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Secret Défense de Philippe Haïm

Par Geouf

Résumé: Etudiante en langues arrondissant ses fins de mois en se prostituant, Diane (Vahina Giocante) trouve l’amour en la personne de Jeremy, un camarade de promotion. Mais son passé resurgit lorsqu’elle rencontre le père de Jeremy, Alex (Gerard Lanvin) qui semble tout connaître d’elle et la pousse à rejoindre les rangs de la DGSE. Pendant ce temps, Pierre (Nicolas Duvauchelle), jeune homme gentil mais un peu paumé se retrouve en prison pour avoir dealé quelques grammes de shit. Il fait la connaissance d’Aziz, qui va le prendre sous son aile et petit à petit le pousser à se convertir à l’Islam. C’est le début d’une lente descente aux enfers pour Lisa et Pierre…

Dis Papa Noël, un bon thriller français c’est possible ? On dirait bien que oui, vu la franche réussite que représente ce Secret Défense sorti de nulle part. Difficile en effet au premier abord d’imaginer le réalisateur des Daltons a la barre d’un thriller d’espionnage. Et pourtant, après 4 ans d’investigation et d’obstination, Philippe Haïm (aussi réalisateur de Barracuda, face-à-face étouffant entre Jean Rochefort et Guillaume Canet) a réussi à porter à l’écran cette histoire mettant en parallèle les méthodes des services secrets français et celles des groupuscules terroristes. Et le moins qu’on puisse dire, c’est que le constat est édifiant et fait froid dans le dos…

Grace à une construction parallèle implacable et à un réalisme à toute épreuve, Philippe Haïm arrive petit à petit à nous faire pénétrer dans ces mondes opposés et pourtant si semblables. Le film suit donc les destins croisés de Diane et Pierre, jeunes gens un peu paumés qui se retrouvent embrigadés un peu malgré eux dans deux camps opposés. Et si les idéologies et les buts sont différents, les méthodes mises en exergue par le film sont les mêmes : manipulation par les sentiments (l’amour de Jeremy pour Diane, l’amitié protectrice d’Aziz pour Pierre), pressions extérieures savamment orchestrées (viol dans la douche pour Pierre, Diane reconnue par un ancien client), propagande autour de la mission (la défense de la patrie, le combat pour une cause juste), tout est bon pour laver le cerveau des jeunes recrues et en faire de parfaites armes pour abattre l’ennemi. Mais si le film est souvent très réaliste grâce à une approche très documentée (on est très loin du glamour et des gadgets de James Bond), il n’en reste pas moins extrêmement ludique. L’ambiance est souvent tendue et le suspense savamment entretenu, la guerre a distance que se livre les deux camps faisant penser à un gigantesque jeu d’échec où les agents sont les pions et où tous les coups sont permis pour abattre l’adversaire. La dernière partie du métrage, où Diane doit déjouer une tentative d’attentat, fera certainement retenir le souffle de plus d’un spectateur.

Mais le film ne serait pas aussi réussi si ses interprètes n’étaient pas à la hauteur. Et là il faut avouer que pour une fois on est gâté. Tout d’abord grâce à un Gérard Lanvin monstrueux en chef de section de la DGSE. Manipulateur tout autant que protecteur, le personnage d’Alex est en effet très complexe et rentrera certainement au panthéon des plus grands rôles de l’acteur. Face à lui, la jeune Vahina Giocante impressionne par son naturel, tenant la dragée haute à son ainé. A la fois forte (elle ne se laisse pas marcher sur les pieds) mais encore immature et fragile (voir la terrible scène où Alex lui demande comme première mission de draguer un homme marié et de  ramener son alliance), Diane est de loin le personnage le plus attachant du film. De l’autre côté de la barrière, Nicolas Duvauchelle se tire avec les honneurs d’un rôle difficile, rendant parfaitement crédible le basculement de son personnage, bien loin du cliché habituel du terroriste musulman assoiffé de sang. Et les seconds rôles ne sont pas en reste, apportant force et crédibilité à l’univers dépeint par Philippe Haïm.

Et si on peut regretter quelques raccourcis un peu malheureux (la fin de la conversion de Pierre est un peu rapide) et une surenchère malvenue dans les twists finaux (oui mais en fait c’était tout prévu mais pas tout à fait) ainsi qu’un épilogue en demi-teinte (après une charge féroce sur les méthodes des services secrets, on nous balance un écriteau saluant leur travail et leur efficacité), difficile de faire la fine bouche devant ce divertissement intelligent et prenant. Secret Défense prouve de manière éclatante que lorsqu’il sait s’en donner les moyens, le cinéma français n’a rien à envier a son homologue américain.

Note : 8/10

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