Gérard FILOCHE : "Pour un nouveau contrôle sur les licenciements abusifs et boursiers"

Publié le 14 janvier 2009 par Slovar
Gérard FILOCHE nous a fait parvenir un article concernant l'idée d'un projet de loi en faveur d’un nouveau contrôle de la puissance publique sur les licenciements abusifs et boursiers. Conformément aux engagements de Slovar les Nouvelles, nous publions son texte dans son intégralité ci-dessous.
La puissance publique et son inspection du travail doivent pouvoir contrôler les licenciements boursiers et abusifs
En 1986, la droite avait supprimé le précédent contrôle de l’administration sur les licenciements qu’elle avait elle-même instauré en 1975 et dont les prémices existaient depuis 1945. L’établissement d’un nouveau mode de contrôle appartenait au programme socialiste de 1997, mais cette promesse n’est pas entrée en vigueur, seule la “LOM”, loi de modernisation sociale a renforcé en janvier 2002 le droit du licenciement (supprimée par François Fillon).
Mais aujourd’hui, en 2009, actionnaires et employeurs abusent scandaleusement de l’effet d’aubaine de la crise du capitalisme financier... Ils sont à l’origine de ladite crise par leurs spéculations boursières et ils veulent, en plus, faire payer cette crise.. aux salariés ! C’est inacceptable.
La gauche doit donc proposer d’instaurer un nouveau type de contrôle administratif pour empêcher tous ces licenciements boursiers et abusifs. Les licenciements de ce type doivent être suspendus en cas de doute manifeste sur le motif, et les éventuels licenciés sans cause réelle et sérieuse resteront dans l’entreprise jusqu’à décision.
Actuellement, le salarié licencié « sans cause réelle et sérieuse » est, même s’il est dans son droit, et malgré un éventuel jugement favorable des Prud’hommes, exclu de l’entreprise en ne bénéficiant que d’indemnités de plus en plus faibles. On a ainsi le cas paradoxal, inacceptable, où celui qui a raison auprès de la justice, mais n’est pas pour autant rétabli dans ses droits. Dans le cas de licenciement abusif, la gauche devra permettre à l’inspection du travail, saisie par un syndicat, de suspendre la procédure dès lors qu’il y a « un doute manifeste » sur le bien fondé juridique du licenciement.
Le salarié restera dans l’entreprise et si l’employeur veut poursuivre la procédure, ce sera à lui de le défendre devant l’administration puis le juge concerné.
La loi de modernisation sociale de janvier 2002 sera rétablie et améliorée de façon à donner d’abord aux syndicats et aux salariés les moyens d’être informés, d’analyser, de contre proposer, de lutter de façon à rétablir leurs droits. Les institutions représentatives du personnel (IRP) doivent voir leurs droits de contrôle effectifs restitués et renforcés.
Mais si le rapport de force construit par les syndicats et les salariés face aux menaces de licenciement ne suffit pas, les syndicats devront pouvoir saisir l’inspection du travail et la puissance publique se doter des moyens juridiques de leur répondre en suspendant effectivement, les délocalisations, externalisations et licenciements boursiers, spéculatifs, sans cause réelle et sérieuse.
Lorsque la spéculation boursière sera la motivation réelle, et non de réelles difficultés économiques, l’inspection du travail pourra rendre la procédure « nulle et de nul effet » en dressant un « constat de carence » dans un délai de huit jours après la fin de toutes les procédures, lorsque “ les licenciements seront évitables” (par exemple en baissant les dividendes des actionnaires), et que « les mesures visant au reclassement seront insuffisantes ». ( A noter que cela existe déjà dans le code du travail, mais dans un délai de huit jours, au début de la procédure, à partir de la première saisine de l’inspection, et non pas quand tout a été examiné par les représentants des salariés : l’actuel délai de 8 jours ne permet rien. Mais si le même délai démarre après la fin des consultations des IRP, avec une possibilité de décision effective, il en sera tout autrement car les syndicats, après avoir joué tout leur rôle, auront le recours de la puissance publique).
Une fois cette suspension réalisée, le dossier sera à nouveau examiné conjointement par les IRP et l’administration du travail avec les employeurs.
Si le comité d’entreprise ou, à défaut, les délégués du personnel, avec leurs syndicats, à la majorité, constatent que l’employeur fait de nouveaux efforts nécessaires pour garder le maximum d’emplois en baissant les dividendes des actionnaires, également en matière de reclassement et d’indemnisation des salariés concernés et qu’il mène une politique active de ré industrialisation du ou des bassins d’emplois touché par la fermeture éventuelle du site, l’autorisation sera finalement accordée.
Si ce n’est pas le cas, la puissance publique pourra exiger des compensations financières, à la fois pour les salariés victimes des licenciements et pour le “pole emploi” (formation, reclassement). Ces indemnités seront dissuasives vis – à - vis des actionnaires : ils y perdront les “marges” qu’ils espéraient préserver ou gagner dans l’opération. (Déjà, dans certains cas, des juges ont imposé trente à quarante mois de salaires par salarié concerné et pareillement, en plus, pour les Assedic, le législateur doit permettre à la puissance publique, elle-même, de se doter de tels moyens de décision dissuasifs). La loi prévoira aussi que des actionnaires et employeurs qui auraient bénéficié d’aides publiques seraient aussi contraints de les restituer lorsque les licenciements seront motivés par la recherche de marges supplémentaires.
Avec la mobilisation syndicale et des IRP, la suspension et le contrôle public puis la taxation massive des délocalisations boursières et des externalisations artificielles est l’arme par excellence contre l’avidité du capital financier : il n’existe aucune raison de les laisser détruire des industries, des emplois, des vies, des régions, des pays, des droits sociaux universels pour le seul triomphe des profits maximum, qu’ils reversent ensuite dans la spéculation boursière catastrophique et sans fin.
Gérard Filoche
Démocratie & Socialisme

Libellés : chomage, crise financière, emploi