Au Nord, la créativité municipale ne se dément pas. Après l'arrêté anti-coupures, voici l'arrêté anti-démarchage.
Le 8 octobre 2007, Jean-Pierre Kucheida, député et maire PS de Liévin, prenait un arrêté interdisant sur le territoire de sa commune toute coupure d'eau, d'électricité et de gaz durant la période hivernale. "Un maire n’a pas le droit de laisser une famille de bonne foi sans électricité ni chauffage", expliquait-il alors. L'arrêté était ensuite suspendu par le Juge des référés du Tribunal administratif de Lille à la demande du Préfet du Pas-de-Calais.
Le 7 janvier 2009, Daniel Dewalle, maire PC d'Houdain, a pris un arrêté encore plus inattendu. Rédigé en termes simples ("Article 1: Les sociétés Arelys et Poweo sont interdites de démarchage à domicile"), il vise plus à attirer l'attention sur certaines pratiques commerciales qu'à être véritablement appliqué, le maire n'ayant pas caché qu'il se faisait peu d'illusions sur sa validité juridique. Il s'agit aussi de mettre fin au démarchage de "personnes se faisant passer pour EDF GDF"...
(On trouvera sur le site les Arnaques.com à la fois le témoignage d'un client abusé et copie de l'arrêté du 7 janvier).
Le problème posé est double: le développement du porte à porte et... le contrôle de ce porte à porte.
La Loi de modernisation de l'économie a fortement augmenté le coût d'acquisition d'un client par les fournisseurs alernatifs, comme l'expliquait récémment Thierry Roussel, directeur général de Direct énergie: "Le processus est devenu très long et coûteux. En cas de changement de fournisseur, la LME impose l’acceptation signée du contrat par le client. Le coût d’acquisition d’un client est désormais d’environ 200 euros… Or, les marges sont très faibles sur les clients particuliers… On paye indirectement, avec la LME, les pratiques commerciales indélicates de certains concurrents".
Avec le développement du porte à porte, le risque de pratiques douteuses s'accroît - vendre ainsi, chacun le sait, n'est pas un métier facile. D'où la question du contrôle effectué a posteriori par les fournisseurs d'électricité et de gaz. Ou a priori dans le cas de Poweo puisque sa filiale, Arelys, est explicitement visée.
Pour les fournisseurs alternatifs (et, pour Poweo, le remous médiatique le prouve), le coût d'acquisition d'un client par le démarchage à domicile se double désormais d'un coût de moins en moins caché, celui de l'image. Car un seul témoignage tel que celui des habitants d'Houdain a un effet dévastateur dans les journaux, à la télé, sur le web... Tandis que le "basculement" discret du tarif réglementé vers le marché par un opérateur historique, comme l'a pratiqué Gaz de France, se fait pratiquement sans risque...
Dans les Echos, on s'interroge: pourquoi à tout prix se faire passer pour l'opérateur historique? "Après tout, selon le médiateur national de l'énergie, Poweo n'est pas le pire. L'année dernière, le fournisseur alternatif était à la source de 7 saisines pour pratiques commerciales abusives, contre 20 pour EDF, 74 pour Gaz de France et 42 pour Direct énergie. Les apparences sont décidément trompeuses."
Oui, mais voilà, l'image, la politique d'image, c'est d'abord une politique d'apparence...