L'Autorité de sûreté nucléaire a décidé de refuser ou de suspendre l'agrément des laboratoires de l'électricien pour des mesures réglementaires. Pendant plusieurs mois, EDF doit sous-traiter ces mesures à des laboratoires externes.
La réputation d'EDF, le leader mondial du nucléaire par le nombre de réacteurs en exploitation, a été écornée hier avec la révélation d'une défaillance de ses laboratoires chargés de mesurer la radioactivité de ses centrales. L'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) a en effet décidé de refuser ou de suspendre leur agrément pour des mesures réglementaires, comme l'a divulgué le réseau Sortir du nucléaire.
En France, c'est en effet l'exploitant EDF qui est en charge de l'autosurveillance de ses 19 centrales. Pour chacune d'entre elles, le dispositif régulier de contrôle et de surveillance de l'environnement représente quelque 20.000 mesures annuelles, selon le groupe. Ces mesures, qui ne concernent pas les rejets, sont réalisées dans l'air ambiant, dans l'écosystème terrestre et dans les eaux.
Depuis le 1er janvier, ces laboratoires doivent être agréés par l'ASN, via son bras technique, l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN). Ce dernier a réalisé des tests, demandant à EDF d'effectuer des mesures sur des échantillons paramétrés avec le but de comparer les résultats, explique Didier Champion, directeur de l'environnement et de l'intervention à l'IRSN.
Conclusion : « les mesures de l'indice d'activité bêta global », un rayonnement radioactif, et celles de « l'activité du tritium », une substance radioactive, ne sont pas suffisamment précises.
Dans le premier cas, les mesures effectuées par EDF sont de 10 à 15 % supérieures aux valeurs réelles. Dans le deuxième cas, c'est l'inverse qui se passe. Une situation plus délicate. « Les laboratoires d'EDF avaient plutôt sous-estimé dans le cas du tritium », selon Marie-Christine Robé, en charge des tests d'échantillons à l'IRSN. « Sur le plan de la maîtrise des impacts, cela ne semble pas inquiétant, concède Didier Champion. Mais, il est important que la surveillance soit irréprochable. »
Recoupements avec l'IRSN
Selon Julien Collet, directeur de l'environnement et des situations d'urgence à l'ASN, l'électricien a « résorbé entre-temps une partie de ces écarts » et a engagé un plan d'action, dont les mesures seront mises en place en février. Ceci devrait permettre à EDF de formuler une nouvelle demande d'agrément au mois de mai, ajoute-t-il. D'ici là, le groupe devra sous-traiter les mesures à des laboratoires externes, agréés.
Pour Sortir du nucléaire, qui a écrit au ministre de l'Ecologie, Jean-Louis Borloo, il s'agit d'un « scandale de très grande ampleur ». « L'industrie nucléaire montre qu'elle est très loin d'être irréprochable alors que les conséquences et les risques qu'elle fait peser sur l'environnement et la santé des populations sont incommensurables et incomparables à tous les autres », a déclaré aux Echos.fr son porte-parole Stéphane Lhomme.
L'IRSN fait cependant valoir que, si le dispositif de contrôle de l'environnement est basé sur l'autosurveillance d'EDF, l'institut réalise lui aussi des mesures autour des centrales. Elles sont certes moins nombreuses que celles de l'électricien (environ un millier par centrale), mais permettent des recoupements. Jusqu'ici, « nous n'avons décelé aucune anomalie attribuable aux sites d'EDF », selon Didier Champion.