Le nouveau mot à la mode depuis quelques semaines : « subprime »…et à force d’en parler, on oublie l’essentiel : le consommateur US et sa capacité à tenir la croissance. Voici quelques donc quelques ordres de grandeur pour bien situer les enjeux :
- Le montant total des prêts à taux révisables (ce que j’ai appelé « prêts exotiques ») est d’environ 3 000 milliards de $ (selon les sources, les estimations varient entre 2500 et 3500 milliards), environ 30% du total des prêts hypothécaires US.
Rappelons que ces prêts sont caractérisés par une période de « teasing » (mensualités très basses où seuls les intérêts sont remboursés, parfois même moins ), puis par un « réajustement » brutal ou la mensualité à payer va augmenter fortement (parfois plus de 100%). Jusqu’ici avec la hausse de l’immobilier tout se passait bien, l’emprunteur gardait son bien pendant la période de « teasing », puis revendait avant le réajustement pour rembourser son prêt (et dégager une plus-value). Depuis 2006 l’immobilier commence à baisser, et de plus en plus de prêts sont dans le « rouge », c’est à dire que la valeur du bien immobilier acheté ne couvre plus le prêt. Quand le prêt est soldé, il en résulte une perte, pour l'emprunteur et l'économie globale. Les estimations des pertes potentielles sur l’économie sont pour le moment très variables : Une première façon d’estimer les pertes est d’extrapoler les taux de défaillances des emprunteurs sur les prêts exotiques en cours. Amp capital arrive en utilisant ce calcul à un chiffre de 150 milliards de $ de pertes potentielles. Problème : cette estimation ne prend pas en compte les emprunteurs « prévoyants » qui préfèrent vendre leur bien à perte avant le « réajustement » du prêt et sont ainsi capables de rembourser leur banque. Dans l’hypothèse d’une baisse des prix de 10% sur l’immobilier, 1173 milliards de prêts « révisables » seraient dans le rouge, et les solder avec une perte moyenne de 30% conduirait à une perte de 352 milliards de $ selon le rapport de Stéphanie Pomboy du cabinet Macromavens (qui présente d'autres hypothèses de calcul). Mais même 350 milliards de $ de pertes, répartis sur 3 ans (117 milliards annuels) ne représenteraient qu’environ 1% du PIB des USA chaque année. Donc une situation encore gérable sans trop de « casse » pour les économies des USA et du reste du monde… Seulement il y a un « hic » : Cette crise du subprime révèle un problème infiniment plus grave…qui a l’air « anodin » : On vient tout simplement de toucher les limites possibles de l’expansion du crédit : l’échec actuel des prêts « exotiques » montre qu’il n’est plus possible d’augmenter encore l’endettement du système. Et là on passe d'un coup à un « problème » 30 fois plus important : Pour que ce problème se produise, aucun besoin de faillite retentissante, de catastrophe inattendue. Il suffit que les acteurs économiques ne soient plus capables d'augmenter leur endettement !
Ce graphique montre la hausse annuelle de la dette totale des USA : Elle a amené en 2006 plus de 3500 milliards de $ dans le système économique...30 fois plus que les pertes potentielles annuelles sur les prêts exotiques.
La seule stagnation de la dette des ménages retirerait à l’économie plus de 1000 milliards annuels par rapport aux années précédentes…La stagnation de la dette totale retirerait plus de 3500 milliards annuels.
Les problèmes liés aux crédits exotiques ont déjà été anticipés dans ce blog, puis par le marché. Pour comprendre la « suite des évènements », il faut évidemment suivre les développements sur ce secteur…mais surtout regarder ce qui va se passer au niveau de la dette totale, et du consommateur US. Ce sont les deux derniers maillons qui résistent encore…et qui portent en eux le potentiel pour déclencher une crise infiniment plus grave que celle des « subprimes ». Nous devrions bientôt en avoir un aperçu.