C'est donc au Centre Durrenmatt même
que j'ai acheté La mise en oeuvres. Une
autobiographie. Une sorte d'autobiographie, très
singulière, dans laquelle Dürrenmatt revisite son
existence, en lien toujours avec les motifs importants de son œuvre,
les thèmes, les matières.
Il y intègre des textes qui
l'ont hanté, qu'il n'a pas écrits, qu'il n'a pas
achevés, qu'il élabore pour cette occasion. La
guerre dans l'hiver tibétain, extraordinaire fable
post-atomique où les rescapés belliqueux du conflit
s'entretuent dans des grottes labyrinthiques (le texte est censé
être gravé sur les parois par le dernier guerrier sur sa
chaise roulante, plongé dans l'obscurité, mutilé,
rajouté de prothèses). Eclipses de lune, une
autre version de la visite de la vieille dame, où celui qui
retourne au village pour se venger est un homme. Le rebelle,
résumé d'un livre qu'il n'a pas fait, fable sur la
révolution et le pouvoir.
Ce n'est pas étonnant si La
mise en oeuvres, titré originellement Stoffe en
1981 a été republié sous le titre Labyrinth
en 1990, tant cette figure, et celle du Minotaure qui le hante, sont
présents dans le texte comme d'ailleurs dans l'œuvre entière
de Dürrenmatt. Y compris ses tableaux qu'on peut voir à
la fondation.
Un labyrinthe magistral qui serait ici
composé de fiction, d'autobiographie, d'essais, de récits
de rencontres, de portraits, de considérations sur la
science...
Friedrich Dürrenmatt, La Mise
en Oeuvres, L'Age d'Homme