Consommation d’Internet : surfons moins ?

Publié le 13 janvier 2009 par Toyn

La question est évidemment un brin rhétorique. Comment dire, à la vitesse d’expansion actuelle d’Internet et de son premier réseau, le web (186 millions de sites web en 2008, soit 30 millions de plus qu’en 2007), qu’une solution envisageable à l’échelle globale est la décroissance d’Internet ? Du nombre de sites sur le web, du nombre et du volume de connexions ?

Le débat s’est pourtant élevé depuis quelques jours, et la publication d’une étude par Alex Wissner-Grosselon sur le coût énergétique d’affichage d’une page web. Il a démenti peu de temps après avoir voulu parler d’une recherche Google, mais le fait est là : le géant de l’Internet a été désigné comme cible immédiatement. Le chiffre indiqué est simplifié, et d’autant plus marquant : deux recherches sur Google consommeraient autant d’énergie qu’une bouilloire électrique qui chauffe de l’eau pour le thé. 7g de CO2 émis par recherche. Enorme, comparé aux 0,2g annoncés par Google en retour.

Maintenant, la question est posée : quelle solution ? Faut-il décélérer ? Décroître sur Internet, comme on pourrait le faire en général selon les adeptes de cette théorie ? Rappelons quelques faits :

1) Il est extrêmement compliqué de poser exactement une équation pour mesurer l’impact énergétique d’Internet. Que faut-il faire entrer en compte ? Les serveurs ? Leur démarrage (rare), leur émission en carbone en fonctionnement, leur consommation en énergie, leur recyclage ? Comment quantifier : l’émission en carbone est-elle plus nocive pour l’environnement que l’utilisation de ressources ?

2) Il est de plus en plus difficile d’attribuer un critère de géolocalisation aux technologies de l’information et de la communication. A quels pays appartiennent les réseaux ? A qui attribuer la dette en carbone, l’utilisation des ressources, etc ? Est-ce à l’endroit où sont implantées les infrastructures ? Dans le pays du siège de l’entreprise ? Par exemple, Amazon, qui investit en masse dans les technologies “dans les nuages”, a une multitude de serveurs dans le monde entier. Faut-il décompter par pays, ou tout mettre au débit d’Amazon, donc des Etats-Unis ? Et une fois ce problème réglé, il reste celui des utilisateurs des services d’Amazon, avec les mêmes questionnements.

3) La recherche utilise énormément de ressources, dans les laboratoires, les entreprises, et dépense beaucoup de carbones, utilise du matériel qui sera jeté ou recyclé. Mais quid de la recherche impliquant une progression dans le domaine des technologies vertes ? A quel compte la mettre ? Au débit ou au crédit de l’environnement ?

4) Les impacts des entreprises dépendent aussi des choix politiques des pays. Renouvelable, nucléaire, mazout, etc.

Alors certes, on peut se réjouir ou au moins s’interroger sur la possible prise en compte du coût des nouvelles technologies en terme environnemental. On peut également déplorer la création de nouvelles niches, trappes à bonnes volontés prêtes à se faire berner (encore que dans ce cas-là, l’article d’Eric tende à montrer que l’effet correcteur et propagateur du web devrait y couper à plus ou moins court terme). On peut également tourner en dérision ces questions, et se persuader que la recherche et le sacro-saint progrès trouveront une solution à temps pour pallier les effets nocifs des nouvelles technologies.

Mais pour qu’un plan global puisse être un jour mis en place, qui ne se contente pas d’ajustements de technologies à la marge, ou de simples soins palliatifs consistant à planter un arbre par téléphone vendu, il faudra se tourner vers les économistes. Ce sont eux qui seront à même ou non de mettre un prix sur des technologies, des réseaux, des matériels. Quand ils pourront numériser l’environnement, et le coût des actions réelles ou virtuelles sur celui-ci, une autre dimension pourra être prise en compte pour progresser dans le bon sens.

C’est déjà en cours dans certains secteurs de l’industrie, et même si ce n’est qu’une petite avancée, c’est un premier pas vers le chiffrage de l’économie verte. En attendant, on peut toujours choisir d’hiberner, ou de se plier à quelques rituels simples.