Une anecdote, qui laisse aujourd’hui rêveur, sur ce siècle d’or. Lorsque, vers 1820, Mary Sommerville, mathématicienne anglaise et traductrice de Laplace, rend visite à Laplace et Berthollet à Arcueil, elle y rencontre toute l’élite scientifique française et est complètement éblouie par Poisson. Elle note dans son journal : “J’avais quelque difficulté à suivre la conversation générale, mais lorsqu’on parlait de science, c’était beaucoup plus facile, car tous mes livres de science était en français”. ...... Si je devais tirer une leçon de l’histoire des scientifiques français, c’est celle de l’importance de la vulgarisation scientifique. Le grand XVIIIème siècle français a été une époque durant laquelle la culture scientifique a connu une diffusion extraordinaire. La société s’est passionnée pour les sciences comme à aucune autre époque de notre histoire. Les philosophes étaient capables de discuter avec pertinence avec les savants des dernières recherches scientifiques. Ce siècle d’or de la science française a été ouvert par d’immenses savants, qui étaient en même temps de très grands vulgarisateurs. C’est, entre autres, Réaumur et Buffon pour l’histoire naturelle, Rouelle pour la chimie, Fontenelle et le très pittoresque abbé Nollet pour la physique. Est-ce un hasard si la France a ensuite connu une telle floraison de grands savants ? "...
Extrait d'un conférence donnée en 2008 par Eric Sartori,Docteur es sciences et auteur de plusieurs ouvrages d'histoire des sciencesMagazine Science
"la France a autant de motif d’être fier de son passé scientifique que de sa gastronomie, de sa littérature ou de son football. Pour ne citer que quelques-uns des héros de l’histoire scientifique française, avec l’humaniste Paré commence la médecine moderne, après les excès un peu stériles, les provocations de Paracelse . Viète, le premier, dépasse l’héritage mathématique grec et en extrait la méthode algèbrique , ce qu’il appelle l’or algébrique : “Le métal que je produis à l’aspect de l’or si longtemps désiré”. Sur sa lancée, le chevalier Descartes annonce ce qui deviendra le programme, le rêve occidental : “Nous rendre comme maître et possesseur du monde”. Entre Descartes, Pascal, Fermat et les mathématiciens parisiens, dont Roberval, se joue une brillante et parfois hilarante comédie, dont l’enjeu est la maîtrise de l’espace physique par l’analyse mathématique. Il faudrait aussi parler du grand XVIIIème siècle français, ou plutôt de la période 1750-1850, siècle d’or de la science française, avec Laplace, Lavoisier (à toute histoire, il faut ses martyrs, et la science française a le sien en la personne de Lavoisier), Buffon, Lamarck, Cuvier, pour l’histoire naturelle, et toute la postérité scientifique de Lavoisier, regroupée autour de Laplace et Berthollet dans l’Ecole d’Arcueil : Arago, Malus, Poisson, Biot, Thenard, Gay-Lussac, et encore Cauchy et Ampère( la France a aussi inventé, en quelque sorte, l’analyse moderne et l’électrodynamique), Et, plus récemment, Pasteur, Claude Bernard, Poincaré…