France - Hommes et souris sont attirés par les mêmes odeurs. Tel est le résultat que viennent, pour la première fois, de révéler des chercheurs français de l'unité "Neurosciences sensorielles, comportement, cognition" de l'université Lyon 1 associée au CNRS.
Ces travaux confirment que les préférences olfactives ne sont pas seulement déterminées par l'expérience ou la culture, mais aussi par la structure de la molécule odorante. Ils permettront sans doute une meilleure compréhension des mécanismes neuronaux codant la perception olfactive. Pouvoir prédire les préférences olfactives humaines à partir de celles observées chez les souris est une autre perspective, plus immédiate.
Chez l'Homme, les odeurs influencent fortement de nombreux comportements quotidiens, telles l'activité sexuelle, les relations sociales ou la prise alimentaire. Certaines sont agréables, d'autres pas, induisant respectivement une attirance ou une répulsion. Cette valeur positive ou négative de l'odeur est très fortement façonnée par l'expérience et la culture du sujet : par exemple, si l'on pense au camembert, son odeur alléchante pour beaucoup de Français peut être repoussante pour une personne d'une autre culture.
Et si les préférences olfactives comportaient une part innée ? Elles seraient alors également dictées par la structure chimique et les propriétés physiques de la molécule odorante. Pour répondre à cette question, Nathalie Mandairon et Moustafa Bensafi, deux chercheurs du CNRS au laboratoire "Neurosciences sensorielles, comportement, cognition" ont mesuré les préférences olfactives de l'Homme et de la souris, en réponse à une série d'odeurs. En effet, si la "valeur" de l'odeur est prédéterminée par la structure de la molécule odorante, cette dernière doit comporter une information induisant le choix. Partant de là, hommes et souris, confrontés à une même odeur, devraient réagir de la même manière.
Pour les souris, les chercheurs ont utilisé comme indice de préférence le temps passé par l'animal à explorer une odeur donnée. Quant aux humains, il leur a été demandé de porter un jugement et de donner une "note" entre 1 et 9, des odeurs les plus désagréables aux plus agréables. Dans le même temps, la durée d'inspiration, qui est d'autant plus longue que l'odeur est agréable, a été enregistrée.
Première conclusion : hommes et souris sont attirés ou repoussés par les mêmes odeurs. Le géraniol, une odeur florale, constitue l'une des odeurs préférées par les deux espèces. A contrario, le guaïacol, qui correspond à une odeur de fumée voire de brûlé, figure parmi celles les moins appréciées. Ce résultat met en évidence la conservation des préférences olfactives entre ces deux espèces de mammifères. De plus, les scientifiques ont confirmé que ce jugement est étroitement lié à la structure de la molécule odorante. Celle-ci prédétermine donc en partie notre préférence olfactive.
Personne n'avait encore suggéré aussi fortement que les mécanismes neuronaux codant pour la préférence olfactive se situaient aux premiers niveaux de traitement de l'information sensorielle. Jusqu'à présent, il était supposé que tout ce qui avait trait au "jugement" olfactif était essentiellement traité à un niveau supérieur dans le cerveau. Ces travaux laissent espérer une meilleure compréhension de ces mécanismes et de leur fonctionnement. A plus court terme, ils suggèrent que le comportement de la souris pourrait prédire les préférences olfactives humaines, ce qui permettrait d'envisager des applications en industrie agro-alimentaire par exemple.