphorique, qu'il qualifie de griserie :
"griserie d'aimer. De faire. De construire. De se découvrir compétent..."
"Être heureux : un verbe d'état tout autant qu'un verbe d'action. Un concentré d'enthousiasme, d'élan, d'énergie pure..."
Vous ne trouverez pas de recettes dans ce petit traité qui n'en est pas un, mais une réflexion douce et tranquille sur le bonheur et le sentiment d'être heureux.
Il est bon de s'attarder un peu sur les contours que prennent nos émotions dans nos vies, de prendre la peine d'en prendre le temps...
C'est un livre qui fait du bien...
La présentation de l'éditeur,
La petite note de Psychologies.com,
Claudiogène a aimé, même s'il n'est pas d'accord avec juste une chose...