Intérim, où va-t-on ?

Publié le 15 décembre 2008 par Kristobal @kristoguy

L’intérim connaît sa pire crise depuis les années 90. Heureusement, les agences d’intérim, maintenant appelées « agences d’emploi », diversifient leurs activités depuis quelques années. Recrutement, portage salarial, formation ou encore externalisation : nombreuses sont les pistes envisagées par ces acteurs appelés à jouer un rôle croissant sur le marché de l’emploi de demain.

« Depuis mars 2008, on constate une forte dégradation du marché de l’intérim, très affecté par la crise industrielle », explique Jean-Ghislain Desayve, Directeur au sein de Hays. En septembre, la baisse s’est encore accentuée, atteignant -10 % puis -14 % en octobre, pour culminer autour de -20 % en novembre, constate quant à lui, Arnaud de la Tour, président directeur général du PRISME, le syndicat des professionnels de l’intérim. Au-delà des chiffres, c’est la pire décrue rencontrée depuis les années 90. Or, après la crise de 1992 et 1993, il a fallu cinq ans pour que le secteur s’en remette… Jean-Ghislain Desayve relativise cependant : sur des profils en pénurie, des fonctions de support et des missions pointues, il y a encore beaucoup de demandes surtout dans les services, en comptabilité et en informatique.

Les recrutements en CDI également touchés

Face à la crise de l’intérim, les agences d’emploi peuvent, dans une certaine mesure, s’appuyer sur leur second métier : celui du recrutement en CDD et CDI.
Une activité qu’elles peuvent développer depuis trois ans et qui se porte relativement bien malgré la récession. Les agences d’emploi se sont ainsi chargées de 60 000 recrutements cette année, contre 39 000 en 2007. Elles sont d’ailleurs aujourd’hui les secondes pourvoyeuses d’emploi après le Pôle Emploi.
Les agences ont surtout été mandatées par des PME qui jusque là n’auraient pas pensé avoir recours à des recruteurs mais qui apprécient leur maillage de proximité. Une dynamique qui pourrait cependant s’estomper elle aussi : Depuis octobre, l’incertitude augmente et la demande de CDI décroît. Les clients ont davantage recours aux CDD , nuance Jean-Ghislain Desayve.

Les propositions du secteur face à la crise

Le PRISME a récemment formulé cinq grandes propositions au gouvernement pour remédier à cette crise. Le syndicat cherche, en premier lieu, à assouplir la législation du travail. Le but : rendre possible les renouvellements multiples de missions et en terminer avec les délais de carence. Le syndicat s’attèle aussi à accroître la coopération avec l’ancienne ANPE, notamment en effectuant de la sous-traitance pour Pôle Emploi.
D’autre part, le PRISME réclame des aménagements pour faciliter la gestion des services à la personne par les agences d’emploi. Quelque 6 000 agences pourraient alors gérer ces métiers, avec plus de proximité et plus efficacement qu’aujourd’hui, explique le président du syndicat. Enfin, nous souhaiterions avoir accès à la taxe d’apprentissage. Cela représente 35 à 36 millions d’euros. Nous voulons utiliser cette enveloppe pour former les jeunes en fonction des besoins du marché puis, profitant de notre activité, les placer immédiatement en entreprise pendant six mois.

Acquérir leurs lettres de noblesse grâce à la formation

Les agences d’intérim seront des acteurs majeurs de la formation et ainsi de la flexsécurité, affirme Arnaud de la Tour. Car de nos jours, on ne fait pas une carrière mais des carrières. Or, les entreprises n’ayant pas toujours les structures pour assurer la formation continue de leurs salariés, les agences d’emploi souhaiteraient à l’avenir contribuer à combler ce manque.Pour 650 000 équivalents temps plein, nous menons quelque 240 000 actions de formation, ce qui représente 330 millions d’euros , annonce Arnaud de la Tour.

Vers l’externalisation des services recrutement ?

La crise pourrait également engendrer un phénomène de concentration dans le secteur. De nombreuses petites structures d’intérim pourraient fermer leurs portes tandis que les grandes agences devraient survivre, notamment en développant le recrutement en CDD, en CDI ainsi que le portage salarial. Mais il leur faudra également chercher à séduire davantage les cadres. Nous sommes prêts à intégrer de plus en plus de cadres et de seniors, souligne Arnaud de la Tour. Nous n’attendons plus qu’un changement de mentalité de la part des entreprises et plus généralement de la société.

Autre piste, celle de l’externalisation des services de recrutement, qui consiste à se charger, en tant que sous-traitant, de l’intégralité des activités de recrutement d’une entreprise. Au Royaume Uni, 80 % des recrutements sont externalisés contre 20 % en France, il y a donc une forte marge de progression, constate Jean-Ghislain Desayve. Cette activité se développera-t-elle dans l’Hexagone ? Les agences d’emploi sont en tout cas bien placées pour se positionner sur ce créneau.