Volontiers provocateur, Me Philippe Brun interpelle le président de la République. « Nicolas Sarkozy a déclaré qu'il fallait cesser les licenciements qui ne s'imposaient pas. Parfait. Je l'invite à venir étudier le cas de Motorola à Rennes. Après la théorie, passons aux travaux pratiques », lance l'avocat du comité d'entreprise de Motorola, à Cesson-Sévigné.
En attendant une hypothétique réponse, le « CE » assigne, ce matin, la direction de Motorola Bretagne devant le tribunal de grande instance de Rennes. Le comité d'entreprise conteste en effet la manière dont celle-ci a annoncé la fermeture du site cessonnais. « Elle a stoppé toute activité avant même de consulter le comité d'entreprise. C'est contraire au code du travail », explique l'avocat.
Sans activité depuis deux mois
Depuis le 31 octobre, les 138 salariés de ce centre de recherche et développement n'ont plus de projets à mener. « Chacun s'occupe en préparant ses CV ou en cherchant un repreneur pour le site », détaille Jean-Christophe Louvigné, le secrétaire du comité d'entreprise. En décembre, ceux-ci s'étaient notamment fait remarquer en produisant un clip humoristique, vantant leur entreprise tout en parodiant une chanson de Claude François.
Depuis la fin octobre, la direction a également cessé de faire appel aux 70 ingénieurs prestataires qui complétaient temporairement les effectifs. « Dans mon service, nous étions 17 dont 15 prestataires. Ils sont partis du jour au lendemain. On s'est retrouvé à deux. Autant dire que le projet sur lequel on travaillait pour le marché chinois a été stoppé », détaille l'une des salariés, Sophie Colomier.
Or, le comité d'entreprise, lui, n'a été consulté que le 12 décembre... Pour l'inspecteur du travail qui a visité l'entreprise, le 9 décembre, il s'agit là « d'un délit d'entrave ».
La fermeture malgré de solides finances
Mais plus que la procédure, ce sont les raisons avancées par la direction que contestent ces salariés. Ceux-ci réfutent toute difficulté économique. Se basant sur un rapport d'un expert-comptable, ils rappellent que le groupe Motorola affiche une trésorerie de sept milliards de dollars, que Motorola Bretagne possède 23 millions d'euros en fonds propres et que selon cet expert, « le bilan financier de la filiale bretonne est solide. Il ne s'agit donc pas d'une fermeture économique mais d'un choix stratégique. Motorola se désengage de l'Europe ! », insiste Jean-Christophe Louvigné.
Mais surtout, ces salariés ne digèrent pas le fait que l'entreprise s'apprêterait à toucher un crédit d'impôts de 15 millions d'euros au titre de la recherche. « C'est tout de même un peu gros ! On va alerter le ministre là-dessus ! »
En attendant, le comité d'entreprise espère donc que le tribunal annulera la procédure de cessation d'activité et gagnera ainsi un peu de temps pour retrouver un repreneur...
Pierrick BAUDAIS.
++ Les salariés se sont mobilisés de manière originale, en tournant des clips. Retrouvez les sur http://rd.center.free.fr !
Ouest-France