Trois actualités sans rapport évident entre elles, sauf, bien sûr, le lien avec le Président de la République.
- La suppression du juge d'instruction.
- La soumission de la recherche au pouvoir politique et à l'économie.
- L'idée de faire de Jean Sarkozy (fils de...) l'adjoint du chef de l'UMP.
On sait que Nicolas Sarkozy n'aime pas les sachants. Il n'aime pas non plus le fait qu'il existe quelque chose qui s'appelle La Princesse de Clèves quelque chose qui lui échappe totalement, et qui lui a fait "tant souffir".
Que le même Nicolas Sarkozy n'apprécie pas non plus les juges est une autre histoire, plus complexe et ambiguë comme l'affaire Clearstream. On sent que là, c'est plutôt sa caste qui est menacé par ces gêneurs.
Et puis, il y a Jean S. (Juan nous rappelle qu'il faut signer la pétition) dont le bel avenir ne fait plus aucun doute, qui, en refusant ce poste d'adjoint a fait un grand pas vers un rôle national de premier plan dans le dispositif sarkozyën.
Sur la recherche, le TGH a dit récemment, (c'est ici, dans France Soir!) :
« qu'il faut en finir avec cette distinction entre recherche fondamentale et appliquée. Il n'y a pas de barrière entre les deux ».
Oui, d'accord : c'est la même science. Mais supprimer la distinction entre recherche fondamentale et recherche appliquée, c'est tout simplement supprimer la recherche fondamentale qui n'existe que grâce à cette terrible "barrière". Pourquoi la supprimer, d'ailleurs? C'est une barrière contre la pression du marché, contre la pression politique. Le principe de la recherche fondamentale est qu'on laisse faire la science, on laisse les scientifiques poursuivre leurs propres interrogations.
Qu'est-ce qui gêne, dans l'indépendance des chercheurs ? Bien sûr, comme le rappelle fidèlement Les Echos, les chercheurs français sont des fonctionnaires fainéants ("la léthargie des chercheurs hexagonaux anesthésiés par le doux oreiller du fonctionnariat") qui ont besoin du marché, de la pression et même de la précarisation pour se mettre en marche.
J'ai quand même le sentiment que ça va plus loin, du moins dans l'inconscient politique du Président de la R. De même que les juges d'instruction seraient bien plus "efficaces" (disons) s'ils dépendaient plus directement de la Garde des Sceaux, les chercheurs, gêneurs d'une autre espèce, seraient plus rentables si l'on pouvait les soumettre à des instances extérieures.
Ce qui est indépendant gène. Je pense que l'on peut inclure ce principe dans le bréviaire de la pensée sarkozyste. Que ce soit des médias, des juges, des chercheurs, les blogueurs (Marc Vasseur se demandait se matin pour combien de temps encore on va nous laisser sévir impunément), les différentes poches de résistance sont les ennemis du sarkozysme.
"Ensemble tout devient possible". Je n'avais pas pensé jusqu'à présent que ce "ensemble" n'était pas dit dans le vide : "ensemble", dans le sarkozysme, veut dire : tous dans le même réseau de pouvoir et d'influences, tous dans la même pyramide. Mais pas tous à la même place. Car une pyramide n'a qu'un sommet et je n'ai pas besoin d'indiquer l'identité de celui qui l'occupe. Des considérations vieux-jeu et abstraites comme "justice", "vérité", "le Bien" (oui, on peut rigoler un petit peu) n'ont pas de place dans la pyramide et sont donc éliminées petit à petit. De telles considérations sont, oui, gênantes, car elles n'ont rien à voir avec l'ordre pyramidal et la question essentielle de "qui est au-dessus de qui ?"
Et c'est là qu'intervient dans le scénario le jeune et tellement prometteur Jean Sarkozy, celui qui "n'intégrera pas la direction de l'UMP" (pensez: un mois sans citer le Figaro, c'était long). Jean Sarkozy est le contraire d'un juge d'instruction ou d'un chercheur qui ferait de la recherche fondamentale. Jean Sarkozy, sorte d'ombre blond qui plane désormais au-dessus des destins des Xavier Bertrand, Jean-François Copé et Patrick Devedjian, représente l'essence même de la logique pyramidale : un garçon qui n'a rien pour lui sauf un père ultra-puissant. Autrement dit, son seul mérite est sa capacité à occuper une place dans la pyramide. C'est déjà beaucoup. Un jour, ce sera tout.