Toujours des salons et des expos pour ne pas s’ennuyer et découvrir…
Le Centre des Métiers d’Art est un établissement public crée en février 1980. Il a pour vocation de préserver les spécificités de la tradition et du patrimoine polynésien et d’œuvrer à leur continuité dans le contemporain. Le cursus de cette école se poursuit sur trois ans. Les étudiants sont formés à la sculpture, la gravure, et autres arts, Ils reçoivent aussi des cours théoriques de langue et civilisation polynésienne. Un certificat de Formation aux métiers d’Art de Polynésie est délivré par le centre à la fin des études. Il devait se tenir une exposition des œuvres des élèves, mais ils sont toujours « au travail »… L’exposition est remise à quelques jours.
Lorsqu’elle ouvre, je m’attarde près de quatre étudiants qui sculptent un cadre où glisser un miroir. L’un des profs, présent auprès d’eux, m’explique le travail de ses élèves. D’abord « c’est une école d’art », les étudiants sont triés sur le volet et entrent par un concours d’entrée. Ces jeunes doivent « prouver leur motivation » et s’installer au sortir de l’école.
Sous un arbre, d’autres apprennent à battre le tapa (fibres d’écorce entrecroisées, agglutinées et martelées, qui donne une sorte de papier souple et résistant servant d’étoffe). D’autres préparent les colorants naturels à base de feuilles, de fleurs. Dans un autre coin, une jeune femme sculpte un tiki, une déesse de Raivavae (îles Australes). Pour l’instant la statue n’est pas encore prête à recevoir les tatouages et scarifications figurant sur le modèle en papier. Cette jeune femme a terminé ses trois années d’études au CMA, travaille pour elle en son atelier et est venue aider le centre a présenter des œuvres.
Je m’étonne auprès du prof que les modèles soient toujours les mêmes en Polynésie Française, qu’il n’y ait pas de créations plus récentes que des copies d’œuvres anciennes.
« Dis voir, c’est une petite école Boulle ici, non ?
- Oui tu as raison, on aimerait bien ! Un enseignant de l’école Boulle est venu nous former, nous les enseignants, pour nous aider à travailler d’autres essences de bois, créer des sculptures contemporaines…
- Vous ouvrir à d’autres techniques ? Pour le moment vous vivez dans le passé, pas dans le présent et encore moins dans le futur !
- Oui, aussi. Maintenant nous devons inculquer ces nouvelles données à nos élèves. Ce n’est pas si facile.
- Je m’en doute bien mais c’est le reproche que je ferais à l’artisanat ici : toujours utiliser les mêmes modèles aussi bien avec les coquillages, les perles, la nacre, les bois. Il faudrait donner du sang neuf à ces artistes que tu formes. Ayant appris les diverses techniques ils doivent créer eux-mêmes des objets d’aujourd’hui et de demain.
- Nous nous rendons compte que la venue du professeur de l’école Boulle nous a ouvert les yeux et c’est déjà un grand pas vers le futur. »
Bon. Il y avait également un sculpteur sur pierre mais le ponçage qu’il effectuait dans un nuage de poussière m’a empêchée d’aller discuter avec lui.
A la Mairie de Papeete, il y a deux expositions en même temps : le salon des peintres et le salon de la mode.
Les peintures sont surtout des natures mortes : fruits, fleurs, quelques portraits.
La mode : quelques robes sur un stand, des créations variées sur un autre. Beaucoup d’originalité des sacs en tissu, des sacs à dos également.
Les autres : colliers de perles et coquillages.
Une conception toute polynésienne de la mode à en voir l’affiche pour cette exposition : une femme portant une capeline…
J’ai trouvé à parler avec la créatrice des chapeaux et sacs en tissu. C’est une popa’a qui vendait les créations de toute sa famille : fille, gendre, petits-enfants. Elle m’a déjà donné rendez-vous pour un prochain salon, non, pour deux prochains salons où elle expose ! Créatrice dans l’âme, elle fabrique en tissu (ô sacrilège !) des chapeaux, des bobs, des cloches, des sacs à main, des sacs à dos. Il faut oser le faire dans ce pays où le tissage est culturel. Elle semble s’être beaucoup amusée en fabriquant ces pièces. Au prochain salon, elle exposera des lampes faites de bois flottés et de galets de la Papenoo. Et des porte-couteaux, des baguettes pour le riz, faits avec des graines ou des épines d’oursins.
A la Maison de la culture, deux expos en une même salle : peinture abstraite et créations de bijoux en nacre.
Une femme peintre au milieu de ses œuvres très colorées. Et l’artiste du travail de la nacre, ce que je préfère. Colliers, serre-cous, bracelets, pendentifs. Le travail est splendide, tout est finement ciselé, même le mode d’accrochage des colliers est réalisé en nacre. Mais, hum ! les prix reflètent les longues heures de recherche…
Les Marquisiens ont exposé dans la salle de Pirae. D’autres Marquisiens exposent dans le Hall de l’Assemblée. Explication : ceux qui ont exposé à Pirae étaient bien des Marquisiens des Marquises venus le plus souvent avec l’Aranui (cargo mixte qui fait le trafic entre les îles). Ceux du Hall de l’Assemblée sont les Marquisiens « de Tahiti » ! Vous pigez ? Non ? C’est pourtant simple : les artisans des Marquises accompagnent parfois leurs enfants à Tahiti quand ceux-ci viennent suivre le deuxième cycle des études secondaires à Papeete. Il n’y a pas de lycée aux Marquises seulement des collèges jusqu’à la classe de troisième. L’association des artisans marquisiens ne saurait prendre en son sein les Marquisiens expatriés à Papeete !
Sabine