A quelques semaines des élections législatives que le Président Shimon Pérès appelle à ne pas reporter, des dissensions apparaissent au sein de la classe politique israélienne. Tandis que la troïka gouvernementale est désormais dissonante sur la question d'un possible cessez-le-feu, le leader de l'opposition, Benyamin Netanyahou appelle au renversement du Hamas à Gaza.
Ehoud Barak et Tsipi Livni, qui ont le vent en poupe dans les sondages, accepteraient le principe d'un cessez-le-feu proposé par l'Egypte contre des « garanties internationales » et l'assurance que le Hamas ne réarmera pas. Si la phase trois, c'est-à-dire l'entrée de Tsahal dans Gaza, a commencé dans la nuit de mercredi 14 janvier, elle risque de coûter la vie à de nombreux soldats. Déjà, Israël compte des dizaines de blessés, et les familles disent leur inquiétude. Les téléphones portables rassurent, mais les sonneries inquiètent... L'image d'Israël souffre aussi des accusations de « bavures ». Le centre de presse à Gaza a été touché, ainsi qu'une école, ou un hôpital...Les boucliers humains sont oubliés.
Voilà pourquoi le ministre de la Défense, tête de liste du Parti travailliste, se contenterait d'une opération réussie tandis que l'Etat major de Tsahal et le Premier ministre mesurent les risques d'une action militaire inachevée. 9 Israéliens sur 10 sont pour la poursuite des opérations...
La radicalisation de la critique au sein de l'opinion internationale est aussi un facteur important qui pèse de tout son poids dans la décision des ministres de la Défense et des Affaires étrangères. Les manifestations, les appels au boycott mobilisent davantage les foules à Paris ou Berlin qu'à Djénine ou Bethléem. Devant le nombre important de victimes civiles déclarées par les Palestiniens de Gaza, la pression internationale a monté d'un cran.
Washington a annoncé aujourd'hui la réduction des garanties d'emprunt à Israël pour un montant d'environ un milliard de dollars. Motif : les constructions se poursuivent en Judée et Samarie...L'Union européenne rompt le dialogue, et décide de faire une « pause » dans ses relations avec l'Etat juif. La Bolivie et le Venezuela rompent leurs relations diplomatiques avec Israël. Et Ban Ki Moon, le Secrétaire général de l'ONU se dit « scandalisé » par les tirs israéliens sur les bâtiments de l'ONU, qui abritaient pourtant tireurs et stocks d'armes...
Est-ce prendre partie que de poser la question de savoir pourquoi le Hamas n'a pas été condamné pour avoir tiré des missiles sur Israël pendant les trêves humanitaires, scrupuleusement respectées par Tsahal ? La violence des uns serait-elle plus légitime que la défense des autres ?
Si un cessez-le-feu signé n'était pas respecté, le Hamas serait-il cette fois désigné responsable de l'escalade de la violence ?
Côté palestinien, Gaza fait l'objet de toutes les spéculations. Le Président de l'Autorité palestinienne sait bien que le contrôle de Gaza par le Fatah est une condition nécessaire à la création d'un Etat palestinien qu'il appelle de ses vœux. Ses condamnations sont rares, et peu efficaces. Jeudi 15 janvier, les manifestations de solidarité avec Gaza prévues à Ramallah ont été annulées, faute de participants. Aucun leader du Fatah n'a déploré la mort de Said Siam, ministre de l'intérieur du Hamas, tué dans des bombardements. Le monde arabe reste divisé sur un conflit qui oppose le mouvement le plus radical au pays le plus démocratique de la région.
Pour l'Egypte, la Jordanie, l'Irak, l'Arabie Saoudite ou les Pays du Golfe, le maintien du Hamas à Gaza n'est pas une bonne affaire. Ils redoutent les stratégies de conquête de pouvoir basées sur un « terrorisme d'usure », au nom d'une idéologie islamiste.
Depuis trois ans et demi que les Palestiniens jouissent d'une autonomie territoriale, le Fatah a été éradiqué, et la terreur islamique règne à Gaza.
La guerre qui oppose le Hamas à Israël n'a pas commencé il ya trois semaines. A Sdérot, la guerre dure depuis huit ans. A Sdérot, des enfants jouent à l'alerte rouge, des femmes s'évanouissent quand retentissent les sirènes. A Sdérot, chacun a peur pour l'autre. Depuis huit ans, des torrents de missiles et d'obus s'abattent sur le Néguev occidental. Le kibboutz Niram bat des records d'alertes. Huit mille, en huit ans.
La sécurité d'Israël est menacée, comme le confirment les salves de Katiouchas tirées depuis le Liban sur la ville de Kiryat Shmoné, au Nord d'Israël, et les menaces proférées par l'Iran ou le Hezbollah. Il n'y a pas d'autre message.
GUY SENBEL